Les leaders ont toujours pour noms Charles Hamelin et Marianne St-Gelais, mais un changement de garde est bel et bien amorcé dans l'équipe canadienne de patinage de vitesse courte piste.

Kim Boutin, à peine 20 ans, est tombée dans les bras de ses proches dans les gradins de l'aréna Maurice-Richard, hier après-midi, à la conclusion des championnats nationaux. Elle venait de remporter de haute lutte le 3000 mètres, l'épreuve ultime, ce qui lui a valu de grimper au deuxième rang du classement cumulatif. Ce résultat lui a garanti une participation aux distances individuelles des prochains Championnats du monde de Moscou, qui auront lieu du 13 au 15 mars.

Les larmes qui ont coulé témoignaient de la tension ressentie par Boutin avant cette course déterminante. Elle a réagi au démarrage hâtif de Valérie Maltais pour gagner le sprint intermédiaire et ensuite s'imposer nettement à l'arrivée.

«Pour vrai, je ne m'attendais pas à ça», a candidement admis la patineuse de Sherbrooke, neuvième des Mondiaux juniors l'an dernier. «Je suis vraiment contente.»

Bradette revient de loin

Troisième au classement général, Kasandra Bradette sera elle aussi retenue pour Moscou. Elle devra cependant attendre une décision du comité haute performance pour savoir si elle sera l'une des trois représentantes canadiennes dans les épreuves individuelles. Tout ça parce qu'elle a figé durant le 3000 mètres (huitième), ce qui l'a empêchée de défendre la deuxième position qu'elle détenait alors.

«J'ai vu tout le monde partir et je n'ai vraiment pas su quoi faire, a confessé Bradette. Ç'a été une mauvaise décision. Ce sont des choses qui arrivent.»

La joie de prendre part à ses premiers Mondiaux l'emportait haut la main sur cette légère déception. À 24 ans, l'athlète originaire de Saint-Félicien revient de très loin. Ennuyée par des maux de dos depuis 2007, elle a raté une saison entière et a songé à la retraite le printemps dernier.

Même après sa troisième place-surprise aux sélections automnales, la nervosité la paralysait avant le début des championnats canadiens.

«Je me disais: ça a peut-être juste adonné comme ça en début de saison», a confié Bradette, finaliste dans les quatre épreuves. Finalement, j'ai démontré une bonne constance. C'est ce qui m'a permis de terminer en troisième position.»

Maltais sauve les meubles

Dans l'embarras en début de journée, Valérie Maltais a sauvé les meubles en terminant deuxième au 1000 m et troisième au 3000 m. Médaillée de bronze aux Mondiaux de Montréal, la double championne olympique de 24 ans, quatrième des sélections, espère que ses performances des 12 derniers mois lui permettront de faire plus que les relais en Russie.

Après une dernière saison en dents de scie, Marianne St-Gelais a confirmé son retour en force en survolant les trois premières épreuves pour décrocher son premier titre national depuis 2011. L'émergence d'une nouvelle génération la motive au plus haut point. 

«J'adore les jeunes», a dit la double médaillée d'argent aux JO de Vancouver. «Je suis passée par là aussi. C'est ça qui fait que notre sport reste en santé et au top à l'international.»

Un dauphin pour Hamelin

Après deux semaines de «privations», St-Gelais prévoyait partager quelques verres et un bon repas avec son amoureux, Charles Hamelin, qui n'a encore laissé que des miettes à la concurrence avec trois victoires lui aussi.

Ses jeunes adversaires lui ont cependant donné du fil à retordre. À commencer par Samuel Girard, 18 ans, qui l'a défié en finale du 500 mètres samedi. Deuxième au classement cumulatif, l'athlète de Fernand-et-Boileau a confiance en ses moyens. «À un moment donné, il va me battre, c'est sûr!», a constaté Hamelin à son sujet.

«Avec le temps, je vais finir par l'avoir», a confirmé Girard du tac au tac, visiblement heureux de côtoyer un triple champion olympique qui lui témoigne autant de respect. Le nouveau venu s'alignera aux Mondiaux juniors d'Osaka, fin février, avant de se rendre dans la capitale russe.

Troisième à l'issue d'une lutte très serrée, l'Ontarien Patrick Duffy, 23 ans, est un autre membre de la génération montante qui a obtenu sa sélection pour ses premiers championnats du monde. 

Quatrième, le vétéran Guillaume Bastille, 29 ans, y sera aussi grâce à une bagarre de tous les instants jusqu'en finale du 3000 mètres. Ironiquement, il a devancé par la plus infime des marges François Hamelin, à qui on l'avait préféré pour le dernier poste à Sotchi, une affaire qui s'était terminée devant un arbitre.

L'aîné des frères Hamelin est toutefois un candidat sérieux à la cinquième place discrétionnaire pour les Mondiaux, annoncée plus tard cette semaine.

Cournoyer à court

Charle Cournoyer espérait rebondir au 1000 mètres après deux journées difficiles, mais un contact avec Samuel Girard en quarts de finale lui a valu une disqualification qu'il n'expliquait pas.

«[Samuel] est du même avis que moi, les coachs aussi», a souligné le médaillé de bronze olympique, qui a conclu les championnats au neuvième rang. Opéré aux deux épaules et victime d'une fracture à un pied l'an dernier, il n'avait pas retrouvé tous ses moyens.

«Dès le commencement de la compétition, j'ai vite compris que j'étais à 95 % de mes forces, mais les autres étaient à 115 %», a-t-il indiqué.

L'athlète de 23 ans ne s'attend pas à être repêché par le comité haute performance. «Il y a plein de choses que j'aurais pu mieux faire. Je ne suis pas trop déçu, mais c'est toujours dur.»