Autour du bassin, certains chuchotaient qu'Audrey Lacroix était finie, que l'avion pour Londres partirait sans elle, surtout après sa sortie sans éclat au 100 mètres papillon. D'autres disaient attention, elle a souvent rebondi quand elle était comptée pour battue.

La seconde théorie a prévalu alors que Lacroix a remporté le 200 m papillon aux sélections canadiennes pour les Jeux olympiques de Londres, vendredi soir, à Montréal.

Fidèle à son habitude, la nageuse de 28 ans est revenue de l'arrière pour coiffer Katerine Savard, sa concitoyenne de Pont-Rouge. Ce n'était pas d'ailleurs pas un hasard si l'épreuve était commanditée par la Ville de Pont-Rouge.

Lacroix a complété les quatre longueurs en 2 :09.01, son meilleur temps de l'année, mais encore très loin de son record national. Elle a aussi raté le standard A par six centièmes. Dans les circonstances, ça avait plus ou moins d'importance. Les deux dernières années, marquées par un changement d'entraîneur et des problèmes de gestion de son anxiété, ont été difficiles.

« Oui, je suis vraiment contente, a dit Lacroix, qui participera à ses deuxièmes JO. Le but, ce soir, c'était de me qualifier. C'est sûr que j'aurais aimé faire le standard A, juste psychologiquement, mais dans le fond, ce n'est pas important. Je l'ai fait l'été dernier. L'important, c'est d'avoir mon billet, et je l'ai fait. »

Comme prévu, Savard, sans pression après sa victoire au 100 m mardi, est partie comme une balle, avant de graduellement céder du terrain. Troisième à mi-course, Lacroix a été soulagée de constater que son retard était moins important qu'anticipé. « Être en arrière, c'est très difficile à gérer, a souligné Lacroix. En même temps, je savais que j'avais ce qu'il fallait pour revenir. Finalement, j'étais très près après 100 mètres. Ça a donc été un peu plus facile que ce à quoi je m'attendais. »

La gagnante ne gardait cependant aucun souvenir de la dernière longueur - la plus vite de toutes les finalistes par plus d'une seconde. Après avoir touché au mur, Lacroix a mis du temps avant de réagir, cherchant désespérément le « 1 » à côté de son nom sur le tableau indicateur.

« Ce n'est pas une bonne publicité pour mon chirurgien oculaire, mais j'étais un peu confuse ! a pouffé Lacroix, cinquième aux Mondiaux de 2007. Quand j'ai vu le petit « 1 », ça m'a soulagée. »

Deuxième en 2 :09,78, Savard a manqué d'énergie dans les derniers mètres. « Je pense que s'il y avait cinq mètres de plus, je n'aurais pas fini ! », a lancé la nageuse de 18 ans.

Même si elle n'a pas réaliser le standard A, il n'est pas impossible qu'elle puisse aussi nager le 200 m papillon à Londres. Savard est déjà passée sous cette marque à la Coupe Canada l'été dernier à Montréal.« On est train d'essayer d'homologuer ce temps », a expliqué l'entraîneur national Pierre Lafontaine.

Hayden reste sur sa faim

Cette quatrième soirée des sélections olympiques marquait l'entrée en scène de Brent Hayden, l'un des plus grands espoirs canadiens à Londres. L'enjeu n'était pas de savoir s'il allait se qualifier pour ses troisièmes JO, mais plutôt de voir quel temps il réaliserait au 100 m libre, épreuve dont il est vice-champion du monde.

En dépit d'une excellente première longueur, il a dû se contenter d'un chrono de 48,53 secondes. La façon dont il a secoué son crâne rasé après avoir regardé le tableau ne laissait aucun doute sur son insatisfaction. En matinée, il avait nagé à peine plus lentement (48,68) même s'il s'était laissé glisser sur les deux dernières tractions.

« Je pensais que j'avais quelque chose de mieux en moi, a expliqué le géant de 6'5. Avec mon niveau de forme, je croyais que c'était assez pour réussir 47,9 et égaler ce que j'ai fait l'été dernier. Ça a été une question d'exécution. C'était ma première compétition en grand bassin cette saison. »

Hayden croit pouvoir remédier à la situation en participations à trois épreuves de la tournée Mare Nostrum, en France et en Espagne, en juin. « En gros, je veux égaler ce que j'ai fait ici lors de trois courses consécutives. »

Son temps le place au huitième rang mondial cette année. Plus tôt ce mois-ci, les Australiens James Magnussen (47,10), champion du monde, et James Roberts (47,63) ont servi un sérieux avertissement aux autres crawleurs de la planète. « Ils ont été phénoménaux, qu'est-ce que je peux dire d'autre ? a commenté Hayden. Personnellement, 48,5, c'est le plus vite que je ne suis jamais allé à ce stade-ci de la saison. »

Richard Hortness, Colin Russell et Thomas Gossland, respectivement deuxième, troisième et quatrième, accompagneront Hayden à Londres pour le relais 4 X 100 m libre. Au 200 m QNI féminin, la gagnante Julia Wilkinson et sa dauphine Erica Morningstar ont aussi assuré leur sélection.