Mine de rien, Émilie Heymans s'apprête à vivre sa troisième aventure olympique à Pékin. Championne du monde à la tour de 10 mètres en 2003 et double médaillée olympique, la plongeuse de 26 ans n'a jamais semblé très à l'aise lorsque les projecteurs sont braqués sur elle après une compétition. Certains ont parfois mal interprété sa personnalité réservée.

«Je suis de nature gênée», avoue Heymans, qui participera à l'épreuve individuelle à la tour de 10 mètres aux Jeux de Pékin.

Encore aujourd'hui, elle ne sait pas trop comment réagir quand les gens l'abordent dans les lieux publics après l'avoir reconnue.

«Même si j'y suis maintenant habituée, ça me surprend encore, poursuit-elle. Il y a quelques mois, je devais réaliser un sondage dans un centre commercial dans le cadre d'un travail universitaire. Une dame, qui ne voulait d'abord pas répondre à mes questions, s'y est prêtée de bonne grâce quand elle m'a reconnue.»

Ayant entrepris le plongeon à l'âge de 11 ans après avoir délaissé la gymnastique, la carrière de Heymans a connu des moments fastes. On peut penser à son titre mondial à Barcelone en 2003 et à ses médailles olympiques au 10 m synchro, l'argent avec Anne Montminy à Sydney en 2000 et le bronze avec Blythe Hartley à Athènes en 2004.

Pour sa part, la principale intéressée chérit surtout le souvenir de sa première sélection olympique.

«En 2000, je me souviens que l'épreuve de sélection à Montréal avait été très serrée entre Myriam Boileau et moi. Myriam avait trois points d'avance sur moi en finale. Mais j'avais réussi deux très bons plongeons avec des coefficients de difficultés élevés. Obtenir mon billet pour aller aux Jeux de Sydney demeure l'un des plus beaux moments de ma vie.»

Bien entendu, elle a aussi vécu des épisodes moins glorieux. Un an après son sacre au championnat du monde, les attentes étaient élevées quand elle s'est présentée aux Jeux d'Athènes. Évincée du podium dans l'épreuve individuelle au 10 m après avoir raté son dernier plongeon en finale, les médias canadiens n'avaient pas été tendres envers elle, reprenant abondamment sa déclaration selon laquelle elle avait «choké».

«Je ne m'arrête pas sur ce qu'on dit ou écrit à mon sujet», prétend celle dont la mère, Marie-Paule, a représenté la Belgique en escrime aux Jeux olympiques de 1976. «J'ai toujours été comme ça. Je n'en ressens pas le besoin. Pour moi, le plus important est de retirer une satisfaction personnelle de mes performances.»

Heymans avoue toutefois que sa contre-performance aux mondiaux aquatiques de Montréal en 2005 a été un coup dur. Plus que sa décevante quatrième place, elle avait mal digéré les critiques de son entraîneur de l'époque, Michel Larouche.

«Ce fut un moment difficile à passer. Mais je ne regrette aucune décision que j'ai prise», dit Heymans, qui peu de temps après a choisi de changer d'entraîneur.

«Les mauvais moments au fil d'une carrière nous font apprécier encore plus les bons. Et ils nous incitent à une remise en question, ce qui est sain.»

Fierté

À Pékin, Heymans vise bien entendu une médaille, individuelle cette fois. Mais ce qui importe le plus pour elle, c'est d'offrir une performance dont elle puisse être fière.

«Quand je fais les choses, j'aime bien les faire. Et n'importe quel athlète se doit d'être perfectionniste. C'est encore plus vrai en plongeon, où la référence est la note parfaite de 10.»

Elle se refuse aussi d'aborder la compétition comme s'il lui fallait à tout prix battre les Chinoises ou les autres.

«Le plongeon n'est pas un sport comme le tennis où il faut établir sa stratégie en fonction de battre son adversaire. Le plongeon, c'est une bataille contre soi-même. C'est celle qui est la plus proche de la perfection qui l'emporte.»

Même si elle est désireuse de compléter son diplôme en mode et design à l'UQAM d'ici deux ans, Heymans n'a pas encore pris la décision de prendre sa retraite du plongeon.

«Je vais compléter l'année et je verrai ensuite. Pour l'instant, je dirais qu'il y a de bonnes chances que je continue à plonger. Tant que j'ai du plaisir à le faire, je ne vois pas pourquoi j'arrêterais.»