C'est difficile de me concentrer sur le golf pendant la quinzaine olympique. Quel spectacle fabuleux nous offrent ces athlètes dans des sports auxquels on ne s'intéresse vraiment qu'aux quatre ans.

Mais qu'est-ce qui peut bien pousser un être humain à se lancer du haut d'une tour de 10 mètres, à faire des sauts périlleux sur une poutre, à nager, marcher, sauter, courir huit heures par jour ou à lancer un disque, un javelot ou un marteau (ça, je l'ai déjà fait, mais seulement pour le punir d'avoir raté le clou) ?

Comment ces athlètes trouvent-ils la motivation pour s'entraîner pendant quatre ans en sachant fort bien que seule une médaille les fera sortir de l'anonymat ?

Il n'y a pas de circuit professionnel de K-2, de lutte gréco-romaine ou de lancer du poids ; on ne peut pas gagner sa vie en nageant le 100 mètres style papillon ou en jouant au water-polo. Tout ce temps, toute cette énergie dépensée, sans parler du risque de blessure, pour être le meilleur de sa discipline et pour un improbable moment de gloire.

Non, franchement, ce n'est pas notre médiocre récolte de médailles qui m'étonne, c'est plutôt qu'on en ait gagné quelques-unes.

Comment rivaliser avec un pays de 1,3 milliard d'habitants qui dépiste le talent au niveau embryonnaire et qui entraîne ses athlètes huit heures par jour, sept jours par semaine en leur donnant l'occasion de ressortir du lot et de devenir un héros national ? Il faut avoir drôlement faim pour accepter un tel régime et ici, il n'y a que très peu d'athlètes affamés. La grande majorité ira vers des sports comme le hockey, le basket, le ski ou le golf et comment les blâmer?

La Chine a découvert le golf et ce n'est qu'une question de temps avant que les Chinois ne fassent leur marque et dominent la scène mondiale. Si on peut entraîner un homme, ou une femme, à faire trois périlleux arrière en position carpée avec deux vrilles et demie et à entrer dans l'eau sans qu'elle ne s'en aperçoive, je suis à peu près sûr qu'on pourra développer des golfeurs qui pourront atteindre un vert avec un fer 7 et négocier le roulé qui restera.

Les Chinois n'auront aucun problème à trouver des adeptes et le bassin de population est tellement grand qu'il serait bien surprenant de ne pas les voir surclasser l'élite d'ici 20 ans.

Quand je jouais sur le circuit asiatique, dans les années 80, les meilleurs joueurs étaient les Américains et les Chinois (de Taiwan). Il y en a même un qui a failli gagner l'Omnium des États-Unis de 1985. Malheureusement, on se souviendra plus de T.C. Chen pour son double contact sur une approche que pour le fait qu'il menait le tournoi avec quelques trous à jouer et qu'il a terminé à un seul coup du vainqueur, Andy North. D'ignobles personnages avaient même avancé la possibilité que ses initiales, T.C., voulaient dire «two chips». Il y a eu aussi Mister Lu, l'oncle de Master Lu, qui avait terminé deuxième, un coup derrière Lee Trevino à l'Omnium britannique de 1971. Pas des manches de ligne, comme ils disent à Sorel.

Franchement, tout ça me fait un peu peur. J'aimerais tellement voir quelques-uns des nôtres percer sur les circuits majeurs. Ce n'est certainement pas 300 millions de golfeurs chinois sérieux, concentrés, qui s'entraînent 100 heures par semaine, 52 semaines par année, qui augmenteront leurs chances de pouvoir se frotter aux plus grands.

Alors, au travail, les boys. Parce qu'en Chine, on est déjà levé.

Professionnel au club La Vallée des Forts, Jean-Louis Lamarre est l'un des meilleurs joueurs au Québec.