Cela faisait huit mois que je n'étais pas venu à Pékin. Aussi bien dire une éternité.

Je ne vous apprendrai rien en vous disant que la capitale chinoise se métamorphose à la vitesse grand V. Hutongs rasés au profit de tours d'habitation et de commerces de luxe, lignes de métro qui se multiplient (trois nouvelles rien que cette année), splendeurs architecturales (certaines moins splendides que d'autres, il faut bien le dire) qui sortent de terre par dizaines: on n'arrête décidément pas le progrès à Pékin.

Je savais tout ça. N'empêche, je suis tombé sur le cul, la semaine dernière, quand, pour la première fois depuis mon arrivée, je suis allé me balader autour du Stade national, ce fameux Nid d'oiseau d'où les Jeux de la XXIXe olympiade ont pris leur envol, vendredi soir.

Je ne reconnaissais plus rien.

En décembre 2007, avec mon collègue Robert Skinner, je m'étais faufilé dans ce qui était alors un gigantesque chantier de construction. Robert avait pris de superbes photos de travailleurs migrants cassant la croûte, la tête coiffée du casque jaune réglementaire mais les pieds chaussés de gougounes, assis sur des tas de gravats dans le chaos du chantier entourant le stade de 91 000 places.

Aujourd'hui, toute trace de la joyeuse pagaille d'il y a huit mois a disparu. À l'ombre de l'armature de poutrelles d'acier du stade, un joli canal coule désormais, entre des aires gazonnées, d'élégantes esplanades pavées et des massifs de fleurs. Les palissades rouillées ont été démontées, les travailleurs migrants sont rentrés chez eux, ou plutôt y ont été renvoyés, et les dortoirs préfabriqués où ils vivaient entassés à 12 par chambre, en face du Cube d'eau, ont disparu sans laisser de trace, remplacés par de jolis parcs plantés d'arbres. La métamorphose est complète.