Désormais retiré du cyclisme, Lance Armstrong fait l'objet pour la première fois d'une procédure disciplinaire de la part d'une autorité sportive qui soupçonne la star américaine de dopage lors de ses sept victoires dans le Tour de France de 1999 à 2005.

En attendant, le Texan, aujourd'hui âgé de 40 ans, est suspendu par l'Agence antidopage américaine (USADA) de toute compétition et ne peut s'aligner, comme il prévoyait de le faire, au prochain triathlon de Nice le 24 juin puisque l'ex-cycliste a renoué depuis l'an passé avec son sport d'origine.

Quelle est la portée de l'accusation?

Dans la lettre de 15 pages qui recense les griefs de l'USADA à l'encontre d'Armstrong et de son clan, notamment son directeur sportif de l'époque Johan Bruyneel (actuel responsable de la formation RadioShack) et son préparateur italien Michele Ferrari, l'Américain est soupçonné de dopage de 1996 à 2011, soit la quasi-totalité de sa carrière, hormis son titre de champion du monde de 1993.

EPO, transfusion sanguine, testostérone, corticostéroïdes, agents masquants: la liste est longue des produits interdits auxquels Armstrong est accusé d'avoir eu recours (détention, usage ou tentative d'usage) durant sa longue et impitoyable domination sur le peloton.

L'USADA évoque un système élargi de dopage à partir de 1998, dans le cadre de l'équipe US Postal (devenue ensuite Dicovery Channel). C'est aussi la raison de l'implication de deux médecins, Pedro Celaya et Lui del Moral, et de l'entraîneur Pepe Marti.

Peut-il perdre ses sept victoires dans le Tour?

C'est l'une des inconnues de la procédure, en raison de la complexité de la réglementation et de la superposition des instances en cause. Pour l'Américain, le risque semble bel et bien exister dans l'hypothèse d'une condamnation, si l'on se fie aux éléments fournis par l'USADA.

Le délai habituel de prescription fixé à huit ans - le Danois Bjarne Riis, qui a avoué en 2007 s'être dopé pour gagner le Tour 1996, a conservé son titre - est susceptible de modification en cas de preuves répétées de dopage et de dissimulation frauduleuse. L'agence a rappelé le cas de l'athlète américain Eddy Hellebuyck, sanctionné en février dernier pour des faits se situant entre 2001 et 2004.

Pourquoi l'USADA a-t-elle attendu 2012 et la retraite d'Armstrong pour passer à l'attaque, sept ans après sa dernière victoire dans le Tour?

Aucun contrôle antidopage subi par l'Américain ne s'est avéré positif même si le doute existe à propos d'un échantillon datant du Tour de Suisse 2001, évoqué dans la lettre de l'USADA. Pour agir, l'agence américaine a dû attendre d'être en possession des éléments rassemblés par l'enquête fédérale dirigée par Jeff Novitzky.

En février dernier, cette enquête a été close, sans donner lieu à poursuite. Mais elle a permis notamment de réunir les témoignages des anciens coéquipiers d'Armstrong et un faisceau concordant d'indices (de preuves ?) jugé suffisamment accablant.

Le monde du sport a déjà eu des exemples de (tardifs) retours en arrière. Ainsi, l'Américain Jerome Young, qui a admis avoir eu recours à des pratiques interdites (et convaincu de dopage aux JO 2000), a-t-il été effacé des bilans en 2009 par la fédération internationale d'athlétisme, qui est remontée dix ans en arrière.

Que peut faire Armstrong?

L'Américain, aidé par des spécialistes (avocats, communicants...) de haut vol, a obtenu gain de cause dans l'enquête fédérale, un enjeu fondamental au regard des risques puisque la sanction aurait pu aller jusqu'à la case prison. Maintenant, il doit se défendre sur le terrain de la justice sportive.

Début mai, il assurait dans une interview à un magazine de son pays (Men's): «Tout ça, c'est du passé. Quoi qu'il arrive, je n'ai plus envie de me battre. J'ai évolué.»

Sa réaction, mercredi, après l'annonce de l'ouverture de la procédure, a été plus vigoureuse, au moins dans les mots choisis. Il a mis en cause l'USADA, a parlé de «malveillance» et de «vendetta». Et il a répété, si besoin était: «Je ne me suis jamais dopé.»