L'anecdote se déroule à la deuxième ronde du dernier Tournoi des Maîtres. Elin Nordegren regarde son mari Tiger Woods rater l'oiselet au troisième trou. Elle est à l'intérieur des cordes, au milieu de la foule, 30 verges à droite du vert.

La Suédoise est imparable avec ses grandes lunettes de soleil posées sur sa chevelure dorée. Elle marche lentement avec Hank Haney, l'entraîneur de son mari, lui aussi placardé de logos Nike. Les fans aussi les reconnaissent. Mais personne n'osera les déranger. Au contraire, les gens semblent presque baisser le regard pour ne pas les gêner.

L'histoire illustre pourquoi c'est à Augusta que Tiger a décidé de revenir au jeu. Bien sûr, il y a l'importance du tournoi, mais il y a aussi son environnement hyper contrôlé.

Si des partisans brandissent des pancartes ou dérangent Tiger, des gardiens de sécurité les expulseront sûrement. Mais la sécurité ne sera peut-être même pas nécessaire. L'autocensure suffira. Personne ne veut perdre son billet, pour lequel la liste d'attente est fermée depuis les années 70.

Et surtout, le public d'Augusta est le plus respectueux, grâce à un mélange de déférence et de bienséance orgueilleuse. On n'y entend personne crier «You-da-man!» ou «In-da-hole!». Enfin, si. De mémoire, une seule fois, en 2008. Immédiatement après, deux hommes se sont alors retournés contre l'offenseur. «S'il vous plaît, pas au Masters», lui a-t-on imploré.

Certes, un mercenaire paparazzi pourrait acheter un billet sur le marché noir, faire passer une caméra à travers les détecteurs de métal, se faufiler dans la foule monstre et harceler Tiger pour ensuite vendre son oeuvre. Mais ce sera difficile.

Et les journalistes? Agusta National est le seul parcours où ils doivent rester à l'extérieur des cordes. Ils seront à l'écart, et pas plus nombreux qu'à l'habitude. Les demandes d'accréditation étaient déjà fermées quand Tiger a annoncé son retour en mars. Et aux dernières nouvelles, aucun journaliste additionnel n'avait été admis, que ce soit le petit Springfield Times ou le gros FOX. On imagine la satisfaction des bonzes du Augusta National en leur répondant méticuleusement: N-O-N.

Même l'accès à la conférence de presse de Tiger aujourd'hui a été limité à un représentant par média. S'il y a un cirque médiatique, il risque de se dérouler à quelques mètres de l'autre côté de la clôture du boulevard Washington.

Place au golf

Tiger devra un jour affronter cette meute. Mais pour l'instant, sa stratégie du retour à petits pas fonctionne. Déclaration écrite, suivie d'une déclaration orale, deux entrevues éclair et contrôlées, et une conférence de presse cet après-midi.

Ensuite, place au golf. Enfin. Pour que la conversation reste sur le sujet, Tiger connaît la solution. Bien jouer. Tout de suite. Et idéalement gagner. Car n'oublions pas l'essentiel. Le tournoi commence jeudi, et il reste le favori.