«Désolé monsieur, mais nous devons exiger une taxe spéciale aux partisans des White Sox...»

C'est le genre de commentaire que vous entendrez de la part d'une jeune et gentille employée en franchissant la porte d'une boutique de souvenirs dans le vieux Wrigley Field de Chicago... vêtu d'un gaminet des Sox.

Dans le respect, certes, le sourire en coin. Mais ces paroles, d'apparence insignifiante, en disent vraiment long sur l'animosité qui règne là-bas. Et l'inverse reste vrai. Parions que le logo des Cubs ne représente assurément pas la figure graphique la plus populaire dans l'enceinte du U.S. Cellular Field.

Oh que non!

À Chicago, on pourrait résumer la situation ainsi: deux ligues, deux équipes et une féroce rivalité. Dans la «Ville des vents», on n'encourage pas les Cubs ET les White Sox. On s'identifie (très fièrement, oui) aux joueurs des Cubs OU des White Sox. Nuance importante.

C'est le nord ou le sud. L'ourson bleu ou le bas blanc. Ernie Banks ou Luis Aparicio. La preuve? Il suffit d'afficher les couleurs de la «mauvaise» équipe dans «l'autre» quartier pour s'en rendre compte, et rapidement (le rédacteur de ces lignes s'est prêté au jeu, bien involontairement, il faut le mentionner). (1)

Non pas que les gens montrent une agressivité démesurée, au contraire, seulement une bonne dose de sarcasme. Le «fautif» constatera vite qu'il se retrouve en terrain passablement hostile.

Croisé sur la rue Addison, devant le Wrigley Field, un partisan des White Sox: «Beau chandail, mon ami. Aujourd'hui, j'ai décidé de ne pas porter le mien, car les supporteurs des Cubs sont parfois un peu fous. Le but, c'est de gagner des matchs, non?»

Effectivement.

Début juillet, les Sox ont remporté deux rencontres sur trois contre leurs cousins du nord, sur le terrain du Wrigley Field par surcroît, de quoi refroidir les partisans des Cubs. Surtout que deux semaines auparavant, les Sox avaient joué exactement le même tour aux Cubs en enlevant deux des trois duels disputés au U.S. Cellular Field. Quatre en six, ça fait mal...

Du sérieux

«Ils peuvent rire tant qu'ils le veulent, nous avons gagné la série», a lancé avec fierté un partisan des Sox, dans les transports en commun, au sujet des railleries poussées par les employés des Cubs, au Wrigley Field, pendant une visite guidée du mythique stade.

Depuis l'instauration des matchs interligues dans le baseball majeur en 1997, les Sox ont l'avantage 45-39 contre les Cubs. Les deux organisations se sont affrontées une seule fois en Série mondiale (1906), une victoire des Sox en six rencontres.

Et comme dans toute rivalité digne de ce nom, les esprits s'échauffent parfois quand les Cubs et les White Sox croisent le fer lors des matchs les plus attendus de l'année à Chicago. Dans les gradins et sur le losange. Il suffit de penser à la mémorable altercation entre les receveurs Michael Barrett et A.J. Pierzynski le 20 mai 2006.

«Les gens de Chicago prennent vraiment ces rendez-vous au sérieux. On sent leur énergie et leur passion. Il faut absolument un maximum de concentration dans de telles circonstances», a dit le lanceur Rodrigo Lopez, des Cubs, après avoir dominé les frappeurs des Sox le 3 juillet pour éviter aux siens l'odieux d'un balayage.

Non, les Cubs ne gagneront pas la Série mondiale cette année. Les White Sox? Rien n'annonce une telle réussite. Chose certaine, ne demandez pas aux habitants du nord de Chicago de lever le petit doigt pour les White Sox. Et vice versa. C'est le nord ou le sud...

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(1) Sans être un partisan des Sox, je me suis procuré un t-shirt de l'équipe en guise de souvenir de vacances, que j'ai porté au U.S. Cellular Field le soir pour le match contre Kansas City, évidemment, mais aussi au Wrigley Field quelques heures auparavant, lors d'une visite guidée de l'amphithéâtre. Erreur...