L'idée a du sens et pour plusieurs raisons : à partir de 2019, la Ligue canadienne de football pourrait devancer le début de sa saison d'un mois. C'est du moins ce à quoi songe le commissaire Randy Ambrosie.

« Je crois qu'on devrait étudier cette possibilité sérieusement. Imaginez un match de la Coupe Grey dans la troisième semaine d'octobre alors qu'il fait beau dehors et qu'on n'a pas à porter 900 épaisseurs de vêtements et nos bottes d'hiver. »

« Personnellement, j'aime beaucoup cette idée, mais je veux m'assurer qu'on y réfléchisse bien », a dit Ambrosie lors de son bilan annuel de la semaine dernière.

C'était toutefois avant que les Argonauts de Toronto et les Stampeders de Calgary disputent le 105e match de la Coupe Grey sous les flocons au TD Place d'Ottawa, un décor qui a enchanté les téléspectateurs, et avec raison.

Sauf que normalement, la neige n'est pas au rendez-vous pour la finale du football canadien. Il n'y a habituellement que le froid sibérien.

Ça fait d'ailleurs longtemps que les amateurs de l'ouest du pays souhaitent que le calendrier soit devancé de quelques semaines. Jouer au football à Edmonton ou à Winnipeg en novembre est rarement une partie de plaisir.

Ce n'est pas pour rien que la NFL présente son Super Bowl dans des stades couverts ou des villes du Sud. Il y a quatre ans, lorsque l'événement a eu lieu au New Jersey, la Ligue a croisé les doigts durant des semaines en espérant que la météo se montre clémente, ce qui a finalement été le cas.

Les deux équipes new-yorkaises, les Giants et les Jets, venaient d'investir une fortune dans leur nouveau MetLife Stadium, la NFL pouvait donc difficilement refuser d'y présenter le Super Bowl. Mais depuis ce temps, aucune autre ville du Nord avec un stade à ciel ouvert n'a obtenu la chance de présenter le prestigieux événement.

Discussions avec le NFL Network

Mais si la LCF songe à amorcer son calendrier un mois plus tôt, ce n'est pas seulement en raison de la météo. Ambrosie a reconnu qu'il avait eu des discussions avec la NFL afin de présenter des matchs sur le NFL Network, qui peine à meubler sa grille horaire de mai à août.

En commençant sa saison au mois de mai plutôt qu'en juin, la LCF pourrait présenter des matchs à la télé américaine pendant un mois de plus avant que ne débute la saison de la NFL.

« Je suis parfaitement d'accord avec l'idée que notre sport soit vu par plus de gens un peu partout dans le monde, et je ne parle pas seulement du marché américain », a dit Ambrosie dans une récente entrevue avec l'Ottawa Sun.

Le match de la Coupe Grey de dimanche dernier a été présenté sur les ondes d'ESPN 2 aux États-Unis. Lorsque l'entente entre ESPN et la LCF prendra fin, la Ligue et le NFL Network pourraient toutefois unir leurs forces.

Les maritimes et après?

Dans une entrevue avec La Presse il y a quelques mois, Ambrosie n'avait pas caché qu'il souhaitait voir la LCF procéder à une ou des expansions à moyen terme. Depuis cet entretien, un groupe des Maritimes a manifesté son intérêt afin d'obtenir une concession à Halifax.

Ambrosie a toutefois parlé d'une 11e et d'une 12e concession. Et c'est précisément le défaut de la LCF : un nombre d'équipes insuffisant, qui mène à un manque d'intérêt du public durant la saison. Il n'y a pas assez d'enjeux parce que les courses aux séries sont trop souvent inexistantes.

Mais quelles autres villes canadiennes pourraient accueillir de nouvelles équipes ?

Québec ? La Vieille Capitale semble parfaitement contentée avec le Rouge et Or et le football universitaire. Saskatoon ? Le risque de trop affaiblir les Roughriders de la Saskatchewan, la concession la plus forte de la ligue, serait considérable. Idem pour Victoria en Colombie-Britannique, et on retrouve déjà trois équipes en Ontario et deux en Alberta.

Alors où ? Ambrosie pourrait-il se laisser tenter par une expansion aux États-Unis ? Entendu, celle des années 90 s'est avérée un échec. Cela dit, l'idée d'implanter la plupart des équipes dans des villes du Sud n'était peut-être pas logique...

Si, après avoir mieux fait connaître son produit par l'entremise du NFL Network, la LCF visait des marchés américains de taille moyenne qui n'ont pas d'équipes de la NFL, elle pourrait faire exploser sa popularité et ses recettes.

On le sait, les Américains raffolent du football et n'ont rien à se mettre sous la dent durant le printemps et l'été. La LCF est la deuxième ligue professionnelle au monde en importance et la qualité de son produit s'améliore constamment. Plus la ligue sera forte, meilleur sera le produit.

Un message inclusif

Il y a quelques années, le slogan de la LCF était This Is Our League (Ceci est notre ligue). Ambrosie a complètement changé la stratégie, misant plutôt sur un message inclusif. La campagne publicitaire rassembleuse de la LCF des derniers mois a d'ailleurs été un beau succès. On parlait d'inclusion tandis que la NFL était aux prises avec la controverse de l'hymne national. Bon timing.

Trop souvent par le passé, la LCF s'est entêtée à ne rien changer à sa façon de faire, ce qui l'a menée à faire concurrence au géant qu'est la NFL, ce qui est un non-sens. Afin d'exploiter les vastes possibilités qui s'offrent à elle, la LCF doit s'ajuster à la NFL et y voir un partenaire.

Ambrosie, qui a brillé dans tous les postes qu'il a occupés durant sa carrière, dont ceux dans le monde de la finance, semble être l'homme tout désigné pour permettre à la LCF de grandir. « Notre mission est de mener notre ligue à des sommets plus élevés », a-t-il d'ailleurs dit la semaine dernière.

Dans ses premiers mois comme commissaire, Ambrosie a pris plusieurs décisions judicieuses. Sa feuille de route est déjà bien garnie et sa vision de l'avenir de son circuit semble assez bien définie.

Bref, Ambrosie est la personne toute désignée pour faire croître la LCF, qui pourrait connaître un essor au cours de la prochaine décennie.