Les Nordiques, les frères Stastny, Rendez-Vous 87... Marcel Aubut a réussi plusieurs coups fumants dans le sport professionnel. Le voilà maintenant au sommet de l'Olympe canadien.

À l'issue d'une campagne efficace mais discrète, Aubut a été élu président du Comité olympique canadien (COC), samedi, à Vancouver. L'avocat de 61 ans devient ainsi le premier président francophone de cet organisme plus que centenaire.

Joint par téléphone, Me Aubut s'est dit «profondément touché» par cette nomination historique. «Ce n'est jamais arrivé et ça n'a jamais passé proche non plus», a relevé le nouveau président, une heure après l'annonce de sa victoire. «Ce n'est pas une question politique ni une question de langue. Il s'agit simplement d'être fier de ce que nous sommes. Il n'y a jamais eu une espèce d'alternance. Il y en a maintenant une et c'est moi qui la provoque. C'est un cadeau en trois dimensions.»

Me Aubut estime par ailleurs que le COC a fait « beaucoup de progrès » en matière de bilinguisme depuis quelques années. «Il s'agit de capitaliser là-dessus et même d'ajouter de la vitesse», a-t-il indiqué.

À l'issue d'un scrutin auquel participaient 79 membres du COC, Aubut a devancé sa seule rivale, Tricia Smith. L'ancien propriétaire des Nordiques de Québec a reçu 62% des suffrages. Mme Smith, une avocate de la Colombie-Britannique qui a fait partie de quatre équipes olympiques en aviron, a obtenu l'un des deux postes de vice-président du COC.

«Moment exaltant»

«Je range cela dans les grands événements de ma vie, a commenté Me Aubut. C'est une élection à la tête d'un mouvement qui représente tout un pays. Une cinquantaine de personnes ont voté pour moi. J'ai reçu des appuis de toutes les régions. Et ça arrive à un moment vraiment exaltant, avec les Jeux d'hiver dans notre pays. Je suis d'ailleurs élu dans la ville même des Jeux. C'est un grand accomplissement.»

Aubut succédera à Michael Chambers, en poste depuis 2001. Le deuxième mandat de ce dernier a été exceptionnellement prolongé jusqu'au terme des Jeux olympiques et paralympiques de Vancouver, en mars 2010. À titre de président «désigné» - une première dans l'histoire du COC -, Aubut travaillera en collaboration avec Chambers.

Élu au conseil d'administration et au comité de direction du COC en 2005, Me Aubut est un supporter de longue date de l'olympisme. Il a assisté à tous les Jeux olympiques depuis ceux de Barcelone, en 1992.

«J'ai toujours eu cette face cachée de ma vie, a-t-il tenu à souligner. J'ai été le premier président des Nordiques à 29 ans mais, en parallèle, je me suis toujours occupé d'athlètes comme Gaétan Boucher, Sylvie Bernier, Pierre Harvey. J'ai eu beaucoup de succès dans ma vie professionnelle et dans le sport professionnel, mais j'ai été capable de démontrer que je ne suis pas nouveau là-dedans.»

Appuis de taille

Depuis le mois de janvier, Me Aubut et son équipe ont mené une campagne active auprès des 79 membres électeurs du COC. Il a reçu l'appui de poids lourds comme Dick Pound, ancien président du COC, et Walter Sieber, directeur des sports aux Jeux de Montréal en 1976 et très branché dans le mouvement olympique international. L'ancien Crazy Canuck Steve Podborski et l'ex-coureuse Charmaine Crooks, quintuple olympienne, ont également milité en faveur du Québécois.

Très appréciée dans le milieu, où elle est active depuis une trentaine d'années, Tricia Smith avait pour sa part l'appui de John Furlong, président du comité d'organisation des Jeux de Vancouver.

«Il fallait ne pas avoir fait beaucoup d'erreurs pour gagner, a souligné Me Aubut. Mais on a fait comme d'habitude: on a travaillé plus fort que tout le monde. À un moment donné, ça rapporte.»

Dans son programme de campagne, Aubut exprime de grandes ambitions pour le COC, dont il veut faire «un des meilleurs comités olympiques nationaux au monde». Il souhaite que l'organisme soit plus actif et plus visible auprès du grand public, des fédérations sportives et des gouvernements. «Il faut passer à l'autre niveau», a-t-il résumé. Sa priorité sera d'assurer la pérennité du financement des programmes d'excellence À nous le podium (sports d'hiver) et Vers l'excellence (été).

Le défi est néanmoins de taille. Me Aubut le reconnaît: «Le COC devra traverser les années les plus difficiles de son histoire: un creux postolympique jumelé à une crise économique mondiale sans précédent.» En ce sens, la mise à contribution du secteur privé sera cruciale, estime le nouveau président.

Et Québec?

Tout en s'engageant à appuyer sans réserve la candidature de Toronto aux Jeux panaméricains de 2015, Me Aubut ne cache pas que le projet de tenir des Jeux olympiques d'hiver à Québec est toujours bien vivant.

«En tant que patron du Comité olympique canadien, j'ai une obligation de réserve, a-t-il prudemment mentionné. Mais tout le monde comprendra que d'avoir le président du comité dans la ville où on veut des Jeux, ça ne peut pas nuire. Parce que ça passe par là en premier.»

Aubut amorce un mandat renouvelable de quatre ans qui prendra fin en 2012.