Stupeur et larmes: la Chine était en deuil lundi après le forfait de Liu Xiang, champion en titre du 110 m haies, aux JO de Pékin.

«Je suis terrassé. Je ne peux croire ce qui vient de se produire. C'est mon héros», lâche Sun Yejun, un employé de 30 ans, venu exprès au Stade Olympique.

«Pour moi les Jeux c'est fini, tout comme pour Liu Xiang», ajoute-t-il, alors que des rumeurs s'étaient propagées dans le «Nid d'oiseau», bien avant les séries éliminatoires.

Quelques secondes après que le champion olympique en titre du 110 m haies eut quitté la piste, les spectateurs restent incrédules. Hébétés.

Certains pleurent, inconsolables de ce rendez-vous raté de leur idole quatre ans après l'exploit d'Athènes.

En pleine conférence de presse, l'entraîneur de Liu, Sun Haiping, éclate en sanglots après avoir présenté ses excuses. Le champion est reclus.

Le mentor de Liu n'arrive pas à arrêter ses larmes, image symbole de la détresse d'un pays de 1,3 milliard d'habitants, qui avait placé tellement d'espoirs sur sa vedette. Peut-être trop...

«Je suis venu à Pékin exprès pour voir Liu Xiang. Nous l'adorons. Je suis plein de regrets. Je voulais le voir rayonner pour la gloire de la patrie. L'atmosphère était magique. C'est vraiment tragique», confie Fong Mantit, un sexagénaire résidant à Hong Kong.

«Quel dommage, j'espère qu'il pourra revenir à la compétition et battre des records», lance Xue Jie, une jeune fille qui a collé un drapeau chinois en forme de coeur sur sa joue. Elle n'a pas assisté à l'abandon, mais, à l'extérieur du stade, vient d'apprendre la nouvelle en compagnie de son ami.

A côté d'elle, des passants lancent des «Jiayou!» (Allez!).

Douleur, tragédie, cauchemar, les sites internet chinois -- étrangement remplis de publicités d'un Liu souriant -- sont également abattus, rompant avec l'allégresse de la veille, lorsque la Chine avait battu, à mi-parcours, son record de médailles d'or dans des JO.

Les espoirs déçus soulèvent de l'amertume. Certains internautes ne se privent pas de critiquer l'idole déchue.

«Ce n'est pas une course qu'il a perdue, c'est sa vie», s'emporte un internaute du Jiangsu (est), qui reproche à Liu de ne pas s'être battu jusqu'au bout.

«Regardez Yao Ming, il a à peine enlevé le bandage qu'il se met à l'entraînement, il s'est à peine remis de sa blessure qu'il emmène la Chine face à l'Espagne», poursuit-il, ajoutant: «C'est un vrai héros. Mais Liu Xiang! Après sa victoire aux jeux, il a tout eu, l'argent, la gloire, mais il n'a pas répondu aux attentes du peuple».

Des journaux officiels avaient préparé le terrain ces derniers jours. Et si Liu Xiang perdait?

La télévision nationale, elle, avait déjà prévu tout un dispositif pour sa victoire annoncée jeudi, avec voiture rapide pour l'emporter au studio et hélicoptère. Le rêve s'est envolé et lundi elle s'est contentée d'annoncer dans son journal de la mi-journée le retrait du sportif pour blessure, sans plus.