Mitch Berger a un bon sens de l'humour. Pas le choix. Quand, comme lui, on a passé les 15 dernières années dans ses valises, il faut bien en rire un peu. «Des fois, je me lève le matin et je me demande pour quelle équipe je joue...»

Il éclate de rire. Et pourquoi pas? Après 15 ans de carrière au football américain, ce botteur de dégagement, né en Colombie-Britannique il y a 36 ans, se prépare à vivre son premier Super Bowl. En ce petit matin, il est là, au déjeuner d'équipe, comme tous les autres Steelers. Il regarde autour de lui et il voit Ben Roethlisberger, Hines Ward, Troy Polamalu... «Je ne sais plus si j'en ai encore pour bien longtemps dans cette ligue, alors je suis juste content d'être ici», dit-il entre deux bouchées.

Ce Mitch Berger est un cas. Certains joueurs ont neuf vies. Lui? Il doit bien en être à sa 15e vie. Juste cette saison, par exemple... Les Steelers l'ont embauché à la fin du camp d'entraînement, après une blessure à leur botteur. Berger est arrivé, mais s'est blessé en cours de saison et a été congédié le 6 novembre. Mais son remplaçant, un certain Paul Ernster, s'est avéré complètement nul. Alors les Steelers, pris de panique, ont dû embaucher le vétéran à nouveau le 24 novembre.

Et le voici au Super Bowl.

«La vérité, c'est que les Steelers ont un bon jeune botteur qui attend son tour, mais il s'est blessé lors du camp d'entraînement, alors c'est pour ça que je suis ici. Comme je disais, je ne sais plus si j'en ai pour bien longtemps, je ne sais même pas si je vais jouer au football la saison prochaine. Mais cette semaine, je profite de chaque moment.»

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Mitch Berger en est donc à sa 10e équipe. Il a commencé en 1994 chez les Eagles de Philadelphie, qui l'avaient repêché avec le 193e choix. Ensuite, les Eagles l'ont congédié, et c'est là que notre botteur canadien s'est mis à voir du pays: Cincinnati, Chicago, Indianapolis, Green Bay, le Minnesota, St. Louis, La Nouvelle-Orléans, l'Arizona... et puis Pittsburgh cette saison.

«J'ai un petit bureau à la maison et c'est là que je place mes objets de collection, si on veut. Je pense que j'ai gardé un petit souvenir de chaque équipe. Ça peut être un chandail, un casque. Mon favori, c'est un chandail du match des étoiles, le Pro Bowl. Mais je vais conserver pas mal de choses des Steelers; mon père est né et a grandi à Pittsburgh. Moi, j'étais un fan des Steelers quand j'étais jeune.

«Oui, j'ai déménagé souvent, mais c'est comme ça dans cette ligue. Je ne sais pas si ça se passe de cette façon pour les gars qui jouent à d'autres positions, mais on dépend souvent des entraîneurs. Un entraîneur t'engage, il se fait virer, le nouveau gars arrive et il engage de nouveaux joueurs. Tu es aussi bon que ton dernier match. Quand j'étais avec les Vikings, je croyais que j'allais passer ma vie là-bas. J'ai joué pendant six saisons avec eux, mais je me suis cassé le cou en essayant de réussir un plaqué. Au moment de revenir au jeu, les entraîneurs de l'équipe n'étaient plus les mêmes, alors j'ai dû aller voir ailleurs.»

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Si c'est la fin, si ce 43e Super Bowl est son dernier match, Mitch Berger n'aura aucun problème avec ça. Il a déjà commencé à se préparer pour la «vraie» vie, en investissant dans une chaîne de restaurants dans sa Colombie-Britannique natale. Il sait très bien qu'un botteur de 36 ans souvent blessé aux cuisses, ce n'est pas très populaire. Alors, il est prêt à passer à autre chose.

«C'est sûr que je regarde un gars comme Jeff Feagles, qui a 42 ans et qui botte encore pour les Giants, et puis je me dis que moi aussi, je pourrais jouer jusqu'à cet âge-là... Mais en même temps, je suis réaliste.»

Au fond, ce que veut Mitch Berger, c'est la conclusion parfaite. C'est une bague du Super Bowl.

«De tous les objets que j'ai ramassés au fil des ans, une bague du Super Bowl, j'imagine que ce serait plus spécial que n'importe quoi...»