C'est la fois où Antony Auclair n'a pas serré la main de Tom Brady. «Et je le regrette un peu! J'étais fâché de la défaite. Dans la NFL, après le match, les gars qui le veulent vont au milieu du terrain, se serrent la main et jasent un peu. Mais je ne connais personne et je n'avais personne à qui serrer la main! Alors j'ai suivi Luke Stocker au vestiaire.»

À défaut de leur rapporter un autographe, il s'en serait au moins vanté auprès de sa mère et de son frère, demi défensif avec le Rouge et Or et coéquipier d'Antony l'an dernier à l'Université Laval. Les deux sont fans des Patriots.

La défaite de 19-14 contre la Nouvelle-Angleterre, jeudi dernier, restera quand même gravée dans son esprit. Le Beauceron de 24 ans venait de jouer son premier match dans la NFL.

«J'étais déçu d'avoir perdu, c'est un match qu'on aurait clairement pu gagner. Mais comme baptême, j'étais quand même content. La soirée Color Rush, une partie le jeudi que tout le monde regarde - en tout cas, si tu suis le football, tu regardes cette game-là - contre les champions du Super Bowl, c'était pas mal cool», a-t-il affirmé au Soleil, hier, avec un peu de recul.

Les chances sont faibles que la fierté de Notre-Dame-des-Pins ose cette semaine l'égoportrait avec Adrian Peterson, la nouvelle acquisition des Cardinals de l'Arizona (2-3), ou encore Carson Palmer ou Larry Fitzgerald. L'ailier rapproché recrue des Buccaneers de Tampa Bay (2-2) pourrait disputer sa deuxième rencontre dans le plus gros circuit de sport en Amérique du Nord, à Glendale. À voir dimanche, 16h, heure du Québec.

Car le principal intéressé assure ne pas savoir s'il sera ou non en uniforme. «Pour vrai, je ne le sais pas encore», a-t-il indiqué, après sa journée d'entraînement et de réunions d'équipe. La routine: lever à 6h15, boulot dès 7h30, jusqu'aux environs de 17h30. Et cela recommence le lendemain.

Auclair demeure le quatrième ailier rapproché de l'équipe dans la charte des positions, derrière Cameron Brate, O.J. Howard et Stocker. Son rôle, comme jeudi dernier, se limiterait surtout aux unités spéciales. Avec le retour de blessure de plusieurs joueurs défensifs, reste à voir si l'état-major des Bucs préférera mettre en uniforme un secondeur pour effectuer ce boulot.

Un jeu, un touché

Il a quand même foulé le terrain sur 20 des 175 jeux contre les Pats. Dix-neuf sur les 29 des unités spéciales (66 %), au troisième rang des joueurs les plus utilisés par les Bucs dans ces situations. Aussi lors d'un jeu offensif, une ligne musclée à quatre ailiers rapprochés sur la course d'une verge de Doug Martin pour le premier touché de Tampa.

Pour franchir la ligne des buts, Martin est littéralement passé par-dessus Auclair. Le porteur de ballon y a donc vu la meilleure ouverture. «En offensive, je suis un en un. Un jeu, un touché!», rigole encore le Québécois, qui aurait aimé davantage de ce genre de situation à la porte des buts adverse.

Auclair avait joué au spectateur lors des trois premières rencontres du calendrier. Une première dans sa carrière de footballeur, lui qui a toujours été envoyé dans la mêlée à tous les niveaux où il a passé. Il devait se préparer comme s'il allait jouer, mais sans savoir si cela se produirait ou non. Si un autre ailier rapproché tombait malade ou se blessait le matin de la partie, il devait être prêt à le remplacer. Et jusqu'ici, c'est la même chose cette semaine.

L'ex-Rouge et Or n'était pas le seul à faire ses débuts dans l'uniforme des Bucs, le 6 octobre. Le maraudeur Isaiah Johnson vivait aussi son baptême, lui qui a été limité à 18 jeux des unités spéciales. Comme Auclair, Johnson a été embauché à titre de joueur autonome, mais un an plus tôt, en 2016, et a passé sa première saison complète dans l'équipe d'entraînement.

Rappelons que le garde québécois Laurent Duvernay-Tardif n'avait pas revêtu l'uniforme des Chiefs de Kansas City une seule fois à sa première campagne dans la NFL.

«Ça reste un jeu»

Sans savoir ce qui l'attendait, Auclair dit s'être senti à sa place dès le premier match présaison, le 11 août, à Cincinnati. Depuis, il tente toujours de s'améliorer. «Ici, tout le monde a quelque chose à travailler après chaque match, que tu viennes de l'Université de l'Alabama ou de l'Université Laval. Nos coachs disent toujours: "Ou bien tu deviens meilleur, ou bien tu deviens pire." Tu as deux options, mais il y en a une qui ne dure pas longtemps!», s'esclaffe-t-il.

À travers le sujet chaud de l'hymne national, la pression constante de gagner, la prière d'avant-match et le sentiment d'être toujours sur la corde raide, Auclair tâche de se rappeler que le football reste un jeu. «C'est un jeu et j'ai fait ça toute ma vie. Tout est plus vite, plus physique, plus fort, plus tout, mais ça reste un jeu», conclut-il avec son flegme habituel.

Photo Erick Labbé, Archives Le Soleil

Antony Auclair s'est entraîné devant des dépisteurs de la NFL, en mars dernier.