Les Jeux de Pékin devaient être le début de la rédemption, ils n'ont été que la poursuite du cauchemar pour Roger Federer, éliminé dès les quarts de finale par James Blake jeudi.

Quand la chute vertigineuse du futur ex-n°1 mondial s'arrêtera-t-elle? S'arrêtera-t-elle un jour? Semaine après semaine, ces questions reviennent avec plus d'insistance, interrogeant la place que va désormais occuper Roger Federer sur l'échelle du tennis.

Un des meilleurs joueurs de tous les temps, si ce n'est le meilleur, il l'est déjà. Douze victoires en Grand Chelem, quatre ans et demi de suite dans le fauteuil de N.1, des matches de légende à la pelle. Mais a-t-on désormais tout vu du Suisse dont on imagine mal comment il pourra, dans dix jours à l'US Open, conserver le dernier titre majeur qui lui reste?

«Il y sera un des favoris», a déclaré Blake. C'est-à-dire plus le seul et unique. Faute d'abord d'une confiance en soi qui l'a manifestement quitté. Depuis sa finale perdue à Wimbledon, il a joué sept matches et en a perdu trois, face à Gilles Simon, Ivo Karlovic et James Blake, des joueurs qu'il avait l'habitude d'écraser sans un regard. En craquant à chaque fois dans les moments chauds comme jeudi aux Jeux.

Son bilan de la saison est à l'avenant avec comme seuls trophées ceux, mineurs, d'Estoril et de Halle, deux finales à Roland-Garros et à Wimbledon et une demi-finale à l'Open d'Australie.

«Il faut quand même mettre les choses en perspective. Ce n'est pas exactement ce que j'appelle une mauvaise année, s'émeut Blake. Mais c'est comme pour Tiger Woods. On attend de lui qu'il gagne toutes les semaines». Federer lui-même disait en janvier: «J'ai créé un monstre».

«Tout le monde aurait craqué»

Une page va pourtant se tourner dès lundi prochain lorsque Rafael Nadal s'emparera du trône de n°1. À Pékin, Federer n'aurait rien pu faire pour l'empêcher. Mais il aurait au moins pu quitter ses fonctions avec prestance, en champion olympique.

Cela s'est passé différemment. La faute à James Blake bien sûr. L'Américain a bien joué lundi pour s'imposer 6-4, 7-6 de combat nocturne. Mais comment ne pas être interpellé par le fait qu'en cinq ans l'Américain avait tout juste réussi à chiper un set en huit rencontres avec Federer. Et que jeudi il en a gagné deux en un seul match.

Federer est-il usé par la pression quotidienne d'un statut à défendre? «Il faut quand même se rendre compte, dit Blake, qu'à chaque fois qu'il entre sur un court il ne joue pas seulement face au mec en face mais contre Pete Sampras, Björn Borg et toute l'histoire du jeu. Honnêtement, je ne sais pas comment il a fait pour gérer cette pression pendant quatre ans. Tout le monde aurait craqué.»

Ou est-ce que Federer qui en a simplement assez après des années monomaniaques à ne penser qu'au tennis matin, midi et soir? C'est possible. Mais à Pékin, il était visiblement motivé pour donner un peu de relief à sa saison, préférant l'hôtel au village olympique pour mettre toutes les chances de son côté.

«Je suis admiratif de la façon dont il a géré ces quatre dernières années, le défend toujours Blake. Il ne perd jamais le contrôle de lui-même. Vous ne le voyez jamais briser une raquette ou insulter un arbitre. Et il est toujours un des meilleurs joueurs au monde. Seulement, il est humain.»