Patrick Boivin sait pertinemment que le premier match local de ses Alouettes se veut le premier d'une série de tests que lui feront passer les partisans du club. Sa stratégie: se rebrancher sur Montréal.

Depuis son arrivée en poste en décembre 2016, Boivin fouille de fond en comble afin de trouver la bonne formule pour relancer les Alouettes, à la fois sur le terrain et aux guichets. Il croit que son équipe et lui l'ont trouvée.

«Ce ne serait pas une bonne affaire si je ne commençais pas par parler de l'équipe, car c'est une équipe fondamentalement différente que les partisans vont retrouver, a déclaré le président des Alouettes au cours d'un long entretien avec La Presse canadienne. Elle ne compte pas que des vedettes, mais des personnalités que les gens vont apprendre à connaître. Les gens ont un peu de difficulté à se créer un sentiment d'appartenance envers nos joueurs. Je sais que ça se fait à travers les victoires, mais en partie aussi par les interactions avec nos joueurs. Les Hénoc Muamba, Jamaal Westerman, Tommy Campbell et Chris Williams sont tous des noms que nos partisans ne connaissent pas encore, mais qu'ils vont apprendre à connaître avec le temps.

«Dans un deuxième temps, il faut embrasser Montréal, s'arrimer avec la réalité événementielle montréalaise, surtout l'été. Par le passé, on calculait presque que pendant le Festival de jazz ou les vacances de la construction, nous perdions des ventes. Notre état d'esprit est maintenant tout le contraire. Si on veut faire vivre Montréal à travers nos matchs, il faut s'arrimer avec qui est Montréal. Une partie de ça était de revoir notre calendrier, pour se positionner les vendredis soirs, afin de devenir le coup d'envoi du week-end. On voulait devenir une option hyper valable de sortie du vendredi pour lancer le week-end, de façon constante à travers l'été. Donc, dans nos six premiers matchs, nous avons cinq vendredis soirs.

«Ensuite, on veut mettre en valeur Montréal, par la musique, notamment. À l'arrivée des gens, il y aura un band qui servira à mettre l'ambiance, toujours un band montréalais. Vendredi, c'est Galaxy. Le 26 juillet, nous aurons Loud, qui est l'une des têtes d'affiche d'Osheaga la semaine suivante. On veut non seulement être pertinents et attirer une nouvelle génération de fans, mais aussi faire ressortir l'ADN de Montréal à travers ce qu'on a comme plateforme.»

Montréal sera également mise en valeur à l'intérieur du stade sous différents aspects, que ce soit par la nourriture vendue aux concessions, mais aussi par l'ambiance qu'on veut instaurer dans le stade. On veut aussi attirer une nouvelle génération de partisans, celle qui n'a peut-être pas connu les succès des Alouettes d'il y a 10 ans. Et cette nouvelle génération - les 18-30 ans, tels que les identifie Boivin - ne consomme pas de la même façon que la précédente. D'où l'arrivée des billets «Q4. Aux coûts de 7 ou 10 $, ces billets permettront aux partisans de ne se rendre au stade que pour la deuxième moitié de la rencontre.

«Bien des gens estiment que c'est une mauvaise idée, selon ce que j'ai lu sur les médias sociaux, a indiqué Boivin. Mais si tu penses à la nouvelle génération de consommateurs, qui peut être très spontanée, mais aussi très concentrée, elle pourrait ne pas être intéressée par un match complet où l'écart est de 30 points à la mi-temps. Mais si on a un match nul et que pour 10 $ je peux aller passer une heure et demie au stade, prendre deux bières et passer un peu de temps dans la zone DJ avant de sortir ou poursuivre ma soirée, pourquoi pas? Les gens qui terminent le travail plus tard aussi et qui ne veulent pas «perdre» la moitié d'un match en achetant un billet au complet se retrouvent aussi avec une option pratique et intéressante.

«Dans la LCF, je crois que ce sont 60 pour cent des matchs qui se décident au quatrième quart, poursuit-il. De ces 60 pour cent, une très haute majorité se décide dans les quatre ou cinq dernières minutes. Tu as donc un concentré de bonnes performances. Alors que nous sommes constamment en train de nous battre pour vendre des matchs complets, on va s'adapter aux habitudes de consommation.»

Cette bagarre, les Alouettes la perdent un petit peu plus chaque année depuis quatre ou cinq ans.

«Cette saison, c'est de l'ordre de 15 pour cent (d'abonnements en moins). C'est normal. Tu ne peux pas transporter des saisons comme les dernières que nous avons eues - sans notion d'espoir - sans t'en ressentir. Au bout du compte, les partisans, comme nos partenaires, tout ce qu'ils veulent, c'est de pouvoir espérer que cette équipe soit sur la bonne voie. Si on fait la démonstration qu'on peut progresser, les gens vont croire que l'aspect football est bien en place.

«Ça commence avec l'équipe sur le terrain et il faut qu'elle progresse de match en match. Des défaites serrées, c'est aussi bon à mes yeux. Si on réussit ça, les (vente aux) guichets vont suivre. Je crois fondamentalement que si les gens voient qu'on est bien en selle, ils vont revenir.

«Il faut donner l'occasion aux gens d'embarquer dans ce qu'on veut faire, et pour ça, il faut créer une ambiance. Nous avons un nouvel annonceur maison qui va nous aider à faire cela. Une nouvelle animatrice de foule. On s'est associé à Yann Perreault - un grand fan -, qui nous a prêté sa chanson «J'aime les oiseaux» pour qu'elle devienne notre chanson de touchés. On a un nouveau DJ, une section bouffe à volonté et une autre en partenariat avec BBQ Québec, où les partisans vivront une ambiance de «tailgate» tout au long de la partie. Ce sont toutes des variables qui influencent la façon dont quelqu'un peut apprécier l'atmosphère d'un match.»

Les partisans - nouveaux comme anciens - pourront juger cette nouvelle ambiance dès vendredi, 19h, au stade Percival-Molson, alors que les Blue Bombers de Winnipeg seront les visiteurs.

La Presse

Le président des Alouettes Patrick Boivin