Le Québec est en retard dans le domaine des courses d'ultrafond, ces chevauchées plus longues que le marathon, très populaires en Europe et aux États-Unis. Mais une nouvelle épreuve, disputée samedi dans Charlevoix, promet de combler en partie ce vide.

Les participants de l'Ultra Trail Harricana (UTH) auront du pain sur la planche. Ils devront franchir 65 km de la célèbre traversée de Charlevoix, par monts et par vaux, en semi-autonomie. Ils partiront du Parc national des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie et finiront au centre de ski du mont Grand-Fonds.

«On s'attend à ce que les plus rapides, l'élite, franchissent la ligne d'arrivée en cinq heures ou moins, prédit l'organisateur, Sébastien Côté. Les coureurs moins rapides pourraient prendre 10 heures.»

Les courses d'ultrafond ont la cote, surtout celles sur sentier. La fin de semaine dernière avait lieu la 11e présentation de l'Ultra Trail du Mont-Blanc (UTMB). Cette course de 168 km autour de la célèbre montagne passe par la France, l'Italie et la Suisse. Les plus rapides mettent un peu plus de 20 heures pour boucler l'épreuve.

La course est devenue tellement populaire au fil du temps qu'un système de tirage au sort a été mis en place pour pouvoir y participer. L'engouement pour l'UTMB témoigne de la popularité croissante de l'ultratrail. Mais le Québec reste résolument en retard. La nouvelle course dans Charlevoix sera la plus longue de la province avec ses 65 km, ce qui reste bien loin de ce qui se fait ailleurs.

«On est pas mal en retard. J'ai fait le Vermont 100 [100 milles, soit 161 kilomètres] au mois du juillet et c'était la 25e présentation», explique Sébastien Rollier, un pédiatre de 39 ans qui s'adonne à l'ultratrail depuis 2 ans. «Dans l'Ouest américain et canadien, c'est très, très développé depuis la fin des années 70. Il y a un vide au Québec, mais je pense qu'il va se combler, qu'il y aura de plus en plus de coureurs intéressés à ces distances.»

Richard Chouinard, qui entraîne l'équipe de course de l'Université Laval, rappelle que le Québec a déjà compté des courses d'ultrafond par le passé. «Dans les années 70, j'ai fini ma carrière de coureur en faisant des 100 kilomètres. Il y en avait un à l'époque au Québec, à Montmagny, explique M. Chouinard.»

Cet ancien coureur respecté estime que le récent «boom de la course» ne s'est pas reflété dans l'ultrafond. «Ce n'est plus la même mentalité qu'avant. Maintenant, on court plus pour le bien-être. On constate qu'il n'y a pas tant d'inscriptions sur des distances comme le marathon. Il y a un engouement pour le 10 kilomètres et le demi-marathon. Mais le bassin de coureurs prêts à faire des courses de très longue distance ne grandit pas.»

Rollier, de Sherbrooke, est l'un des favoris pour l'emporter samedi sur les sentiers charlevoisiens. Il a décidé il y a deux ans de migrer du marathon à l'ultrafond. «Le challenge est plus présent que sur les marathons sur route. Il y a des côtes, dit-il. C'est beaucoup plus difficile d'avoir un rythme. Ceux qui se fient à leur montre, c'est pas la place en sentier. Il faut s'écouter et pour ça, il faut avoir beaucoup couru, connaître ses limites. Moi, j'en tire beaucoup plus de satisfaction que sur route.»

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43,2: C'est l'âge moyen des participants à l'Ultra Trail du Mont-Blanc, une course exténuante de 168 km. «Pour les longues distances, l'âge idéal, c'est le début de la quarantaine, de la cinquantaine. Les jeunes sont très rapides, brûlent beaucoup d'énergie, mais n'ont pas beaucoup d'endurance, explique Sébastien Côté, organisateur de l'Ultra Trail Harricana. Atteindre une maturité en endurance requiert beaucoup de volume et une excellente force mentale.»

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CINQ COURSES ASSASSINES

Spartathlon

La légende de Phidippidès est confuse. Ce soldat grec aurait parcouru, en 490 avant notre ère, la distance séparant les villes de Marathon et d'Athènes (environ 42 km) pour annoncer la défaite des Perses. Mais selon Hérodote, c'est plutôt 250 km qu'il aurait franchis, entre Athènes et Spartes, dans le but de demander assistance aux Spartiates. La première version a donné naissance au marathon, la seconde au Spartathlon. Depuis 1983, ils sont des centaines à parcourir les 246 km qui séparent les deux villes. Et si Phidippidès avait mis 36 heures pour boucler la distance - toujours selon Hérodote -, le record du Spartathlon est de 20het 25 min et appartient au Grec Yiannis Kouros.

Photo William Sichel

Ultra Trail du Mont-Blanc

L'UTMB (pour les intimes) est le saint Graal de la course d'ultrafond. Les coureurs meurent d'envie de l'avoir à leur palmarès. Seulement le tiers des candidats à l'inscription reçoit un dossard. Ses 168 km autour du mont Blanc passent par la France, l'Italie et la Suisse. Kilian Jornet, la star de l'ultrafond, a remporté l'épreuve à trois reprises. C'est le Français Xavier Thévenard qui a remporté l'épreuve samedi dernier, en un temps de 20 h et 34 min.

Photo archives AFP

Le Marathon des sables

À travers dunes et plateaux, cette course de 240 km parcourt depuis 1986 le sud du Maroc. Le défi consiste à porter assez de nourriture pour une semaine. Ce défi attire chaque année plus de 1000 coureurs. Mais sa popularité ne gomme en rien son danger: trois coureurs sont morts au fil des ans lors du Marathon des sables.

Photo archives AFP

L'ultramarathon de Badwater

Les organisateurs la désignent comme la «course la plus dure au monde». Il y a la distance: 135 milles, ou 217 kilomètres. Mais il y a surtout la chaleur. L'ultramarathon de Badwater se dispute dans la vallée de la Mort, en Californie, en plein mois de juillet. Il y fait parfois 50 degrés à l'ombre. On ne permet qu'à une centaine de coureurs de disputer cette course harassante. Les élus doivent avoir fait leurs preuves et couru plusieurs ultramarathons.

Photo archives Reuters

Le Hardrock Hundred

Sise dans les montagnes minières du sud du Colorado, le Hardrock Hundred fait 100 milles. Les participants doivent toutefois franchir 10 000 m de dénivelé. Puisque la course se passe en bonne partie au-delà de 3000 m, les coureurs se munissent de vêtements appropriés, qu'ils doivent eux-mêmes transporter. Il n'est pas rare pour des participants de passer deux nuits sans sommeil pour boucler l'épreuve plus rapidement.

Photo John O'Reagan