Philippe Gilbert se souviendra de son passage au Québec. Les amateurs de vélo québécois aussi.

Non, le numéro un mondial n'a pas gagné sur le mont Royal. Le Grand Prix cycliste WorldTour de Montréal a plutôt couronné le Portugais Rui Costa, imparable dimanche après-midi.

Gilbert a fini troisième, derrière le Français Pierrick Fédrigo. Après la cérémonie du podium, c'est quand même le champion belge qui a tenu à prendre le micro pour remercier les milliers de partisans venus l'acclamer, à son grand étonnement.

«J'ai vraiment ressenti un soutien énorme, un peu similaire à ce que je vois dans les courses belges», a dit Gilbert en conférence de presse pour expliquer son geste. «En arrivant ici, je ne savais pas que j'étais connu comme ça du public canadien. Pour moi, c'est une grande surprise, très agréable et ça fait plaisir. Je vois que le sport cycliste n'est pas qu'aimé en Europe ou en Belgique, mais partout dans le monde. C'est très positif pour notre sport.»

Avec un champion de cette classe et de cette envergure, ça aide. Impossible de manquer le seul coureur en noir, rouge et jaune. Le peloton aussi l'avait à l'oeil. Gilbert a donc été incapable de répéter son coup d'éclat réussi deux jours plus tôt au GP de Québec.

Quand les ténors ont décidé de s'expliquer dans l'avant-dernière montée de Camilien-Houde, il a tenté sa chance. Sans succès, le Néerlandais Robert Gesink, tenant du titre, le marquant à la culotte.

«Avec le vent défavorable dans la montée, impossible de faire la différence, a souligné Gilbert. J'étais à 50 mètres du groupe de tête, mais je n'ai pas voulu boucher le trou parce que les coureurs dans ma roue n'ont pas voulu collaborer. Je n'ai pas voulu faire le travail pour eux et j'ai coupé mon effort.»

Son pari a failli payer. Au dernier tour, à sept kilomètres de l'arrivée, l'Autrichien Stefan Denifl (5e à l'arrivée), Fédrigo et Costa, clairement l'homme fort du jour, ont faussé compagnie au peloton au bas du chemin Remembrance. Le trio s'est rapidement donné une priorité d'une quinzaine de secondes. A suivi une chasse un peu désorganisée qui n'a pas manqué de rappeler le suspense de l'an dernier lors de la victoire de Gesink (36e dimanche).

Au terme d'un long sprint en faux plat montant sur l'avenue du Parc, Costa a su résister par deux petites secondes au retour de Gilbert. Le Portugais de 24 ans a rangé cette victoire «à saveur particulière presque à la même hauteur» que celle qu'il a décrochée au dernier Tour de France devant... Gilbert.

S'il regrettait un peu d'être passé si près d'un deuxième succès au Québec, Gilbert se félicitait d'avoir évité la catastrophe quand il a chuté au cinquième des 17 tours de la course de 205 kilomètres. Le leader de l'Omega Pharma-Lotto est tombé en même temps que le Québécois Dominique Rollin.

Touché à la main droite, Gilbert a pu réintégrer le peloton quelques kilomètres plus loin. Rollin a été moins chanceux. Coupé à la lèvre supérieure et victime d'égratignures sur le coude droit et les jambes, il a été contraint à l'abandon.

Le coureur de la FDJ parvenait mal à s'expliquer ce qui s'était passé. Après un ravitaillement, il s'alimentait quand son vélo s'est soudainement dérobé sous lui sur le chemin de la côte Sainte-Catherine. Il croit avoir frappé un trou... «comme d'habitude au Québec», a-t-il dit.

«Je n'ai rien pu faire, je suis tombé directement sur le visage», a indiqué Rollin, qui ignorait que Gilbert se trouvait à ses côtés sur le bitume. «Rien de brisé, mais c'est sûr que c'est dommage de chuter chez soi et de devoir arrêter si brutalement.»

Troisième sur le même circuit l'an dernier, le Canadien Ryder Hesjedal n'a pu répéter son exploit. Il s'est peu fait voir avant une attaque vaine dans la dernière montée de la côte Polytechnique. Il a fini 11e, à quatre secondes de Costa. «Je ne peux pas dire que je suis déçu, a assuré le Britanno-Colombien. Sur papier, c'est pire que l'an dernier, mais chaque année est différente. C'est une course de cinq heures et 20 minutes. Ç'a été dur.»