Peut-être reviendra-t-elle à la compétition, mais l'ère post-Joannie Rochette a bien commencé aux Internationaux Patinage Canada, vendredi, à Kingston. Cynthia Phaneuf, l'éternelle dauphine, a été impériale, prenant la tête à l'issue du programme court. Amélie Lacoste, cinquième, et Myriane Samson, septième, se sont aussi illustrées avec des prestations dénuées de faute majeure.

Les dirigeants de Patinage Canada ne cachaient pas leur satisfaction. Après des Jeux olympiques de Vancouver couronnés de succès avec deux médailles, leur objectif pour le prochain cycle olympique est de former plus d'un prétendant dans chacune des catégories.

«Pour être honnête, je suis très, très content, a mentionné William Thompson, chef de la direction de Patinage Canada. Ce n'est pas arrivé souvent que nos trois femmes réussissent chacune un programme presque parfait.»

Phaneuf, favorite de la compétition, a assumé son nouveau statut avec brio. Ce n'était pas si évident. Oui, elle a fini cinquième aux derniers championnats du monde de Turin. Sauf qu'elle était loin de la maison et des projecteurs olympiques. À Kingston, elle offrait aussi un tout nouveau programme aux juges et aux spectateurs. «Ce n'est pas une mince affaire», a-t-elle souligné en sortant de la glace.

Soulagement et bonheur, donc, pour la patineuse de Contrecoeur. Non seulement a-t-elle réussi tous ses éléments, elle a aussi fait réagir le public du K Rock Center grâce à ce numéro dynamique livré sur de la guitare espagnole. «Ça fait du bien, le monde a embarqué au boutte. C'est de la confiance», a dit Phaneuf.

Annie Barabé, son entraîneuse, affichait l'air satisfait du professeur dont le meilleur élève vient de passer un examen haut la main. «Il était temps, a-t-elle réagi. Joannie n'est pas là, c'est sa place, c'est là qu'il faut le faire.»

Barabé a reconnu la jeune femme qui s'est épanouie en multipliant les spectacles professionnels en fin de saison dernière. Les exigences techniques et la pression y sont moins grandes, mais il faut donner un bon spectacle soir après soir, dans des conditions pas toujours optimales. De quoi donner confiance à une athlète qui en a tellement manqué au cours des dernières années. «Elle a été exposée beaucoup plus souvent au stress, a dit la coach. Là, elle compose vraiment bien avec la pression. Elle a plus de bagage.»

Lors de ces tournées de Stars on Ice au Canada et au Japon, Phaneuf a appris que moins était parfois mieux dans son cas. «On pense moins. On arrive à l'aréna, on pratique, on mange vite et on saute sur la glace, a relaté la patineuse de 22 ans. J'essaie de recréer ça. Avant, en compétition, j'étais beaucoup plus du genre: OK, on prend son temps, on va se coucher de bonne heure, on va lire, penser à ses affaires. Je suis moins comme ça. J'ai davantage une vie normale. On fait la compétition et on en fait moins un plat.»

Vitesse supérieure

En ce début de cycle post-olympique, le plateau féminin n'est pas des plus relevés à Kingston. Avec 58,24 points - attention aux comparaisons avec l'an dernier, un élément ayant été retiré - Phaneuf a néanmoins devancé deux jeunes prétendantes au fort potentiel, la Russe Ksenia Makarova (57,90), 17 ans, et l'Américaine Agnes Zawadzki (56,29), 16 ans. Elles ont chacune enfilé des combinaisons triple-triple.

Encore vertes sur le circuit international, Lacoste, 21 ans, et Samson, 22 ans, semblent passer à la vitesse supérieure.

Lacoste (55,30) a atteint un objectif important en exécutant une combinaison de triples sauts pour la première fois en compétition. Elle a «triché» en ne complétant pas la troisième rotation de son deuxième saut, mais la combinaison a été reconnue comme telle par les juges. «Je l'ai essayé et c'est un plus pour moi. La prochaine fois, il sera propre», s'est jurée la patineuse de Delson, qui veut se reprendre au programme libre ce soir.

S'exécutant sur la trame sonore du film Il Postino, Samson (51,62) se félicitait d'avoir brisé la glace avec un style plus «mature», plus «féminin». Pour y arriver, elle a reçu les conseils de l'ex-patineuse Marie-France Dubreuil l'été dernier. «Je suis un peu tomboy, a noté la patineuse de Saint-Jean-sur-Richelieu. Je fonce, je saute, je fais ce que j'ai à faire, mais je ne prends pas le temps d'être belle. On a essayé de le faire ressortir cette année.»

Plus tard en après-midi, Lacoste et Samson ont signé des autographes à la table promotionnelle de Patinage Canada, où de jeunes filles et leurs mamans ont afflué. La nouvelle génération est tranquillement en train de s'installer.