Catherine Raîche, qui était à l'époque adjointe au directeur général des Alouettes de Montréal, se souvient de cet épisode lors d'un mini-camp en Floride l'année dernière, alors qu'un employé du site d'entraînement avait une question à l'intention du thérapeute en chef de l'équipe.

En jetant un coup d'oeil vers Raîche, il a alors demandé au thérapeute : « Devrais-je plutôt en parler à votre secrétaire ? »

Raîche, âgée de 29 ans et actuelle directrice de l'administration football avec les Argonauts de Toronto, affirme que ce genre de méprise se produit « très, très souvent ».

« C'est drôle d'avoir ces idées préconçues que parce que vous êtes une femme dans le monde du sport, vous n'aurez qu'un certain type de poste, a-t-elle expliqué.

« Les gens vous demandent :"Que faites-vous avec l'équipe ? Êtes-vous meneuse de claque ?"Je réagis,'Non, je ne le suis pas' », a ajouté Raîche.

Malheureusement, c'est une anecdote que la plupart des femmes occupant des postes de direction dans le monde sport peuvent reprendre.

Raîche était partisane des Alouettes plus jeune et elle rêvait d'un emploi dans le football. Elle a obtenu un diplôme en droit dans l'espoir de devenir agente de joueurs avant que les Alouettes ne lui permettent de devenir la première adjointe au directeur général dans la LCF en près de 30 ans en 2017.

Son embauche a fait les manchettes, principalement pour les mêmes raisons que lorsque les Maple Leafs de Toronto ont embauché Hayley Wickenheiser en tant que directrice adjointe au développement des joueurs le mois dernier. L'embauche de Wickenheiser est survenue quelques jours après que les Raptors 905 aient nommé Tamara Tatham au sein de leur personnel d'entraîneurs, faisant de la double olympienne la première Canadienne à se joindre au personnel d'une équipe de la G-League.

Allison Sandmeyer-Graves, chef de la direction de l'Association canadienne pour l'avancement des femmes, du sport et de l'activité physique (ACAFS), l'explique de deux façons.

« La première, c'est qu'il est génial que ces femmes soient reconnues pour leurs compétences techniques qui transcendent le genre et que ces deux organisations aient eu le courage de faire ce genre de choix, a-t-elle déclaré. D'autre part, et je pense que c'est plus qu'une vision idéaliste, c'est que j'ai hâte au jour où ce ne sera plus une nouvelle en soit.  »

Ce jour ne semble pas pour bientôt. Si les embauches de Wickenheiser et de Tatham méritent d'être soulignées, les femmes sont malheureusement sous-représentées dans des rôles de leadership dans le monde des sports. Les femmes ont pourtant remporté 16 des 22 médailles du Canada aux Jeux olympiques de Rio en 2016, mais seulement six pour cent des entraîneuses en chef de cette équipe étaient des femmes - le plus bas pourcentage depuis les Jeux de 2000 à Sydney.

L'ACAFS, en partenariat avec les Producteurs laitiers du Canada, a publié en 2016 un rapport montrant le gouffre flagrant au niveau collégial. Dans les sports universitaires, seulement 32 pour cent des entraîneurs en chef des équipes féminines étaient des femmes. Qu'en est-il des équipes masculines ? Ce nombre chute à seulement un pour cent. Et c'est le même pourcentage pour les entraîneurs adjoints des équipes masculines.

« Et le pourcentage de femmes entraîneuses a chuté », a déclaré Bruce Kidd.

Kidd, un chercheur, un activiste et un ancien coureur de fond qui a participé aux Jeux olympiques de 1964, est membre de deux groupes de travail canadiens sur les femmes dans le sport.

Si le nombre dans les sports amateurs est minime, le portrait des ligues professionnelles est presque entièrement masculin. La NFL a la volonté de s'attaquer au déséquilibre entre les sexes dans sa ligue et la personne responsable est Samantha Rapoport, une Canadienne.

La Montréalaise, âgée de 37 ans, a d'abord travaillé avec la ligue en 2003 en tant que stagiaire de l'Université McGill. Au cours des deux dernières années, elle a été chargée « d'élargir le vivier des talents dans les opérations de football pour la NFL » - traçant la voie pour assurer la présence de davantage de femmes et de minorités dans les emplois de la NFL.

« Nous avons vraiment ciblé les opérations de football, entraîneurs, dépisteurs, hauts dirigeants, officiels, vraiment la dernière frontière pour les femmes dans le football, a déclaré Rapoport, qui a joué à la fois au football sans et avec contact. Et nous faisons un effort concerté pour changer cela.  »

La NFL compte deux entraîneuses à temps plein parmi les centaines à travers la ligue. Rapoport les nomme sans mal : Katie Sowers, assistante des receveurs avec les 49ers de San Francisco, et Kelsey Martinez, assistante à la condition physique chez les Raiders d'Oakland.

« Notre mission ultime est de normaliser le nombre de femmes sur les lignes de côté, et tout ce que nous faisons, chaque programme que nous avons, va dans ce sens. Et il y a quelques cas où nous avons cessé d'en parler et l'exemple est chez les instructeurs à la condition physique », a déclaré Rapoport.

La NFL a six instructeurs à la condition physique, néanmoins un faible nombre par rapport aux programmes de football des universités américaines, dans lesquels elle a déclaré qu'environ la moitié des formateurs dans ce domaine sont des femmes.

Lorsque les Leafs ont embauché Wickenheiser, le directeur général Kyle Dubas a tenté de minimiser l'importance du moment. Wickenheiser était la meilleure candidate pour ce poste, quel que soit son sexe. Et il a souligné que plus de diversité ne pouvait qu'aider l'équipe.

« Les recherches démontrent que plus votre organisation est diversifiée, meilleure est votre prise de décision, meilleure est votre gestion en général, a-t-il déclaré. Si vous n'embauchez que des hommes de race blanche, et je le dis en tant qu'homme blanc, vous laissez de côté probablement beaucoup de choses dont votre organisation peut profiter pour se développer.  »

C'est une philosophie qui fait écho à l'équipe de basketball de MLSE. Après que le président des Raptors de Toronto, Masai Ujiri, ait embauché trois femmes à plusieurs postes clés pendant la saison morte 2017, il a déclaré : « Cela fonctionne ici pour nous, parce que cela a fonctionné pour moi.  »