On se promène au centre-ville de Chicago et il y a des grosses têtes d'ours un peu partout. On arrive au complexe d'entraînement de l'équipe, à environ 30 minutes de la ville, et on voit ce message laissé sur une banderole à l'entrée: «Ramenons le trophée Lombardi!»

C'est clair, la ville est football, et tout cela vient nous rappeler que les Bears ne sont plus qu'à un petit match du Super Bowl. Une victoire en finale de la Conférence nationale, dimanche sur les Packers de Green Bay, et ils y seront pour la troisième fois de leur histoire.

Il y a des équipes qui s'emporteraient pour moins que ça. Mais pas ces gars-là. En fait, j'ai rarement vu des joueurs aussi relax à deux jours d'une finale de conférence. J'ai dit relax? J'aurais pu dire plates. Les Bears sont plates. Il y a des grandes gueules dans cette ligue, il y a des personnalités immenses, mais de toute évidence, elles ne sont pas dans ce vestiaire.

C'est peut-être parce que les Bears sont habitués à camper le rôle de négligés. Vous croyez que les partisans montréalais sont parfois cyniques? Ceux des Bears le sont 10 fois plus.

«Cette saison, personne ne nous accordait la moindre chance, a commencé par dire le secondeur vedette Brian Urlacher, hier avant l'entraînement. C'est pour ça que c'est plaisant de se retrouver dans cette position.»

Urlacher a raison: on ne s'attendait pas à grand-chose de ce club-là, qui a conclu la saison 2009 avec une fiche de 7-9. Ils sont comme ça à Chicago. Ils aiment leurs Bears, ils les adorent même, mais s'il y en a un qui joue mal (le quart-arrière, surtout), ils vont le huer comme c'est pas permis. Ils ne sont pas très optimistes non plus.

C'est sans doute ce qui arrive quand une équipe ne remporte qu'un seul Super Bowl en 45 ans; les attentes ne sont pas très élevées.

«Il n'y avait aucune pression sur nous cette saison parce que les fans ne s'attendaient à rien de toute façon, a reconnu l'ailier rapproché Desmond Clark. Les fans qui croyaient en nous étaient minoritaires. C'est la même chose cette semaine; selon les parieurs de Las Vegas, nous ne sommes pas les favoris... on est au courant de tout ça.

«À notre premier match des séries, j'entendais dire qu'on était chanceux d'affronter les Seahawks de Seattle. Eh bien, allez demander aux Saints ce qu'ils pensent des Seahawks! Et là, on dit qu'on affronte seulement l'équipe qui est qualifiée au sixième rang dans notre conférence, et pourtant, ce sont les Packers qui sont les favoris. Alors, c'est vrai qu'à l'extérieur de ce vestiaire, il y a peu de gens qui croient en cette équipe...»

C'est aussi une question de style. Des quatre clubs qui sont toujours en vie dans la NFL, les Bears ont peut-être l'équipe la moins spectaculaire. Les Packers ont Aaron Rodgers et Greg Jennings, les Steelers de Pittsburgh ont Mike Wallace et Gros Ben, les Jets de New York ont cette défense de feu et la grande gueule de Rex Ryan. Mais les Bears? Eh bien, les Bears ont Devin Hester, le spécialiste des retours. Et ils ont un paquet de gars qui se contentent de faire les «petites choses», comme on le dit si bien dans le milieu.

C'est peut-être pour ça qu'on ne les prend pas trop au sérieux.

«C'est à cause de notre style, admet Desmond Clark. Nous ne sommes pas spectaculaires. Nous ne sommes pas comme les Patriots de la Nouvelle-Angleterre. Quand on gagne, c'est laid. Ce n'est pas un style de jeu qui va plaire à la majorité des fans, et pour bien des gens, nous sommes ennuyeux.

«Mais notre entraîneur le répète toujours: l'identité de celui qui marque nos points importe peu. Si on gagne 23-17 et qu'il y a un touché des unités spéciales, un touché de la défense et trois bottés de précision, nous n'avons aucun problème avec ça! En autant qu'on marque des points, on se fout pas mal de la manière.»

Voilà pourquoi il y a zéro pression sur les épaulettes des Bears cette semaine. Parce que de toute façon, personne ne les voyait ici, fin janvier, à un match du gros match.

Mais ils sont encore là. Et tant pis si ça ne fait pas notre affaire.