«La WTA devra trouver un moyen de protéger ses athlètes. Il y a beaucoup trop de tournois et la compétition est devenue tellement forte que les joueuses ne respirent plus. À l'époque, les blessures et la fatigue affectaient surtout les athlètes dans la fin vingtaine. Aujourd'hui, même les adolescentes en souffrent. C'est inquiétant.»

Cette citation n'a pas été entendue hier, ni la semaine dernière. Elle remonte à 2001, alors que Monica Seles avait lancé un signal d'alarme devant le nombre inquiétant de blessures sur le circuit féminin.

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Sept ans plus tard, les choses n'ont guère changé. La grande vedette Maria Sharapova a déçu bien des amateurs de tennis mercredi à la Coupe Rogers en déclarant forfait après son éreintant match de trois heures qui a hypothéqué son épaule.

Hier, sur son site Internet, la Russe a d'ailleurs annoncé qu'elle ne participerait pas aux Jeux olympiques de Pékin. «Les médecins ont trouvé deux petites déchirures sur le tendon de mon épaule, écrit-elle. Il faut du temps pour guérir. Le timing est vraiment malheureux et ça m'attriste beaucoup.»

Serena et Venus Williams soignent des blessures au genou; Amélie Mauresmo est éloignée des courts depuis Wimbledon; Daniela Hantuchova a une blessure de stress au pied droit; Tatiana Golovin est blessée au dos; Lindsay Davenport au genou...

Doit-on rappeler aussi que deux des plus grandes joueuses de l'histoire récente, Justine Henin et Kim Clijsters, se sont retirées du circuit avant même d'avoir 26 ans?

On dit que la restructuration du circuit de la WTA, qui entrera en vigueur dès 2009, pourrait contribuer à diminuer le nombre de blessures puisque le nombre de tournois obligatoires sera réduit.

Mais pour l'entraîneur national en préparation physique André Parent, embauché à temps plein par Tennis Canada en septembre 2007, il y a plus à faire.

«C'est sûr que le tennis féminin a changé au fil des ans à cause de l'intensité du jeu, les déplacements, la force de frappe et surtout les changements de direction, confiait-il hier après-midi. En plus, les programmes de préparation physique pour optimiser les performances viennent s'ajouter à la charge de travail sur les courts. Il y a cependant un volet important qui n'est peut-être pas assez exploité et c'est la prévention des blessures. Les filles ont des routines à exécuter sur une base quotidienne pour aider justement à mieux récupérer mais je me demande à quel point toutes les joueuses sont impliquées dans leur programme.»

Il y a toutefois certaines exceptions. «Jill Craybas n'est pas au niveau d'une Jankovic, mais elle est dans une forme exemplaire, note Parent. Que dire d'Ai Sugiyama. C'est une grande dame du tennis. Elle a 33 ans et elle se maintient dans le top 40, parfois le top 20. Et elle arrive à disputer 24 tournois par année alors que d'autres participent à moins de 15. Ça ne veut pas dire, cependant, qu'elles sont à l'abri des blessures. Je ne dis pas qu'Amélie Mauresmo est blessée parce qu'elle ne respecte pas bien son programme d'entraînement.»

André Parent estime également que certaines joueuses et leur entourage auraient intérêt à mieux planifier leur participation aux tournois. «Martina Navratilova, qui était une pro du conditionnement physique, affirmait qu'elle était incapable de bien jouer après trois semaines consécutives de tournois. Imaginez alors les autres qui disputent quatre tournois de suite.»

Notre homme a vu sa charge de travail augmenter après l'arrivée à Tennis Canada des entraîneurs de réputation internationale Bob Brett et Louis Borfiga. «Ils savaient que nous étions en retard à ce chapitre parce que ce n'est pas dans notre culture tennistique et ils laissent beaucoup de place pour la préparation physique, mentionne Parent. Borg, dans les années 70, était déjà en avance sur ses rivaux dans ce domaine, tout comme les Australien dans les années 60.»

Parent note que la préparation physique est encore plus cruciale pour les femmes puisque les hommes sont plus résistants sur le plan physiologique. «On essaie de suivre les filles sur une base plus individuelle. Il faut être plus vigilant. Prenons l'exemple de Stéphanie Dubois. Son style, c'est de courir les balles. Elle a dû faire trois kilomètres mercredi contre Kirilenko. Si elle n'était pas en forme, sa carrière durerait quoi, trois ans? On essaie de bien équilibrer ses entraînements, de suivre ses petites blessures, comme son inconfort au dos, et de lui permettre de récupérer quand il faut. À notre grand bonheur, on ne voit pas souvent Stéphanie ou Aleksandra (Wozniak) abandonner un match.»

Les conseils d'André Parent auraient intérêt à être entendus. Reparlons-nous dans sept ans pour constater si les choses ont vraiment changé sur le circuit féminin de la WTA