D'accord, ça devient redondant, mais permettez un petit retour sur les maillots en polyuréthane, prisme incontournable pour analyser les performances dans la piscine à ces Mondiaux de Rome.

D'abord, Geneviève Saumur mérite une médaille pour sa franchise au sujet de ces combinaisons de la controverse. Hier, avec un maillot Jaked, elle a abaissé son record personnel de près de deux secondes au 200 mètres. «C'est assez phénoménal», a-t-elle admis.

Ça faisait changement des bobards qu'on nous racontait aux sélections de Montréal selon lesquels le polyuréthane ne changeait pas grand-chose. On comprend que personne n'aime voir de grandes performances être réduites à une simple avancée technologique. Là n'est pas la question. On ne passe pas sous les 1:57 au 200 m libre sans travailler fort, c'est assez clair.

Mais ce n'est pas pour rien que la presque totalité de l'équipe canadienne s'est drapée dans le polyuréthane dès son arrivée en Italie. L'honni logo Jaked a simplement été gommé pour préserver les relations avec Speedo, équipementier officiel de Natation Canada.

À l'instar de Michael Phelps, Brent Hayden est l'un des rares qui a résisté au chant des sirènes du néoprène.

Curieusement, personne n'a relevé que le Canadien était le seul nageur en finale du 100 m libre dans une combinaison LZR Racer de Speedo, maillot miracle de l'an dernier mais nettement moins performant que les Jaked, Adidas Hydrofoil ou autres Arena X-Glide de 2009. Il a très bien nagé, mais il a échappé le podium par deux petits centièmes.

Certes, son contrat personnel avec Speedo a dû peser lourd, mais Hayden regrette-t-il aujourd'hui sa décision, ne serait-ce qu'un peu? On n'a pas pu lui poser la question, mais peut-être se félicitera-t-il de ce conservatisme quand les gros bras de la distance reine se retrouveront dans un simple maillot court à partir de l'an prochain.

En tout cas, Audrey Lacroix y songe déjà. La petite papillonneuse a nagé en Jaked en finale du 200 m papillon, hier, mais n'y a pas vu grand gain sur cette distance. L'essai avait été plus concluant au 100 m. «C'est peut-être la façon dont je nage, mais le feeling n'était pas tellement différent qu'avec un maillot de la génération précédente», a-t-elle analysé.

De l'avis général, les combinaisons en polyuréthane favorisent davantage les athlètes costauds et moins affûtés. En flottant plus, ils peuvent mieux exploiter la puissance de leurs bras. Quiconque a déjà croisé Lacroix comprend qu'elle n'entre pas dans ce moule.

Son entraîneur Claude St-Jean rappelait hier qu'à l'automne 2007, sa protégée avait flirté avec le record mondial en petit bassin dans un maillot en tissu et sans fermeture-éclair, soit exactement ce qui sera permis l'an prochain. «Il y a des filles que le polyuréthane avantage énormément. Elles vont en arracher», a-t-il prédit.

Lacroix pense la même chose: «L'an prochain, il y a beaucoup de ces filles-là que je pourrai battre.»

Le mot phénoménal pourra alors reprendre tout son sens.