Le cheminement de Svein Tuft, un Canadien de Colombie-Britannique, est tout sauf conventionnel. Le cycliste a commencé à rouler au milieu des années 90, à l'âge de 18 ans, avec un vélo d'occasion payé 40$. Le week-end dernier, au contre-la-montre du Tour de Californie, Tuft, maintenant âgé de 31 ans, a complété le prologue de Sacramento en neuvième position, tout juste devant... Lance Armstrong. Portrait d'un passionné tout à fait exceptionnel.

De tous les coureurs qui ont pris le départ du Tour de Californie, le 14 février dernier, aucun n'a un parcours qui s'apparente à celui de Svein Tuft.

 

Le Canadien de 31 ans a commencé à rouler au milieu des années 90, quand il s'est acheté un vélo d'occasion qu'il a payé 40$, et a entrepris de découvrir la Colombie-Britannique avec son chien, Bear. Cet été-là, Tuft a franchi 1000 km en tirant un chariot de 70 kg. Tuft n'avait pas un sou. Il dormait à la belle étoile, en bordure de la route.

«C'était ma passion, a-t-il confié à La Presse. Je voulais voyager à mon rythme. Le vélo est parfait pour découvrir une région, et aussi pour apprendre à connaître ses limites.»

Photo: NYT

Au milieu des années 90, Svein Tuft s'est acheté un vélo d'occasion qu'il a payé 40$ et a entrepris de découvrir la Colombie-Britannique avec son chien, Bear. Cet été-là, le cycliste a parcouru 1000km en tirant un chariot de 70kg.

Au contre-la-montre, cet entraînement peu orthodoxe a été récompensé. Svein Tuft, qui court avec l'équipe Garmin-Slipstream, a fini le prologue de Sacramento en neuvième position, tout juste devant... Lance Armstrong.

«Je suis content de ma course, avait alors déclaré Tuft. Le seul fait d'être au Tour de Californie est fantastique. La concurrence est très forte cette année. C'est digne d'un Tour de France.»

Passionné de ski et de randonnée en montagne, Tuft a abandonné l'école à 15 ans pour voyager et travailler dans des boulots manuels. Cette année-là, ses parents lui ont offert une tente à Noël. Tuft l'a montée dans la cour et a passé l'hiver dedans.

Puis, à 18 ans, il est parti de sa ville natale de Langley, en Colombie-Britannique, pour pédaler jusqu'en Alaska, un voyage de plus de 6000 km. Pour se ternir au chaud, il n'avait qu'un chandail de laine, qui était pratiquement toujours mouillé.

C'est finalement son père qui lui a suggéré de participer à une course de vélo locale. Il a tout de suite été accro. Le cycliste semble avoir hérité de l'endurance physique de son grand-père, Arne Tuft, champion de ski de fond, qui portait les couleurs de la Norvège aux Jeux olympiques de 1936.

«C'était nouveau pour moi, a-t-il dit. Je réalisais que mes voyages avaient été une forme d'entraînement, et que je pouvais avoir de bons résultats.»

Quelques années plus tard, il a décidé d'abandonner la compétition, dégoûté par l'avalanche de scandales de dopage qui accablent le monde du cyclisme.

Svein Tuft gagnait sa vie à tondre des pelouses quand son entraîneur actuel, Mark Cunningham, l'a trouvé en 2004, et l'a convaincu de revenir à la compétition.

Depuis, Tuft a remporté quatre fois le championnat national canadien du contre-la-montre. En 2008, il a remporté le Tour de Beauce, puis il a fini septième au contre-la-montre des Jeux olympiques de Pékin. En septembre dernier, il a remporté l'argent au contre-la-montre des Championnats du monde de Varèse, en Italie.

Le cheminement de Tuft est si incroyable que le récit de sa vie a fait l'objet d'un long article dans le New York Times, il y a deux semaines - chose rarissime pour un cycliste canadien. «Je n'en revenais pas, a dit le coureur, amusé par l'attention qu'il reçoit depuis. J'ai fait l'entrevue avec le Times en me disant qu'ils feraient peut-être un entrefilet. Mais quand j'ai vu ça... C'est quelque chose...»

Son rôle au Tour de Californie était de soutenir ses coéquipiers, dont l'impressionnant Dave Zabriskie, qui a fini troisième dans le contre-la-montre, tout juste derrière Levi Leipheimer et Fabian Cancellara.

«Nous avons des gars super talentueux dans l'équipe. Le Tour de Californie est une course longue et difficile, et il a fallu travailler fort pour leur permettre de bien se positionner.»

Aujourd'hui, Tuft habite en Colombie-Britannique, dans une maison mobile située sur une terre que possède son entraîneur. Cela lui a valu le surnom de «Trailer Park Boy»au sein de son équipe.

«À cause des compétitions, je ne suis pas souvent là, a expliqué Tuft. Mais quand j'y suis, j'aime beaucoup l'endroit. Je peux décrocher.»