«C'était presque une bataille pour la deuxième place...» Tony Gallopin a le mieux décrit la conclusion du cinquième Grand Prix cycliste de Montréal, dimanche après-midi. Troisième, le Français de la Lotto Belisol, vainqueur d'étape au Tour de France, ne pouvait que s'incliner devant la supériorité de Simon Gerrans.

Vainqueur à Québec pour la deuxième fois deux jours plus tôt, l'Australien de 34 ans est devenu le premier coureur à remporter coup sur coup les deux épreuves canadiennes du circuit WorldTour. Mis en orbite par ses coéquipiers d'Orica GreenEDGE dans les cinq derniers kilomètres, Gerrans s'est imposé avec une facilité déconcertante devant le Portugais Rui Costa, nul autre que le champion du monde en titre et ancien lauréat à Montréal (2011).

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«Je ne peux remercier mes coéquipiers assez pour leur travail et leur engagement aujourd'hui», a louangé celui qui s'annonce donc comme l'un des principaux favoris pour succéder à Costa dans deux semaines en Espagne. «Comme tout le monde a pu le voir, je ne pouvais demander un meilleur appui dans le final.»

Sur un parcours réputé sélectif, Gerrans a pu compter sur la présence de cinq équipiers avec 5 km à faire, une rampe de lancement idéale avant le faux plat montant final de 500 m sur l'avenue du Parc, son terrain de jeu de prédilection. Le reste n'était qu'une formalité pour l'explosif «puncheur», comme s'il n'avait plus qu'à pousser une rondelle libre dans un filet désert.

Étonné d'avoir profité d'un tel entourage si tard dans la course? «En fait, j'aurais été surpris si je n'avais pas eu cinq gars avec moi dans le final», a rétorqué Gerrans. «Ils sont tous en excellente forme en ce moment. Ils se sont sacrifiés du kilomètre 0 jusqu'à la fin.»

Il a souligné la contribution de son compatriote Matt Hayman, appelé à prendre les commandes du peloton quand une échappée à quatre coureurs (Polanc, Jeanneson, Vervaeke et le Canadien Ryan Roth) s'est donné une priorité de plus de 12 minutes après 50 km.

Mini-suspense

Puis, rare moment d'action dans un scénario autrement éculé: une cassure provoquée par les Movistar et les FDJ.fr au moment où une cinquantaine de coureurs s'étaient arrêtés au sommet du mont Royal... pour répondre à un besoin naturel. Petite inquiétude pour Gerrans, qui s'est soudainement retrouvé dans le troisième groupe.

Tout est rentré dans l'ordre un tour et demi plus tard, au terme d'une chasse à laquelle Antoine Duchesne a contribué au profit de son leader Cyril Gauthier (11e). Ç'a été le coup de mort du Québécois, affecté par une tendinite à un genou. Très ému, Duchesne s'est excusé à l'organisateur Serge Arsenault en revenant vers la zone de départ/arrivée. «Je n'ai pas arrêté parce que ça me tentait», a lâché le coureur d'Europcar, dépité de ne pouvoir exploiter une forme physique qu'il sentait excellente.

Dernier rescapé de l'échappée, le Slovène Jan Polanc s'est fait rejoindre dans la dernière ascension de Camilien-Houde. Son coéquipier Rui Costa a alors été le premier à attaquer, désireux de se débarrasser de Gerrans. Bauke Mollema (Belkin) et Tim Wellens (Lotto) ont aussi placé des accélérations qui ont fait des dommages, mais l'Australien est lui-même revenu sur le groupe d'une dizaine de coureurs avant de basculer au sommet.

Simon Spilak (Katusha) a tenté sa chance au pied de Polytechnique, dernière difficulté de la journée. Un groupe dangereux s'est alors formé, comprenant entre autres Greg Van Avermaet (6e), Enrico Gasparotto (9e) et Costa. Cette fois, Gerrans n'était pas là.

Costa s'est essayé une dernière fois sur le boulevard Édouard-Montpetit, mais le train Orica, tout juste derrière, marchait déjà à pleine vapeur.

Déposé à 200 m par Michael Albasini et Daryl Impey, Gerrans a eu le temps de se retourner et de lever les bras bien avant de franchir la ligne. «Vous savez, j'en demande beaucoup à mes coéquipiers et ils répondent chaque fois à l'appel», a souligné le champion national australien, qui est lui aussi toujours fidèle au poste.