Le ton monte à Valence (est), à l'approche de la 33e Coupe de l'America, entre le challengeur américain Oracle et le tenant suisse Alinghi qui menace de se retirer si la justice new-yorkaise déclare ses voiles «illégales».

Les multicoques géants des deux syndicats ont repris l'entraînement sous le soleil en cette fin de semaine pour leur duel du 8 février. Mais Suisses et Américains multiplient les déclarations agressives laissant planer l'incertitude sur le déroulement de l'épreuve.

Un tribunal new-yorkais examine une plainte d'Oracle accusant Alinghi d'utiliser des voiles non conformes, car fabriquées aux Etats-Unis et non en Suisse, et le syndicat helvétique évoque désormais ouvertement un forfait si le verdict tombe en faveur des Américains.

«Si le challengeur parvient à disqualifier les voiles du défenseur, alors il n'y aura pas de match» et Oracle aura gagné la Coupe «sans naviguer», a affirmé Fred Meyer, vice-commodore de la Société Nautique de Genève (SNG), qui représente Alinghi.

Nul ne sait encore si la Cour Suprême de l'Etat de New York se prononcera avant le 8 février et le duel au meilleur des trois manches, mais cette prise de position traduit l'escalade verbale entre les deux adversaires à un peu plus d'une semaines de la 33e «Cup».

Russell Coutts, skipper néo-zélandais d'Oracle, s'est montré particulièrement virulent à l'encontre des Suisses dans un entretien avec l'AFP, les accusant de ne pas respecter les règles du «Deed of Gift» document historique fondateur de l'épreuve.

«Nous n'allons pas laisser tomber cette question» des voiles, a-t-il martelé, accusant en outre Alinghi de vouloir «choisir le vent» pendant la compétition, autre sérieuse pomme de discorde à Valence.

Bataille d'egos

Le jury de l'épreuve doit examiner lundi une protestation d'Oracle contre une règle d'Alinghi limitant à un maximum de 15 noeuds la vitesse du vent pendant les régates, alors que le trimaran géant d'Oracle est jugé plus performant par brise soutenue.

M. Coutts s'est dit prêt à laisser «quelques semaines» de délai à Alinghi pour construire de nouvelles voiles si le tribunal américain les juge illégales. «On ne peut pas changer des voiles en trois semaines», a rétorqué un porte-parole suisse.

Si la Cour ne se prononce pas avant le 8 février, cas le plus probable, les régates se disputeront sous «protestation» américaine, ce qui aiguisera l'atmosphère «électrique», palpable à Valence, entre les deux syndicats.

Le litige qui les oppose depuis deux ans et demi consterne les amoureux de la voile et dégrade l'image de la prestigieuse épreuve de voile. Mais tout compromis permettant un déroulement serein de la «Cup» paraît écarté.

«Ca fait deux ans et demi qu'on est soumis au chantage judiciaire des Américains et on ne veut plus discuter» sous pression, a précisé un porte-parole d'Alinghi, vainqueur de la 32e «Cup» en juillet 2007 à Valence.

Ce conflit illustre aussi la bataille d'egos entre deux patrons milliardaires, le Suisse Ernesto Bertarelli, qui alimente à Valence depuis quelques jours les feux de la polémique, et l'Americain Larry Ellison, attendu en début de semaine prochaine.

Le maxi-catamaran d'Alinghi et le trimaran géant d'Oracle «sont prêts», clament les deux syndicats. Les dix prochains jours pourraient toutefois réserver des surprises.