Pour une ville qui porte fièrement le surnom de «Ville des champions», les Eskimos d'Edmonton sont une grande déception en 2013. Bon derniers au classement de la Ligue canadienne de football, les Eskimos viennent de perdre un huitième match consécutif, une première depuis 1971 pour le club albertain.

Plusieurs critiques ont été dirigées vers l'ancien directeur général, Eric Tillman, en raison de l'échange du légendaire quart Ricky Ray aux Argonauts de Toronto. Mais le nouveau régime en place n'a guère fait mieux, et l'aura de chaos au sein de l'équipe est frappante.

L'entraîneur-chef Kavis Reed s'est curieusement vu offrir une prolongation de contrat après la deuxième semaine d'activités. Ses crises périodiques font de lui un entraîneur difficile à suivre. Ses joueurs veulent bien nous vendre qu'ils l'endossent et qu'ils croient en sa méthode, mais j'imagine déjà les commentaires de ces mêmes joueurs dans quelques mois lorsque Reed sera congédié...

C'est le nouveau directeur général, Ed Hervey, qui devra prendre cette décision importante à la fin du calendrier. Mais Hervey sera également sous la loupe pour l'ensemble de son travail depuis son embauche, en décembre 2012.

Lors d'un point de presse, mardi dernier, Hervey a tenu des commentaires foudroyants à l'égard des membres de son organisation. Il a commencé par critiquer la sélection de jeux du coordonnateur offensif Doug Sams, soulignant qu'il lui retirait cette responsabilité. Il prenait cette décision malgré une nette progression de l'unité offensive, qui inscrivait une moyenne de 24,7 points par match - un sommet pour l'équipe depuis 2009. Il en a aussi demandé plus à son coordonnateur défensif Greg Marshall... tant qu'à y être.

Mais où Ed Hervey a vraiment erré, selon moi, c'est lorsqu'il a publiquement montré du doigt un de ses joueurs. Alors que la ligne à l'attaque dans son ensemble connaît une saison de misère, il a précisément ciblé Simeon Rottier, un joueur de ligne canadien de cinquième année. Hervey a mentionné qu'il était insatisfait de ses performances et qu'il serait bien content si Rottier ne jouait plus un match pour le reste de la saison. C'est comme si Hervey, seulement six ans après sa retraite, avait déjà oublié ce que c'était que d'être un joueur qui vit une mauvaise séquence.

D'après Hervey, le football est un sport de résultat, pour lequel il faut être responsable de ses actes. Je suis tout à fait d'accord. Mais c'est le genre de reproche qui se fait derrière les portes closes et non devant les caméras.

Si un directeur général veut soutirer le maximum de ses joueurs, bâtir un bon esprit d'équipe et attirer des joueurs de premier plan par l'entremise du marché des joueurs autonomes, c'est une bien mauvaise façon de s'y prendre.

L'Association des joueurs est même venue à la défense de Rottier en soulignant une disposition de la convention collective qui interdit précisément ce genre de commentaire public de la part des équipes et de leurs employés.

S'il voulait fouetter ses troupes, son plan n'a pas eu l'effet escompté. Les Eskimos ont essuyé une deuxième défaite consécutive contre les Stampeders de Calgary, et la ligne offensive a, une fois de plus, accordé sept sacs.

Comble de toute cette mésaventure, l'équipe a publié un communiqué hier annonçant qu'Hervey avait eu une discussion avec Rottier et que ce dernier serait de retour dans l'alignement pour le prochain match. Difficile à suivre, vous dites?

Malheureusement pour lui, Hervey n'en est pas à ses premières frasques. Après avoir tenu un camp d'entraînement secret en Floride, avoir soumis ses dernières coupes au camp d'entraînement une journée en retard et procédé à plusieurs échanges douteux, il a rapidement perdu son statut de sauveur auprès du public edmontonien.

Alors qu'il a tenté de faire porter le blâme à un peu tout le monde dans l'organisation pour cette piètre saison, Ed Hervey réalise tranquillement que le seul qu'il lui reste à montrer du doigt est... lui-même.