Du Japon aux États-Unis, la probable disparition de la lutte du programme olympique en 2020 a suscité mercredi une levée de boucliers des amateurs de ce sport ancestral qui entendent bien faire changer d'avis le Comité international olympique (CIO) avant que le couperet ne tombe vraiment en septembre.

«Incompréhensible», «injuste», «impensable», «une grande erreur», les réactions indignées se sont multipliées dans toutes les langues à la suite du vote de la commission exécutive du CIO, d'où la lutte est sortie grande perdante.

À Istanbul comme à Tokyo, les deux villes avec Madrid qui espèrent obtenir l'organisation des jeux Olympiques d'été de 2020, la perspective que leurs champions ne puissent pas prétendre à l'or suprême devant leur public a du mal à passer.

«Organiser des JO à Istanbul sans la lutte est absolument impensable», a souligné le président de la Fédération turque Hamza Yerlikaya. «Nous ne le permettrons jamais.»

Son homologue japonais Tomiaki Fukuda se disait «profondément choqué» tandis que Saori Yoshida, la championne incontestée des moins de 55 kg avec ses trois titres olympiques et neuf mondiaux, était «effondrée».

Dans l'espoir de mobiliser les troupes, une pétition a été mise en ligne aux États-Unis. Elle revendiquait plus de 21 000 signatures mercredi en fin d'après-midi.

«La lutte est associée aux jeux Olympiques et on ne peut pas jeter un tel symbole. À ce rythme-là, le nom «Olympique» va aussi disparaître», a avancé le président de la fédération grecque, Kostas Thanos. Pour le Français Salvatore Attardo, le CIO se trompe de cible: «Quand on voit les scandales qui se sont produits aux JO de Londres avec la boxe, on ne comprend pas ce qu'elle fait encore dans le panel».

Un universitaire de Boston, Frank Shorr, se demandait «à quel point ce choix était orienté par les profits: les ventes de billets versus les coûts d'exploitation». «Après tout, le CIO obtient beaucoup plus d'exposition avec (les vedettes du golf, NDLR) Tiger Woods et Rory McIlroy qui participent aux Jeux qu'avec un lutteur ou un joueur de hockey sur gazon», selon lui.

À Lausanne, où s'achevait mercredi la réunion de sa commission exécutive, le CIO répétait à l'envi que le sort de la lutte n'était pas scellé et que le choix définitif des sports au programme olympique de 2020 ne serait officialisé qu'en septembre, lors de la session à Buenos Aires.

Le président du CIO Jacques Rogge s'était abstenu de prendre part au vote, comme il s'est abstenu de commenter la décision de ses collègues. Mais il a insisté sur «la procédure juste» établie par le CIO, qui offre la possibilité à la lutte de se battre encore, avec sept autres sports candidats aux Jeux, dont le squash et le karaté, pour décrocher la seule place disponible dans le programme de 2020.

«Évidemment, nous savions avant même que la décision soit prise que quel que soit le sport qui ne serait pas inclus dans le programme principal, cela conduirait à des critiques de ceux qui suivent ce sport», a fait valoir M. Rogge. Mais selon lui, la Fédération internationale de lutte (FILA) a bien réagi en s'engageant à adapter son sport.

Si certains sports disposent de précieux défenseurs parmi les 14 votants de la commission exécutive, tel le pentathlon moderne qui peut compter sur le vice-président de sa fédération (UIPM) Juan Antonio Samaranch junior, Jacques Rogge n'y voit pas de conflit d'intérêt. «Dans le prochain conclave, ils seront tous catholiques», a fait valoir le président du CIO, pour qui c'est la qualité des membres et leur connaissance du milieu sportif qui doivent être avant tout privilégiées.