Sur la lancée des Jeux de Pékin, la Jamaïque, avec ses merveilles Usain Bolt et Asafa Powell, auteur du deuxième chrono de l'histoire sur la ligne droite (9,72), a survolé les épreuves de sprint de la réunion d'athlétisme de Lausanne, mardi soir.

La «foudre» Bolt n'a pas été en reste avec 19,63 secondes sur le demi-tour de piste. Il s'agit certes du quatrième chrono de tous les temps sur la distance, mais quasiment de l'ordinaire pour un triple champion olympique qui avait serti ses ors pékinois d'autant de records du monde.

La bonne nouvelle pour le sprint, c'est que Powell, humilié en Chine par son jeune compatriote, n'est pas mort. Avec un vent à peine favorable (+0,2 m/s), il a approché les 9,69 secondes de l'extra-terrestre.

Régulièrement battu lors des grands événements (cinquième aux Jeux d'Athènes, troisième aux Mondiaux 2007, encore cinquième aux Jeux de Pékin), Powell avait admis lundi, en arrivant sur les bords du lac Léman, qu'il était «plutôt l'homme des meetings». La preuve: il avait la veille, sous la pluie de Gateshead (Angleterre), couru en 9,87 secondes malgré une mise en action poussive. «C'est comme ça, je suis plus à l'aise sur une course sèche», avait-il ajouté, résigné.

Mais il avait au moins rassuré sur sa forme, rappelant qu'il avait déjà réagi en fin de saison dernière quand, deux semaines après sa déception d'Osaka, il avait porté son record à 9,74 secondes, le 9 septembre 2007 à Rieti (Italie).

Auteur d'un bon départ (150/1000e pour le temps de réaction) au stade de la Pontaise, Powell a rapidement pris le dessus sur l'Américain Walter Dix (9,92), médaillé de bronze aux Jeux.

«Après tous les problèmes que j'ai eus cette année, je suis vraiment comblé par ma performance. Un record personnel, c'est génial», a expliqué Powell, 25 ans.

Il y eut d'abord des problèmes physiques et, par-dessus tout, l'irruption de Bolt dans son domaine à lui, le 100 m.

Pour courir d'égal à égal la saison prochaine, Powell sait désormais qu'il devra descendre à 9,60 secondes. La limite que son cadet aurait probablement fixé le 16 août dernier si, tout au bonheur de son outrageante domination, il n'avait ouvert les bras à 30 m de l'arrivée. «Je m'en sens capable», a averti Asafa.

La Jamaïque, terre de sprint, c'est aussi la petite Shelly-Ann Fraser. Si elle n'est pas très belle à voir courir, Fraser a confirmé son titre olympique en s'imposant devant sa compatriote Kerron Stewart (11,03 contre 11,06).

Avec un plateau rassemblant 33 médaillés des Jeux de Pékin, d'autres moments forts n'ont pas manqué. Ainsi le grand blond Andrey Silnov, assuré de la victoire à 2,35 m, a démontré qu'il avait dans ses longues jambes la mesure de 2,41 m. Le Russe a manqué de peu au premier essai une barre qu'aucun sauteur en hauteur n'a plus franchie depuis huit ans.

Sur le tour de piste, l'Américain Lashawn Merritt est descendu pour la troisième fois de sa carrière sous les 44 secondes (43,98).

Les Jeux ont aussi beaucoup absorbé d'énergies et surtout asséché les motivations. Normal dans ce contexte que des championnes olympiques tchèque Barbora Spotakova (javelot) et brésilienne Maurren Maggi (longueur) soient restées au pied du podium.

Plus surprenante est la défaite de Dayron Robles (13,17), champion olympique du 110 m haies. Car le Cubain ne manquait pas de motivation. Il pensait même améliorer son record du monde (12,87) sur la piste magique du stade de la Pontaise.

Mais il a trouvé en l'Américain David Oliver, vainqueur en 13,02 secondes (vent défavorable de 0,4 m/s), sa bête noire, le seul qui l'avait déjà battu cette saison, précisément le 1er juin à Berlin.

Robles a été jusqu'à la mi-course dans le rythme du record. Pourtant, sous la remontée d'Oliver, il a perdu sa lucidité, heurtant la 10e et dernière haie pour conclure en 13,17.

«J'étais venu pour courir plus vite. Mais bon, c'est comme ça, ça arrive», a souligné le crack de Guantanamo. Les Dieux du stade sont aussi des hommes.