L'hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR) annoncera aujourd'hui la création d'une chaire de recherche appliquée en greffe de cellules souches, mise sur pied grâce aux efforts philanthropiques d'un ancien patient qui a survécu au cancer.

Il y a 10 ans, jour pour jour aujourd'hui, William Brock vivait son «jour Zéro». Après des mois de chimiothérapie pour vaincre une leucémie aiguë, le réputé avocat montréalais recevait une transplantation de moelle osseuse grâce à un don de son frère. «Les médecins appellent ça le «jour Zéro», mais en réalité, c'était vraiment comme le premier jour de ma seconde vie», explique-t-il.

Cet anniversaire sera marqué aujourd'hui par la création d'une nouvelle chaire en collaboration avec l'Université de Montréal. Elle servira à faire le pont entre la recherche fondamentale et les patients greffés. Deux millions de dollars sur les trois nécessaires sont déjà en banque. Le but à long terme: en amasser cinq.

«Il y a 60 ans, le taux de mortalité de la leucémie était de 100%. Aujourd'hui, 90% des enfants et près de 50% des adultes survivent. Si je suis là aujourd'hui, c'est parce qu'il y a des gens avant moi qui ont donné. Et avec le travail qui est fait par plusieurs, comme l'équipe de Maisonneuve-Rosemont, peut-être qu'un jour, le taux de survie sera de 100%», espère-t-il.

Lorsque son verdict de leucémie est tombé, le 21 septembre 2004, William Brock a cru que c'était la fin. Son père avait reçu exactement le même diagnostic sept ans plus tôt. Il est mort de complications six semaines plus tard.

«Après mon diagnostic, je me voyais comme un litre de lait avec une date d'expiration: le 1er novembre 2004. Je croyais que j'allais subir le même sort que mon père», se rappelle-t-il. À l'époque, William Brock avait 49 ans. Ses enfants étaient âgés de 9 et 11 ans.

Maisonneuve-Rosemont, un «trésor caché»

Voulant survivre à tout prix, il se met à chercher le meilleur centre de santé aux États-Unis. Mais un hôpital ne cesse d'être recommandé: Maisonneuve-Rosemont. «Je me suis rendu compte que c'était un trésor caché», dit-il.

Maisonneuve-Rosemont est situé dans l'est de Montréal, le secteur de l'île où la population est la plus vieillissante, la plus pauvre et où on dénombre le plus de cas de cancer. Et lorsque l'on pense philanthropie, ce n'est certainement pas le premier nom qui vient en tête.

«Initialement, j'ai été traité à l'Hôpital juif et je suis proche de plusieurs personnes de cet hôpital, mais j'aime blaguer que si vous rentrez dans les toilettes du Jewish, même le robinet d'eau chaude porte le nom d'un donateur! À HMR, les pavillons portent le nom de soeurs décédées il y a 150 ans. C'est bien, mais ça montre à quel point le fossé est immense. C'était important pour moi de leur donner mon appui.»

William Brock a fait plusieurs activités de financement au cours des dernières années, dont une randonnée à vélo en Europe et la publication du livre Portraits d'espoir. Ses efforts ont déjà permis de financer un programme de formation d'étudiants en stage.

Du labo au patient

Le Dr Jean Roy se souvient du jour où il a rencontré Me Brock, lors d'une tournée de garde. «Il m'a dit: «Quand je vais sortir d'ici, je vais vous aider.» Je lui ai répondu: «Ce qui nous aiderait le plus, c'est de trouver un million», et il a dit: «OK, pas de problème!» »

«Un patient comme lui, on voit ça une fois dans une vie de médecin», ajoute-t-il.

Le Dr Roy, qui fait partie d'une équipe de 24 hémato-oncologues, explique que la chaire de recherche servira à assurer une continuité entre les découvertes scientifiques et la médecine sur le terrain. Il cite en exemple la récente découverte par son collègue Guy Sauvageau de la molécule UM 171, qui permet de multiplier le nombre de cellules souches contenues dans le sang des cordons ombilicaux. Le protocole d'essai sur les humains devrait débuter dans quelques semaines.

«La chaire va permettre de créer une infrastructure de recherche avec du personnel hautement qualifié. Elle va nous permettre d'étudier le devenir des patients greffés, pour voir où l'on doit intervenir pour faire mieux, et de trouver pourquoi ils rechutent», explique le Dr Roy.

La chaire de recherche portera le nom du philanthrope et de sa femme, Maryse, qui l'a appuyé à travers son épreuve. «Si je parlais à quelqu'un qui avait le cancer aujourd'hui, je lui dirais que c'est une expérience très difficile, mais ça peut aussi être un cadeau. Avec le recul, vous allez vous rendre compte que vous êtes devenu une personne meilleure et plus forte.»