Des chercheurs montréalais de l'hôpital Shriners ont trouvé une molécule qui manque chez les gens dont les fractures guérissent mal. C'est 10 % de toutes les fractures, soit 25 000 patients par année au Québec.

L'ÉTUDE

Une molécule dérivée de la vitamine D joue un rôle crucial dans la guérison des fractures, selon une étude montréalaise. « On savait que la vitamine D en général joue un rôle dans la santé des os, mais nous avons démontré qu'un produit de la dégradation est important spécifiquement pour la réparation des fractures », explique René St-Arnaud, directeur de la recherche au Shriners, qui est l'auteur principal de l'étude publiée à la fin de juillet dans le Journal of Clinical Investigation. Ce métabolite de la vitamine D se combine avec une autre molécule pour former un troisième composé, appelé « lactosylcéramide », impliqué dans la formation d'une couche protectrice autour des fractures. Les chercheurs ont observé le processus chez l'animal. Deuxième preuve, ils ont vu dans une base de données de patients dont les fractures guérissent mal des particularités génétiques liées à un problème de production de ce sous-produit de la vitamine D.

TESTER UN MÉDICAMENT

Le physiologiste spécialiste de génétique estime que cette découverte pourrait déboucher relativement rapidement sur un traitement. « Le sous-produit de la vitamine D est une molécule naturelle, dit M. St-Arnaud. Ça devrait accélérer la mise en place d'une étude clinique pour voir s'il aide à la réparation des fractures chez les patients dont les os se réparent mal. Après, l'approbation aussi devrait être plus facile. » Il estime que d'ici trois à cinq ans, la preuve de l'efficacité de cette molécule devrait être faite, si l'étude clinique est positive.

EN CHIFFRES

• 40 %: Proportion des fractures qui surviennent à la maison

• 35 %: Proportion des fractures qui nécessitent une visite à une clinique ou aux urgences

• 10 %: Proportion des fractures qui nécessitent une hospitalisation

• 11 %: Augmentation de l'incidence des fractures aux États-Unis de 1990 à 2010

• 20 %: Proportion des fractures qui sont liées à l'ostéoporose et aux problèmes d'équilibre reliés à l'âge

Sources : CDC, Journal of Bone and Mineral Research

L'AMPLEUR DU PROBLÈME

Environ 10 % des 10 millions de fractures qui surviennent chaque année aux États-Unis guérissent mal, selon M. St-Arnaud, qui enseigne aussi à l'Université McGill. « C'est un nombre élevé de patients, un traitement aurait des impacts importants. Les patients dont les os guérissent mal ont une mauvaise qualité de vie, manquent plus de travail et peuvent avoir des séquelles. » Transposés au Québec, ces chiffres signifient que 25 000 patients ont chaque année des fractures qui guérissent mal. Une maladie génétique, surnommée la « maladie des os de verre », qui touche une personne sur 15 000, pourrait aussi bénéficier de cette avancée.

L'HISTOIRE DES SHRINERS

Fondés aux États-Unis à la fin du XIXe siècle par des amateurs d'orientalisme, les Shriners ont fondé un réseau d'hôpitaux voués à l'orthopédie pédiatrique à partir des années 80. Celui de Montréal est le seul parmi les 22 hôpitaux Shriners qui est au Canada. Construit en 1922 près de l'Hôpital général, il a déménagé en 2015 sur le campus du nouveau Centre universitaire de santé McGill, dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce. Un déménagement en Ontario avait été envisagé.