Tous les yeux sont tournés vers le stade Percival-Molson, où les Carabins affrontent aujourd'hui les Marauders de McMaster en finale de la 50e Coupe Vanier. Près de 23 000 spectateurs s'entasseront au pied du mont Royal pour assister, dans le froid mais sous le soleil, à cette bataille pour la suprématie au football universitaire canadien. Pour les Carabins, il s'agit d'un rendez-vous avec l'histoire: plus de 50 ans après sa création - et après une longue disparition -, l'équipe participe à sa première finale nationale.

Plus de 50 ans après la création d'une équipe de football à l'Université de Montréal, après une longue disparition aussi, les Carabins disputent aujourd'hui la première finale nationale pour la Coupe Vanier de leur histoire.

L'évènement est source de fierté pour tous les anciens, de toutes les générations, et plusieurs sont sortis de l'ombre pour venir appuyer la formation actuelle. L'un de ces anciens, Robert Panet-Raymond, n'a toutefois jamais été très loin de l'équipe.

Cet ancien demi défensif et botteur des Carabins (de 1961 à 1963) se défendait bien sur le terrain, mais c'est dans le monde des affaires qu'il a été une étoile, occupant notamment de hautes fonctions à la Banque CIBC. À 71 ans, officiellement retraité, il semble plus engagé que jamais dans la réussite des Carabins.

«Bien des choses ont changé en 50 ans, rappelait M. Panet-Raymond, jeudi soir, en marge du banquet de la Coupe Vanier. C'est un peu comme si on était partis avec une petite cabane de bois pour découvrir aujourd'hui un grand gratte-ciel!

«À l'époque, la ligue de football universitaire canadien, c'était l'affaire de McGill, Toronto, Queens et Western. En 1961, nous n'avions joué que quelques matchs hors concours contre des équipes civiles, avant de joindre la saison suivante une ligue avec Loyola [l'ancêtre de Concordia], Bishop's, Ottawa, RMC [le Collège militaire royal de Kingston]... Sherbrooke s'était joint à nous l'année d'après.

«Nous nous entraînions sur des terrains en terre battue et les conditions étaient souvent particulières. À Sherbrooke, par exemple, on jouait sur un terrain de baseball et il fallait faire les bottés de précision à l'envers [du fond des buts], sinon le ballon serait sorti des limites du parc!

«Nous étions en mesure de rivaliser avec plusieurs équipes, mais Loyola était très fort. Je me souviens qu'un match contre eux s'était terminé en bagarre générale, au troisième quart, alors qu'ils menaient 28-0, je crois... C'était la troisième ou la quatrième bagarre et les arbitres nous avaient renvoyés au vestiaire pour de bon!»

L'édition actuelle des Carabins est encore réputée pour son caractère fier et rude, par cet «esprit» qui unit tous ceux qui ont fait partie de l'équipe. Toujours présent autour de l'équipe (il est président du conseil d'administration du CEPSUM), M. Panet-Raymond ne rate jamais un match et n'hésite pas à prodiguer ses conseils.

Le retraité est aussi devenu plus tôt cette année le plus grand donateur de l'histoire du sport dans les universités francophones d'Amérique, en offrant pas moins de 750 000 $ qui serviront de déclencheur à un important programme de rénovation des vestiaires du CEPSUM.

Poursuivre la tradition

Le maraudeur étoile Anthony Coady, qui occupe le même poste dans la défense des Carabins, 50 ans plus tard, a souvent répété cette saison combien l'histoire était importante dans les succès actuels de l'équipe.

«Nous sommes très conscients du rôle qu'ont eu ceux qui ont joué avant nous, depuis le retour de l'équipe [en 2002], mais aussi avant, à l'époque de M. Panet-Raymond, a souligné Coady. Tous ces gens ont mis beaucoup d'énergie à bâtir le programme de football, à définir ses valeurs, à lui donner son caractère. Gagner la Coupe Vanier, après la Coupe Dunsmore et la Coupe Uteck, ce serait une autre récompense pour tous les Carabins!»

De tels propos réjouissent évidemment M. Panet-Raymond, pour qui les valeurs des Carabins sont bien plus importantes que les victoires. «Il ne faut jamais oublier que ce sont avant tout des étudiants, qui sont là d'abord et avant tout pour réussir leurs études, rappelle-t-il.

