Menaces, intimidations des services secrets et grande difficulté à mener des contrôles: l'Agence mondiale antidopage enfonce la Russie en communiquant mercredi les fruits de son travail dans le pays depuis novembre, à deux jours de la décision de l'IAAF sur la participation des athlètes russes aux Jeux olympiques de Rio (5-21 août).

Nul doute que les nouvelles annonces de l'AMA font faire grand bruit dans les couloirs du Grand Hôtel de Vienne, en Autriche, hôte du Conseil de l'IAAF.

Car l'AMA n'a pas pris de gants pour communiquer ses travaux, bien loin de toute diplomatie.

«Des agents armés du FSB (les services secrets russes) ont menacé d'expulser du pays des contrôleurs», écrit l'AMA dans son rapport.

Ces scènes se sont passées en Russie, dans des villes de garnison, «souvent choisies» comme lieu de résidence par de nombreux sportifs russes obligés de se géolocaliser conformément au code mondial antidopage, afin que les contrôleurs puissent les trouver.

Ces villes de garnison ont la particularité d'être difficiles d'accès. «Les athlètes savent qu'il est nécessaire d'obtenir des autorisations spéciales pour y pénétrer», écrit l'AMA.

L'accès à ces villes a été demandé en février 2016. «Au 27 mai 2016, l'Agence russe antidopage (RUSADA) en a garanti l'accès mais aucun document officiel n'a été fourni par le ministère des Sports», explique l'AMA.

Dès lors, les contrôleurs qui s'y aventurent sont victimes «d'intimidations».

Ces menaces témoignent des difficultés rencontrées par l'AMA à évaluer les progrès de la Russie en matière de lutte contre le dopage.

52 résultats anormaux

Les athlètes russes ont malgré tout subi 2947 contrôles antidopage entre le 18 novembre 2015 et le 29 mai 2016, pour 52 résultats anormaux dont 49 dus au seul meldonium, détaille l'AMA dans un listing exhaustif.

Mais il a été impossible de mener 736 contrôles antidopage en Russie depuis novembre 2015, un ratio très important au regard des tests complétés dans la même période.

Sur les 2947 tests complétés, 2142 concernent les sports olympiques d'été, 805 ceux d'hiver. L'Agence britannique antidopage, mandatée par l'AMA pour surveiller les efforts russes, n'a pu en faire que 455. L'IAAF, 655.

Au-delà des chiffres, l'AMA dresse surtout le portrait d'un pays qui est loin d'en avoir fini avec la culture du dopage.

L'AMA cite ainsi l'exemple d'un «laboratoire analytique opérationnel» présent sur les lieux du championnat national d'haltérophilie. Il comportait «une centrifugeuse et d'autres équipements d'analyses en action et les sportifs y allaient librement», écrit l'Agence internationale.

De même, «un certain nombre de laboratoires accrédités par l'AMA (et chargés d'analyser les échantillons prélevés en Russie) ont constaté que les boîtes d'expédition contenant les échantillons avaient été ouvertes par les douanes russes».

Vendredi, à Vienne, le Conseil de l'IAAF devra choisir s'il accepte de voir la Russie athlétique participer aux JO.

En parallèle, la Russie est également dans le collimateur de l'UEFA au soccer, menacée d'expulsion de la compétition en raison du comportement de certains de ses hooligans présents en France à l'Euro-2016.

La semaine s'annonce donc décisive pour un pays qui a accueilli les Mondiaux d'athlétisme en 2013, les Jeux olympiques d'hiver en 2014 et qui accueillera la Coupe du monde de soccer en 2018.