«Personne ne veut les Jeux de 2022», a titré mardi Deadspin. «Le monde réalise que d'accueillir les Jeux est totalement merdique», a renchéri le lendemain Vice News.

Ces médias réagissaient à un référendum tenu dimanche dans la ville polonaise de Cracovie. Dans une proportion de 70%, les citoyens ont rejeté l'idée d'accueillir les Jeux olympiques d'hiver de 2022. Résultat, Cracovie a retiré sa candidature, laissant quatre villes dans la course.

C'était assez pour que certains médias racoleurs concluent que les Jeux étaient «merdiques» et que plus «personne» n'en voulait (à part quatre villes candidates, mais passons).

Le retrait de la candidature polonaise représente pour ces médias un tournant: le caractère pharaonique des Jeux de Sotchi a créé un précédent et les villes tournent maintenant le dos aux Jeux car trop chers et risqués.

Mais selon Dick Pound, Montréalais, membre du Comité international olympique (CIO) et son ancien vice-président, toute cette analyse relève du sensationnalisme.

Comme ça, plus personne ne voudrait des Jeux? Juste avant Cracovie, la ville de Stockholm a aussi retiré sa candidature pour les Jeux de 2022. «Mais la candidature de Cracovie était marginale, selon moi, fait valoir M. Pound. La ville de Stockholm, elle, est fâchée, je crois, d'avoir été souvent éconduite dans le passé.»

Demeurent dans la course Oslo, en Norvège, Almaty, au Kazakhstan, Pékin, en Chine ainsi que Lviv en Ukraine. Pas si mal, si on compare avec 2018, alors qu'il n'y avait que deux villes en compétition avec Pyeongchang.

Et que dire des Jeux de Los Angeles, en 1984. «Après les Jeux de Montréal, il n'y avait qu'une ville candidate et c'était Los Angeles. Les gens disaient à l'époque: «oh mon Dieu, à cause de Montréal, il n'y a qu'un seul candidat, plus personne ne veut se risquer à accueillir les Jeux et blablabla», rappelle Richard Pound. Ce n'était pas vrai. Il y avait plusieurs villes qui attendaient le bon moment.»

«C'est la même chose aujourd'hui. Plusieurs pays veulent encore accueillir les Jeux de 2024, y compris les États-Unis. Je ne pense pas qu'il faille paniquer», dit-il.

Les Jeux à 51 milliards

Bien entendu, les Russes ont frappé l'imagination avec leurs Jeux à 51 milliards. Il a beaucoup été dit et écrit que cela créait un précédent; que pour une raison ou une autre, les villes devraient désormais payer des sommes astronomiques pour s'offrir les Jeux. Richard Pound ne partage pas cette lecture.

«Je pense qu'il y a un malentendu: organiser les Jeux ne coûte pas 51 milliards. À Sotchi, de nouvelles routes ont été construites, des téléphériques, un village de montagne, etc. Dans la plupart des endroits, tout ça n'est pas nécessaire», note-t-il.

«Les Russes ont vendu au CIO un projet de développement des sports d'hiver en Russie. Ça a séduit le CIO. Mais dans les pays d'hiver traditionnels, de tels investissements ne sont pas nécessaires.»

«Ce que la Russie choisit de faire de son argent et comment le pays veut gérer son développement n'est l'affaire de personne d'autre que la Russie, ajoute-t-il. Si j'étais leur président, je ne suis pas certain que je voudrais un complexe olympique dans la région de Sotchi. Mais c'est leur choix.»

Une déclaration dans la foulée du retrait de Cracovie vient appuyer les dires de Richard Pound. Les autorités d'Oslo n'envisagent pas un instant d'imiter Stockholm et Cracovie. Au contraire, elles semblent plus que jamais prêts à accueillir les Jeux d'hiver.

«Cela renforce clairement notre candidature, a expliqué le président de la Fédération sportive norvégienne Boerre Rognlien. Notre candidature est maintenue et il est clair qu'avec un concurrent en moins, nous aurons encore plus de possibilités d'influencer la façon dont les Jeux d'hiver doivent être organisés.»

Plus personne ne veut les Jeux de 2022? Pas tout à fait...