Onde de choc dans la natation québécoise: huit ans après son instauration, le centre national d'entraînement de Montréal fermera ses portes le 1er avril. Natation Canada suspend son financement et veut revoir son modèle. L'entraîneur-chef Benoit Lebrun défend son bilan et y voit une décision politique.

Six mois après son entrée en fonction, le directeur de la haute performance de Natation Canada (SNC), John Atkinson, a annoncé hier le maintien des centres nationaux d'entraînement de Toronto, Vancouver et Victoria. Le centre de Calgary, qui a longtemps été un château fort, passera à la trappe le 1er avril, tandis que celui de Montréal fera l'objet d'une réévaluation.

«Avant un réinvestissement potentiel, il subira un examen plus détaillé de ses opérations, incluant une restructuration de la stratégie globale pour la région», a fait valoir la Fédération canadienne dans un communiqué.

Atkinson a annoncé la mauvaise nouvelle aux entraîneurs et nageurs du centre lors de rencontres au Parc olympique hier matin. En entrevue avec La Presse, le Britannique a invoqué une «situation unique» au Québec pour expliquer cette «décision difficile» prise au terme d'un long processus d'évaluation. La «concentration d'infrastructures» et le nombre de «programmes de grands clubs» justifient ce changement de stratégie. «Le financement n'est pas retiré, il est suspendu», a-t-il insisté, ajoutant que les nageurs montréalais brevetés et de l'équipe nationale seront toujours appuyés, mais selon un nouveau modèle.

Benoit Lebrun, qui n'a pas été surpris d'apprendre le non-renouvellement de son contrat après le 31 mars, croit que le directeur de la haute performance joue sur les mots. «Ils disent qu'ils vont rouvrir pour ne pas avoir l'odieux de dire qu'ils ferment le centre au Québec, a-t-il jugé. Je pense qu'ils [gagnent] du temps, qu'ils vont laisser retomber la poussière, et qu'après, ils vont décentraliser. On n'aura plus jamais ce qu'on avait. Ils vont saupoudrer de l'argent au Québec.»

La fermeture de la piscine olympique à la fin du mois pour des travaux de rénovation majeurs a aussi joué contre Montréal, prétend l'entraîneur. «Ç'a été considéré, mais je ne dirais pas que ç'a été un facteur», a au contraire assuré Atkinson.

Ce dernier a indiqué que les centres nationaux ont été évalués à l'aune de leurs performances passées, présentes et futures. À ce compte, Lebrun ne comprend pas pourquoi le centre de Toronto est maintenu: «J'ai sept athlètes avec moi, et le gars de Toronto a de la misère a en avoir quatre. Il n'y a pas de questionnements à avoir: un et un ne font pas deux ici», a fait valoir l'entraîneur, pour qui le Québec fait les frais de sa faible présence dans les centres de décision.

Depuis ses débuts, le centre a permis d'augmenter le nombre de nageurs dans les équipes canadiennes aux Jeux olympiques et aux Mondiaux, mais aucun n'a atteint une finale individuelle. Katerine Savard, qui s'entraîne au club CSQ à Québec, est la seule à y être parvenue, terminant cinquième du 100 m papillon aux derniers Championnats du monde de Barcelone.

«On doit revoir ce dont les meilleurs nageurs basés à Montréal ont besoin pour franchir ce pas de plus et monter sur un podium aux Jeux olympiques», a fait valoir John Atkinson.