La Russie pourrait être exclue des prochains Jeux olympiques de PyeongChang, une perspective qui pour le président Vladimir Poutine constituerait une humiliation pour son pays.

La décision sera prise mardi, lorsque la commission exécutive du Comité international olympique (CIO) se réunira à Lausanne, moins de neuf semaines avant l'ouverture des Jeux de 2018, le 9 février, en Corée du Sud.

La commission composée de 14 membres, qui comprend deux Américains, a reçu un rapport confidentiel de la part d'un comité nommé par le CIO. Ce comité a été invité à évaluer si les agences d'État russes ont effectivement joué un rôle dans le vaste programme de dopage mis en place en vue des Jeux olympiques de Sotchi en 2014.

Le président du CIO, Thomas Bach, un avocat allemand longtemps considéré comme un allié de la Russie, doit annoncer la décision à 19 h 30 locales (13 h 30, HNE). Ce pourrait ne pas être le point final. La Russie peut contester toute sanction du CIO en faisant appel au Tribunal arbitral du sport.

Voici un aperçu de l'affaire et des scénarios possibles :

Options sanctions

- Une interdiction totale de la Russie des compétitions à PyeongChang.

- Certains athlètes russes sont autorisés à compétitionner, s'ils sont jugés « propres » dans le cadre de contrôles antidopage à long terme pratiqués selon les normes internationales. Ils seraient considérés comme des athlètes neutres en compétition sous le drapeau olympique, et se verraient refuser l'hymne russe s'ils gagnent l'or olympique. Ces règles ont été imposées aux athlètes russes lors des Championnats du monde d'athlétisme en août.

M. Poutine a affirmé que l'un ou l'autre de ces scénarios serait humiliant et pourrait entraîner un boycottage russe.

- Le CIO pourrait demander aux sept fédérations des sports olympiques d'hiver de décider de l'admissibilité individuelle des athlètes. Ce compromis a été retenu pour les Jeux olympiques de 2016 à Rio de Janeiro, au Brésil.

- Imposer une amende au Comité olympique russe. Des dizaines de millions de dollars pourraient servir à la lutte contre le dopage dans le monde entier.

Selon Joseph de Pencier, directeur général de l'iNADO, un groupe mondial d'agences nationales antidopage, une sanction financière serait « grossièrement inappropriée ».

« Cela enverrait le mauvais message, a déclaré de Pencier. C'est payant de tricher. »

Chronologie

Un signal d'alarme au sujet du dopage russe s'est fait entendre en juillet 2013, des semaines avant que Moscou accueille les Championnats du monde d'athlétisme. Le journal britannique The Mail on Sunday a rapporté des actions répréhensibles commises par Grigory Rodchenkov et le laboratoire de Moscou qu'il dirigeait, mais ces informations ont été pour la plupart ignorées.

En décembre 2014, dix mois après les Jeux olympiques de Sotchi, le réseau allemand ARD a diffusé un reportage du journaliste Hajo Seppelt sur le dopage largement répandu au sein de l'athlétisme russe, utilisant des enregistrements filmés en secret par des dénonciateurs.

L'Agence mondiale antidopage (AMA) a par la suite nommé un comité d'enquête présidé par Richard Pound, un vétéran membre du CIO. Ce comité comprenait également Richard McLaren. Leurs rapports publiés en novembre 2015 et janvier 2016 ont conduit à la suspension de la Fédération russe d'athlétisme, de l'agence antidopage et du laboratoire de Moscou.

L'équipe de Pound a interviewé Rodchenkov et a conclu qu'il était un rouage important d'une conspiration consistant à fournir des drogues interdites, à dissimuler des cas de dopage et à extorquer des athlètes.

Rodchenkov a fui aux États-Unis et a fourni les détails dans le cadre d'une entrevue au New York Times, en mai 2016, comment, en tant que directeur du laboratoire antidopage des Jeux de Sotchi, il a aidé les athlètes russes à tricher. Il a affirmé que 15 des 33 médaillés russes étaient dopés.

L'AMA a nommé McLaren pour vérifier les nouvelles allégations. En l'espace de deux mois, il a remis un rapport intérimaire avant les Jeux olympiques de Rio qui a confirmé le témoignage de Rodchenkov.

« Cela ne peut pas être le fait de quelques individus sans scrupules, ou même d'un département dissident d'une organisation », a déclaré McLaren la semaine dernière au sujet du programme de dopage de la Russie.

Le CIO a ensuite mis en place deux commissions. L'une d'entre elles, présidée par le membre du CIO Denis Oswald, a vérifié les preuves de McLaren pour sanctionner au besoin les athlètes russes de Sotchi. Un second, présidé par un ancien président de la Suisse, Samuel Schmid, devait évaluer si une « conspiration institutionnelle » existait.

L'équipe d'Oswald a commencé à rendre ses décisions le mois dernier. En date de lundi, 25 athlètes russes avaient été disqualifiés des Jeux de Sotchi et exclus à vie des Jeux olympiques, et 11 médaillés ont perdu leur breloque. Un athlète russe a été blanchi.

Schmid a reçu un affidavit sous serment de 50 pages de Rodchenkov pour son rapport. Il devait être livré aux membres du conseil du CIO, lundi.

Qui décidera ?

Le conseil du CIO se réunira à ses quartiers généraux temporaires à Lausanne. Il est présidé par Bach et comprend deux membres de la Commission Oswald - Oswald lui-même et Juan Antonio Samaranch fils.

Le conseil comprend également un membre de la commission Schmid, Robin Mitchell, et deux Américains : Anita De Frantz et Angela Ruggiero, quadruple médaillée en hockey.

Le président de la Fédération internationale de ski, Gian Franco Kasper, représente les sports d'hiver, qui s'opposent pour la plupart à une interdiction totale.

Ils rencontreront la championne du monde de patinage artistique Evgenia Medvedeva, qui s'est joint à une délégation russe qui plaidera pour une sanction plus légère.