Les médailles, c'est comme les autobus; tu en attends un pendant une éternité et, puis, il en arrive quatre d'un coup.

Au beau milieu d'une extraordinaire journée de sport qui a commencé par le finish dément de Michael Phelps dans le 100 m papillon, s'est poursuivie par le record du monde d'Usain Bolt au 100 m et s'est conclue, au bout de 24 heures, par la huitième médaille d'or de Phelps, le Canada est monté quatre fois sur le podium.

Une médaille d'or, une d'argent et deux de bronze. De quoi calmer un peu les angoisses d'une nation complexée par le zéro pointé de la première moitié des Jeux. De quoi, aussi, donner le ton à une deuxième semaine de compétition qui s'annonce beaucoup plus trépidante que la première pour le Canada.

On récapitule? La lutteuse Carol Huynh a gagné l'or chez les 48 kg en triomphant 3-1 de la Japonaise Chiharu Icho, double championne du monde. Une vingtaine de minutes plus tôt, au bassin olympique de Shunyi, le deux de pointe de Scott Frandsen et David Calder avait franchi la ligne d'arrivée en deuxième place. Et quelques minutes plus tard, Tonya Verbeek, médaillée d'argent à Athènes chez les 55 kg, a ajouté une médaille de bronze à sa collection. Le nageur Ryan Cochrane a complété le portrait en gagnant le bronze dans le 1500 m.

Il était sans doute approprié que la première médaille d'or canadienne à Pékin échoie à Huynh, fille de parents chinois ayant grandi au Vietnam avant d'arriver au Canada avec la vague des boat people des années 70.

«J'ai été la première de ma famille à naître au Canada. Mes parents ont toujours travaillé très fort pour soutenir notre famille et nous offrir une vie meilleure», a dit l'athlète de 27 ans, qui a remporté sa victoire devant toute sa famille, venue de Hazelton, en Colombie-Britannique.

Après s'être entraînée à Vancouver pendant huit ans, Huynh, qui avait raté sa qualification olympique en 2004, a déménagé à Calgary il y a deux ans.

«J'avais besoin de changer de perspective, d'avoir de nouveaux partenaires d'entraînement, d'être poussée différemment et de progresser davantage. Et ça a marché», a dit Huynh, qui a attribué sa médaille d'or au travail qu'elle a fait pour bâtir sa confiance.

Debout au centre de l'aire de combat après sa victoire, Huynh a semblé hésiter entre les larmes et un sourire incrédule, avant de sauter dans les bras de l'entraîneur Leigh Vierling, qui célébrait son 40e anniversaire de naissance.

On avait à peine eu le temps d'entendre l'Ô Canada résonner dans le bruyant gymnase de l'Université d'agriculture de Pékin que Tonya Verbeek faisait son entrée pour son match de médaille de bronze contre la Suédoise Ida-Theres Nerell, qu'elle a remporté 2-0.

«Entendre l'hymne national m'a affectée, mais je m'en suis servi comme motivation, a raconté l'Ontarienne. J'étais tellement contente pour Carol, mais je ne pouvais pas célébrer. Je devais me concentrer. Je me suis dit que mon tour viendrait six minutes plus tard.»

Après le combat, Verbeek avait l'air plus heureuse de sa médaille de bronze qu'elle ne l'avait été de celle d'argent à Athènes. «J'ai gagné un match pour gagner le bronze. C'est un sentiment différent que de perdre pour avoir l'argent», a-t-elle expliqué.

Un confrère a demandé à Verbeek si les insuccès canadiens depuis le début des Jeux lui avaient imposé une pression supplémentaire. Les téléspectateurs aussi prompts à se draper dans l'unifolié au début des Jeux qu'à le déchirer quand les athlètes canadiens ne remportent pas assez de médailles à leur goût gagneraient à méditer sa réponse.

«Nous voulons aussi que notre pays fasse bien, a-t-elle dit, mais la plupart d'entre nous sommes ici pour nous-mêmes et pour le dur travail que nous avons fait pendant de nombreuses années.»

Pendant ce temps, au bassin de Shunyi, l'heure de la rédemption avait sonné pour Scott Frandsen et David Calder, qui ont réglé de vieux comptes avec les Jeux olympiques. À Athènes, Frandsen faisait partie du huit masculin qui s'est écroulé et a fini cinquième, tandis que Calder avait été disqualifié en demi-finale du deux de pointe, sa rame ayant accidentellement atteint celle d'un autre concurrent.

Le duo est resté à égalité avec les Australiens Drew Ginn et Duncan Free jusqu'à la marque du kilomètre, avant de prendre un léger retard dans la seconde moitié de la course, qu'ils ont terminée avec un chrono de 6:39.55, à 2,11 secondes de l'embarcation australienne.

Les médaillés d'argent n'avaient pas trop envie d'épiloguer sur leurs déboires en terre grecque. «Athènes n'a eu aucun rôle à jouer aujourd'hui, a dit Calder, sorti de sa retraite pour épauler Frandsen. Nos souvenirs sont ici à Pékin. Qui sait, quatre années de plus pourraient nous rendre plus rapides.»