Comme vous pouvez l'imaginer, la NFL ne paraît pas trop bien dans Concussion, qui met en vedette Will Smith et qui est sorti en salle vendredi. Ceux qui ont suivi le dossier des commotions cérébrales dans la NFL apprendront peu de nouvelles choses en visionnant le film, mais il n'en demeure pas moins troublant de voir la réalité portée à l'écran.

Le film raconte l'histoire de Bennet Omalu, un neuropathologiste nigérian qui travaillait à Pittsburgh et qui a pratiqué l'autopsie de Mike Webster, ancien centre des Steelers, décédé en 2002. Omalu a financé de sa poche l'étude du cerveau du membre du Temple de la renommée, et les fruits de ses recherches ont changé à jamais le football.

Le médecin a constaté ce qu'il soupçonnait, à savoir que les commotions cérébrales et les coups répétés à la tête pouvaient mener à des maladies mentales sérieuses, dont la dépression, l'alzheimer et la démence. Âgé de 50 ans lorsqu'il est mort, Webster souffrait de toutes ces maladies et vivait dans son camion.

Bennet Omalu a appelé la maladie causée par les coups à la tête à répétition l'encéphalopathie traumatique chronique. La NFL a toutefois rejeté en bloc les découvertes du médecin et lui a même mis des bâtons dans les roues afin qu'elles soient rendues publiques le moins possible.

Mais après le décès de plusieurs autres anciens joueurs qui souffraient de maladies mentales et qui présentaient également des signes d'encéphalopathie traumatique chronique (Terry Long, Justin Strzelczyk, Andre Waters, Dave Duerson, Chris Henry, Junior Seau), la NFL a fini par admettre qu'il y avait un lien entre leur état de santé et les coups à la tête qu'ils avaient encaissés durant leur carrière.

En août 2013, la NFL a accepté de verser 765 millions à ses anciens joueurs qui souffrent de maladies mentales. 

Selon un article paru sur le site de la ligue (nfl.com), les joueurs retraités qui souffrent d'une maladie mentale causée par leur carrière au football peuvent recevoir une somme maximale de 5 millions.

Dans l'entente conclue avec ses anciens joueurs, la NFL a toutefois exigé de ne pas avoir à divulguer ce qu'elle savait au sujet des dangers liés aux commotions cérébrales ni depuis quand elle le savait... Avec justesse, un parallèle entre la NFL et l'industrie du tabac est tracé dans Concussion.

Le film laisse aussi entendre que l'ancien commissaire de la ligue, Paul Tagliabue, a quitté le navire avant que le scandale en question n'éclate au grand jour. Tagliabue a été remplacé par Roger Goodell, qui s'est vite retrouvé au coeur de la tempête.

UNE RELIGION

Bien que tardivement, la NFL a effectué des changements qui s'imposaient au cours des dernières années afin de tenter de contrer le fléau des commotions cérébrales.

L'accent a été mis sur la prévention et l'éducation ; il y a maintenant des médecins indépendants présents sur les lignes de touche à tous les matchs afin de déceler les signes éventuels de commotions cérébrales ; un protocole a été mis en place pour les joueurs qui ont subi une commotion ; des règlements ont été changés afin de mieux protéger les joueurs.

Malgré tous ces efforts, le football restera toujours un sport violent et dangereux, cela va de soi. La NFL elle-même estime que 28 % de ses joueurs souffriront de problèmes de santé mentale à cause du football lorsque leur carrière prendra fin.

La NFL n'est toutefois pas seulement une industrie monstre, qui s'internationalise à la vitesse grand V et qui génère des sommes astronomiques. Elle est devenue une religion. L'un des personnages de Concussion résume d'ailleurs très bien la situation. « Il y a 20 millions de personnes qui sont rivées devant leur téléviseur tous les dimanches. La NFL a sa propre journée, celle-là même qui était auparavant celle de l'Église. »

Seul le temps nous dira si Concussion, le documentaire League of Denial et tout ce que l'on sait maintenant à propos des commotions cérébrales et des coups à la tête feront baisser la popularité du football. Le nombre de jeunes garçons qui le pratiquent diminuera probablement, mais il serait très étonnant que le même phénomène se produise au niveau des cotes d'écoute.