Si Michael Phelps réussit son pari fou de remporter un nombre record de huit médailles d'or aux Jeux olympiques de Pékin, les livres d'histoire devraient inclure un petit astérisque avec la mention suivante: Jason Lezak a sauvé la mise grâce à une dernière longueur inimaginable dans le relais 4 X 100 m libre.

Dans une course folle marquée par une pluie de records, Lezak a permis aux États-Unis de devancer la France par un souffle, ce matin, au Centre national de natation de Pékin. Phelps conserve ainsi ses chances de battre le record de sept médailles d'or réalisé par Mark Spitz aux JO de Munich en 1972.

Ça s'est joué dans un mouchoir de poche. Lezak a touché le mur huit centièmes devant le Français Alain Bernard, ancien recordman mondial de la distance individuelle avant le début des JO.

Lorsque la victoire américaine a été confirmée, une fraction de seconde plus tard, Phelps a poussé un cri de joie et de rage où chaque fibre musculaire de son corps a été sollicitée.

«J'étais terriblement excité par la fin de course et je ne cessais de l'encourager (Lezak). Puis quand il est arrivé au mur, c'était tellement serré», a déclaré Phelps à NBC.

Le nageur de 23 ans décrochait ainsi sa deuxième médaille d'or après sa victoire de dimanche au 400 mètres quatre nages.

Grâce à un chrono de 3:08.24, les États-Unis ont amélioré de plus de quatre secondes leur référence mondiale établie lors des séries de la veille.

Phelps a évidemment remercié Lezak, qui a réalisé le 100 m lancé le plus rapide de l'histoire (46.06). «Nous devons cette médaille à Jason, qui a fourni un effort extraordinaire dans le dernier droit», a reconnu Phelps. «Nous venons de gagner en équipe. Une grande victoire, mais il me reste encore plusieurs courses.»

Grâce à un dernier échange avec Cullen Jones à la limite de la disqualification, Lezak a rogné 15 centièmes à l'avance des Français, les champions européens qui commençaient à rouler les mécaniques. «On a laissé parler nos performances, a commenté Phelps au sujet de ses rivaux de l'Hexagone. On n'a pas réagi. Ça nous a seulement gonflés à bloc.»

Dans une dernière longueur à faire dresser le poil sur les bras, Lezak a réussi l'exploit de refermer un écart de 82 centièmes sur Bernard qui venait tout juste d'être dépossédé de son record mondial individuel par l'Australien Eamon Sullivan. À titre de premier relayeur de l'Australie, ce dernier a en effet claqué un temps de 47.24, montrant le chemin à ses trois coéquipiers vers la troisième marche du podium.

Les Canadiens sixièmes

Sixièmes de cette course historique, les Canadiens Brent Hayden, Joel Greenshields, Colin Russell et Rick Say ont amélioré le record national grâce à un temps de 3:12.26. Parti premier en 47.56, Hayden a lui-même retranché près de trois quarts de seconde à sa marque canadienne. Il s'annonce ainsi comme un sérieux espoir au 100 m libre. Auteur du troisième temps des séries du 200 m libre, Hayden a décidé de se retirer des demi-finales présentées avant le relais. «J'ai sacrifié ma distance individuelle pour l'équipe», a expliqué le co-champion mondial du 100 m libre.

Alors que Say, dernier relayeur bataillait pour la cinquième place, Hayden a reconnu qu'il n'avait pu s'empêcher de tourner la tête pour suivre le duel France-États-Unis dans les couloirs centraux. Qui pourrait le blâmer.

Après cette dose d'émotions fortes, Phelps a quitté l'Aquacube pour une courte sieste avant de reprendre son marathon de 17 courses. Il participera ce matin (ce soir à Pékin) aux séries du 200 mètres papillon, sa spécialité.

Phelps tentera ensuite de refaire ses forces durant une courte nuit au Village des athlètes avant de repartir à la chasse aux huit pépites d'or dans le cadre de la finale du 200 m libre (22h13, heure du Québec). Lors des demi-finales qui précédaient le relais, le «super poisson» a gaspillé un minimum de cartouches pour enregistrer le quatrième temps. Aura-t-il rêvé à un autre record du monde?