Après avoir conquis les États-Unis, le mois dernier à Washington, Rory McIlroy s'attaque cette semaine à Sandwich à une tâche encore plus ardue: conquérir la Grande-Bretagne! L'exploit n'a été réussi que par les Romains, raconte-t-on ici, et ça remonte à plus de 2000 ans...

Autant dire que McIlroy aura fort à faire sur le difficile parcours du club Royal St. George, et il est le premier à le reconnaître. «Je sais ce qui m'attend à l'Omnium britannique», a insisté le golfeur de 22 ans, il y a deux semaines à Wimbledon. Défrisé, bien coiffé et tiré à quatre épingles - loge royale oblige -, McIlroy n'avait plus cet air de grand adolescent qu'il traîne souvent sur les parcours.

«J'ai été très occupé depuis ma victoire à l'Omnium des États-Unis et je profite de toutes les chances, comme celle-ci, pour vivre de nouvelles expériences et rencontrer des gens intéressants.»

Le jeune homme d'Holywood, près de Belfast en Irlande du Nord, a été initié au golf par son père Gerry alors qu'il n'avait pas encore 2 ans. Lui-même un excellent golfeur, Gerry et sa femme Rosie ont multiplié les emplois pour financer les débuts de leur rejeton.

Débuts fastes s'il en est: champion du monde à 10 ans, membre de l'équipe de la Coupe Ryder junior à 15 ans, professionnel à 18 ans, après avoir refusé une bourse dans une université américaine... Pourtant, à seulement 5'9 et 72 kilos, il est loin des nouveaux stéréotypes sur les circuits professionnels.

L'autre matin, à Wimbledon, il avait un peu l'air d'un petit garçon à côté d'Andy Murray et de John McEnroe. Mais il parlait d'égal à égal avec eux. Et un peu plus tard, dans les vestiaires, il a pu discuter longuement avec Rafael Nadal.

«Ces grands champions ont plein de choses à m'apprendre et j'étais impressionné de voir qu'ils pensaient la même chose de moi. Le tennis est un sport différent - on est face à un adversaire -, mais il y a beaucoup de points communs avec le golf dans la préparation mentale et dans la façon de réagir aux bonnes ou mauvaises performances.

«Rafael (Nadal) m'a expliqué qu'il tentait de bloquer tout ce qui entoure les matchs pour se concentrer uniquement sur son jeu, un point à la fois. C'est curieux, mais c'est exactement ce que j'ai fait à Washington...»

D'un majeur à l'autre

McIlroy s'est offert trois semaines de congé après sa victoire au Congressional Country Club et il n'a disputé aucun tournoi entre les deux majeurs. Il a assisté, le 2 juillet, au combat de boxe Klitchko-Haye, à Hambourg, était de retour à Wimbledon pour la finale masculine le lendemain et n'a repris l'entraînement qu'au cours des derniers jours.

«Je suis un véritable amateur de sport, a-t-il souligné à Wimbledon. J'aime regarder tout ce qui est diffusé à la télé et c'est un privilège d'être ici aujourd'hui pour un événement d'une telle importance.»

Plusieurs experts, Jack Nicklaus et Colin Montgomerie notamment, ont mis en doute la pertinence d'une telle approche. «La saison est très longue et j'ai beaucoup joué entre le Masters et le US Open, a toutefois rappelé le golfeur. C'est sûr que je ne veux pas perdre ma forme, mais je crois que c'était important de recharger mes batteries, mentalement surtout.

«Cette pause m'a permis de m'éloigner un peu du golf, d'oublier la pression suscitée par toutes les attentes du public, des médias et de moi-même...

«Je me suis quand même un peu entraîné à la maison et je serai au Royal St. George cette semaine (la semaine dernière) pour quelques rondes d'entraînement, avant d'y revenir pour l'Omnium.»

Alors que plusieurs golfeurs sont à Sandwich depuis plusieurs jours, multipliant les rondes d'entraînement, McIlroy ne comptait arriver qu'aujourd'hui, pour une conférence de presse. «J'ai prévu la même préparation que pour tous les tournois majeurs, a-t-il assuré. Je n'ai pris aucun raccourci.»

McIlroy ne doute pas un instant de ses chances de remporter l'Omnium britannique, cette semaine. L'an dernier, il a égalé le record de St.Andrews (63) en première ronde, mais s'est écroulé dans des conditions très difficiles le lendemain avec un 80. Deux très bonnes rondes finales lui avaient quand même permis de terminer en troisième place.

«L'omnium de l'an dernier, comme le Masters cette année, a été une étape dans un processus d'apprentissage, a souligné McIlroy. Le golf est un sport trop compliqué pour imaginer qu'on puisse arriver et tout gagner du premier coup. Il faut apprendre à gagner.

«Je joue très bien présentement. Mon élan est à point, j'ai confiance en mes coups roulés et je crois pouvoir réussir un bon pointage chaque fois que je joue. Je suis encore jeune, mais je joue depuis assez longtemps pour savoir qu'on ne contrôle pas tout au golf.

«J'aimerais gagner l'Omnium, mais plusieurs autres golfeurs sont aussi en mesure de le faire. Et le parcours peut toujours avoir le dernier mot...»

À la fois confiant et humble, Rory McIlroy semble prêt pour le plus gros test de sa jeune carrière. La question est maintenant de savoir s'il réagira aussi bien après une victoire qu'il l'a fait après la défaite.