La plus récente génération de pilules contraceptives pourrait avoir des effets plus nocifs sur la santé que les générations précédentes. En outre, des spécialistes de la santé remettent en question les bienfaits supplémentaires qu'offriraient ces pilules.

Un reportage de la chaîne CBC a récemment fait état du fait que plusieurs adolescentes canadiennes ont souffert de conséquences graves, allant jusqu'à la mort, après avoir pris ces contraceptifs oraux, qui sont les plus prescrits au Canada.

Les contraceptifs en cause, Yasmine et Yaz, sont produits par la société Bayer. Ils contiennent une hormone appelée drospirénone, qui aurait l'avantage de réduire l'acné et les ballonnements associés au syndrome prémenstruel, selon Bayer. Sur le marché depuis 2001, cette hormone se trouve aussi dans le traitement pour femmes ménopausées Angeliq, un autre produit de Bayer. Des versions génériques de ces médicaments existent depuis peu aux États-Unis.

Tous les contraceptifs oraux accroissent les risques de souffrir de problèmes de santé - accidents vasculaires cérébraux, calculs rénaux, crises cardiaques ou maladies de la vésicule biliaire. Les plus récentes études, publiées en 2009, soutiennent que la drospirénone accroît aussi le risque de thrombose veineuse, c'est-à-dire la formation de caillots de sang dans les veines. Ce risque serait jusqu'à deux fois plus élevé qu'avec d'autres contraceptifs oraux. Les pilules Yasmine et Yaz accroissent aussi le risque de souffrir d'hyperkaliémie, un excès de potassium dans le sang, ce que reconnaît Bayer.

Les récentes études indiquent que les contraceptifs les moins dangereux sont à base de lévonorgestrel, une hormone qui se retrouve notamment dans les pilules de marque Alesse, Seasonale et le contraceptif d'urgence Plan B.

Auteur de l'une des études en question, le Dr Frits Rosendaal, du Leiden University Medical Center, aux Pays-Bas, a affirmé à La Presse qu'il n'est pas prouvé que la drospirénone a des bienfaits supérieurs aux autres hormones, malgré ce qu'affirme le fabricant. Il soutient que toutes les pilules sur le marché ont des bienfaits comparables.

Scepticisme chez les gynécologues

Certains spécialistes doutent de la validité de ces études, pointant des failles dans la méthodologie. L'un d'eux est Robert Reid, professeur d'obstétrique-gynécologie à l'Université Queens, en Ontario. Il explique que les risques de thrombose veineuse sont plus importants durant la première année d'utilisation du contraceptif, quelle qu'en soit la marque. Selon lui, ces études n'ont pas tenu compte de ce facteur, ce qui a pu fausser les résultats. Il a indiqué que deux autres études, menées par Bayer pour obtenir l'approbation des contraceptifs, seraient plus rigoureuses et démontrent que le risque de thrombose n'est pas plus élevé avec la drospirénone qu'avec d'autres hormones. Les porte-paroles de Bayer Canada affirment que la Société des obstétriciens-gynécologues du Canada partage cet avis.

La Dre Violaine Marcoux, obstétricienne-gynécologue à l'Hôpital général juif de Montréal, croit pour sa part que les médecins signalent les complications plus souvent qu'auparavant, ce qui donne l'impression que les problèmes de santé sont plus fréquents avec les nouvelles générations de pilules. Elle est également d'avis que la majorité des pilules sont «interchangeables». Selon elle, toutes les pilules sont efficaces contre l'acné et les symptômes prémenstruels, et leurs risques sont comparables, bien que certaines utilisatrices ressentent plus d'effets secondaires avec une marque plutôt qu'une autre. Elle mentionne que c'est surtout la quantité d'oestrogène qui accroît le risque de thrombose. «On tend à prescrire la plus petite dose d'oestrogène possible», explique-t-elle.

Nouvelle étude à venir

Malgré tout, une nouvelle étude, qui devrait être publiée sous peu, pourrait confirmer les risques associés à la drospirénone. L'auteure, la Dre Susan Jick, professeure d'épidémiologie à l'Université de Boston, reconnaît les failles des études précédentes, mais elle vient d'arriver aux mêmes conclusions. Elle ne peut divulguer les détails de son étude avant sa publication, mais elle a déclaré à La Presse que ses résultats démontrent que le risque de thrombose est bel et bien plus élevé avec les pilules Yasmin et Yaz.

En mars 2010, des Canadiennes ont intenté un recours collectif contre Bayer, qu'elles accusent de ne pas les avoir informées de tous les risques des contraceptifs Yasmin et Yaz. La poursuite est en attente d'autorisation. Un recours collectif a aussi été intenté aux États-Unis en 2009.

Les contraceptifs Yasmin et Yaz ont été approuvés par Santé Canada respectivement en 2004 et en 2008. En date du 31 octobre 2010, Santé Canada avait reçu 178 signalements d'effets indésirables associés à Yasmin et 93 pour Yaz. Santé Canada a indiqué que «des enquêtes scientifiques supplémentaires sont nécessaires pour établir une relation de cause à effet.»