L'annonce du président allemand Joachim Gauck qu'il ne se rendrait pas aux Jeux olympiques d'hiver à Sotchi a été largement interprétée lundi en Russie comme un «boycott», en dépit des précautions diplomatiques prises par Berlin.

M. Gauck a fait savoir dimanche qu'il n'assisterait pas aux JO de Sotchi, du 7 au 23 février 2014, dans le sud de la Russie. Sa porte-parole a précisé qu'il n'y avait pas de volonté d'envoyer un message politique, plusieurs de ses prédécesseurs n'ayant pas assisté par le passé à des JO d'hiver.

Mais des médias russes ont clairement interprété la décision de M. Gauck comme un boycott: «le président de l'Allemagne Gauck annonce qu'il boycotte les Jeux olympiques de Sotchi», a ainsi titré le site de l'édition russe du magazine Forbes.

«Joachim Gauck proteste contre les violations des droits de l'homme en Russie», renchérit le site d'informations sportives Segodnya avec le même titre.

Interrogé par l'AFP, l'expert russe Alexeï Makarkine a déclaré que la décision de M. Gauck était considérée en Russie comme «un boycott à la fois par le pouvoir et l'opposition», observant que la présidence allemande avait cherché à adoucir la portée de cette annonce.

Pour l'opposition russe, «ce sera un soutien moral de la part de l'Allemagne», premier partenaire commercial de la Russie, tandis que les autorités vont considérer cela comme «un geste non amical, provocant», a ajouté M. Markarkine, directeur adjoint du Centre de technologies politiques.

Compte tenu de son passé, le président allemand, dont la fonction est essentiellement honorifique, «ne pouvait pas rester silencieux sur la situation des droits de l'homme en Russie», a déclaré à l'AFP l'analyste du Centre Carnegie Maria Lipman, estimant qu'il était «difficile» de ne pas interpréter sa décision comme un «boycott».

Ancien pasteur et militant des droits de l'homme dans l'ex-Allemagne de l'Est, Joachim Gauck a critiqué à maintes reprise la politique du régime de Vladimir Poutine en Russie, dont les ONG dénoncent les atteintes aux libertés et arrestations d'opposants.

Le député européen et homme politique allemand Daniel Cohn-Bendit a déclaré lundi à la radio française Europe 1 que le président allemand avait «tout à fait raison de boycotter la cérémonie d'ouverture (des JO) qui ne sera qu'une révérence au tout puissant et omniprésent Poutine».

Des appels au boycott des JO des Sotchi ont été lancés en Occident par plusieurs personnalités internationales après la promulgation en juin par le président Poutine d'une loi punissant la «propagande» homosexuelle devant mineurs, un texte vivement critiqué par des défenseurs des droits de l'homme le jugeant discriminatoire.