Alexandre Despatie ne le dit pas trop fort, mais il est affûté comme jamais. Ça sautait aux yeux alors qu'il se balançait sur un tremplin du Centre aquatique de Londres, dimanche matin. Abdominaux découpés, taille affinée. À l'évidence, pendant ces huit mois hors de l'eau, l'athlète de 26 ans s'est entraîné avec grand sérieux.

Londres se prépare pour les Jeux, comme l'indique le t-shirt des employés qui fourmillent dans le vaste Parc olympique, dans un coin perdu de Stratford, à l'est de la City. Ça cogne du marteau, les cônes sont partout et les fils dépassent, mais pour l'essentiel, toutes les installations sont prêtes. Même le rutilant centre d'achats Westfield, le plus grand de Grande-Bretagne avec sa surface commerciale équivalent à 30 terrains de soccer, accueille déjà des hordes de consommateurs enthousiastes.

Avec la sécurité omniprésente, les longs détours en autobus et les bénévoles déployés aux quatre vents, l'atmosphère olympique est palpable. Despatie pourrait facilement s'imaginer plonger à ses quatrièmes (et probablement derniers) Jeux. Mais il doit d'abord s'y qualifier.

La «compétition-test»

Son absence aux derniers Mondiaux de Shanghai, pour blessure à un genou, l'en avait empêché l'été dernier. Le ticket olympique devra donc nécessairement passer par la Coupe du monde, «compétition-test» de la dernière chance, qui s'ouvre aujourd'hui à Londres avec le 3 m synchronisé, où le Québécois s'alignera avec Reuben Ross.

Le 3 m individuel commencera le lendemain. Une participation à la demi-finale (18 premiers) réglerait la question des Jeux pour Despatie. Ce qu'il est loin de considérer comme une formalité. «Les choses n'arrivent pas toutes seules. Je ne tiens rien pour acquis», a assuré le double vice-champion olympique, rencontré à son hôtel des Docklands, samedi après-midi.

Il a beau tenir la forme de sa vie et être complètement guéri d'une tendinite, il plonge à plein régime depuis moins d'un mois.

Sa longue période d'inactivité a aussi laissé des traces. À son retour au Grand Prix de Rostock, en Allemagne, il y a un peu plus d'une semaine, il a fini septième au 3 m synchronisé. Et son partenaire Ross n'était pas en cause. «C'est clair que je prends 100% du blâme», a précisé Despatie.

Rostock a été une véritable catastrophe. «Vraiment, je ne suis jamais senti comme ça de toute ma carrière, même de toute ma vie», a-t-il dit.

Privé de repères

Il s'explique encore mal ce qui a pu se passer. Privé de repères, il s'est senti démuni. «J'arrivais sur le bout de la planche et c'est comme si je ne savais pas quoi faire», a-t-il précisé avant d'ajouter: «Ça a été comme un effondrement physique, mental, tout. Je n'ai pas été capable de produire rien de bon. Dans le fond, c'était comme si je n'étais pas là.»

Après cet électrochoc, Despatie a vécu un bref épisode de découragement. Sauf que le temps pressait. Il ne disposait que de quatre journées d'entraînement à Berlin avant le début de la Coupe du monde. Il s'est d'abord fait rassurer par son préparateur mental, le Montréalais Wayne Halliwell, à qui il fait confiance depuis quelques mois. «C'est un aspect de mon entraînement que je n'avais encore jamais travaillé.»

«Je suis prêt à tout»

Il a aussi demandé à son entraîneur Arturo Miranda d'arrêter de lui faire croire que les choses se placeraient comme par magie. «Je lui ai dit: dis-moi quoi faire, je suis prêt à tout.» Même à regarder les vidéos de ses plongeons, ce dont Despatie n'a jamais été friand. «Je suis super perfectionniste, super critique, souvent ça tournait au négatif... J'étais un peu rendu au point où je n'avais plus le choix.»

L'entraîneur a donc sorti le iPad à la piscine de Berlin, qui disposait également de son propre système vidéo intégré. Dur sur l'orgueil, mais le travail a été fructueux. Au point où Despatie affirme maintenant qu'il y a «un monde de différence» par rapport à la façon dont il se sentait à Rostock.

La confiance règne, mais Despatie tempère: il n'est pas à Londres pour viser un podium. «La mission est de qualifier le pays.» Il invite ceux qui veulent l'encourager à le rejoindre sur la planète Twitter (@ADespatie), qu'il vient d'investir avec enthousiasme.