«Je crois profondément aux vertus du sport universitaire, qui permet d'ajouter une dimension à la formation des jeunes. Personnellement, le sport m'a apporté énormément et plusieurs leçons apprises sur le terrain m'ont servi plus tard dans la vie. Et les étudiants disposent aujourd'hui d'un encadrement exceptionnel, avec la possibilité de s'entraîner dans des installations de qualité, avec les conseils d'entraîneurs, de préparateurs physiques, de psychologues sportifs...

«À mon époque, à Polytechnique, personne ne se préoccupait que je joue pour les Carabins; je devais aller à tous mes cours, remettre mes travaux en même temps que tout le monde. Nous n'avions pratiquement aucune aide.»

Cinquante ans plus tard, les programmes sportifs des Carabins sont parmi les plus importants au Canada, avec une organisation digne des universités américaines. Homme de chiffres (il est président du Comité de vérification de l'UdeM), M. Panet-Raymond s'interroge toujours sur la rentabilité de tels programmes et cherche, avec d'autres, à rendre le football universitaire encore plus intéressant.

Mais aujourd'hui, tout de bleu vêtu, c'est le Carabin qui sera dans les gradins du stade Percival-Molson pour aider Anthony Coady et ceux qui seront sur le terrain à poursuivre la grande tradition de l'équipe.

L'épreuve ultime

Les Carabins ne sont plus qu'à une victoire de leur premier championnat canadien. Leurs adversaires, les Marauders de McMaster - champions de l'Ontario - sont familiers des honneurs puisqu'ils disputent une troisième Coupe Vanier en quatre ans.

Les Carabins, qui ont remporté leurs dix derniers matchs, sont légèrement favoris et auront l'avantage d'évoluer devant une foule de près de 23 000 spectateurs acquis à leur cause. Hier, les deux équipes se sont entraînées légèrement, passant en revue leur plan de match pour s'assurer qu'on n'avait oublié aucun détail.

Cette semaine, les deux entraîneurs ont insisté sur la qualité des unités défensives et, avec le froid, ce serait étonnant que le pointage soit très élevé. Deux des meilleurs joueurs défensifs au pays, les secondeurs Byron Archambault (Carabins) et Nick Shorthill (Marauders), seront au coeur de l'action et disputeront sans doute leur dernier match universitaire, les deux étant parmi les meilleurs espoirs du prochain repêchage de la LCF.

Un dernier test en quelque sorte, même si tous les joueurs des deux équipes devront ensuite retourner en classe pour préparer la fin de leur session et leurs «vrais» examens!

Quelques joueurs à surveiller

CARABINS

4 Gabriel Cousineau, quart-arrière (Administration, HEC)

Le joueur de quatrième année est devenu cette saison le meneur offensif des Bleus, avec notamment 71,9 % de passes complétées et un calme inébranlable dans les situations tendues. Inspire la confiance à toute l'équipe.

41 Byron Archambault, secondeur (Sécurité et études policières)

Finaliste pour le titre de joueur défensif de l'année au Canada, le joueur de quatrième année a été l'âme des Carabins tout au long de la saison. Toujours capable de réussir LE gros jeu défensif qui fait basculer un match.

88 Mikaël Davidson, receveur (Sciences économiques)

Avec neuf touchés en saison régulière, le joueur de quatrième année est devenu le receveur le plus productif de l'histoire des Carabins. Ses deux touchés en finale de la Coupe Uteck ont montré qu'il était pleinement remis des blessures qui l'avaient un peu ralenti en fin de saison.

MARAUDERS

1 Nick Shorthill, secondeur (Sciences de l'environnement)

Un secondeur dans le même style qu'Archambault, imposant et mobile, qui ne présente pas des statistiques aussi impressionnantes que son vis-à-vis, mais trouve toujours le moyen de rejoindre le porteur de ballon.

2 Marshall Ferguson, quart-arrière (Sciences sociales)

Après plusieurs saisons dans l'ombre de Kyle Quinlan (un lauréat du Hec Crighton), Ferguson a acquis beaucoup d'assurance cette saison et s'est permis à son tour d'établir quelques records d'équipe au terme de sa cinquième saison.

34 Wayne Moore, porteur de ballon (Histoire de l'art)

Habitué de partager le travail avec l'excellent Chris Pezzetta, Moore devra prendre les bouchées doubles demain, son coéquipier étant blessé. Avec le vent et le froid, il tient une bonne partie des chances des Marauders entre ses mains.