L'hypertension artérielle n'est pas seulement mauvaise pour le coeur, elle peut également favoriser l'apparition de cas de démence et d'Alzheimer, selon de nouvelles études scientifiques américaines.

Ces travaux révèlent que les cerveaux des patients souffrant d'hypertension -une tension artérielle égale ou supérieure à 14/9- présentent des lésions susceptibles de provoquer ultérieurement la maladie d'Alzheimer et d'autres formes de démence.

Ces lésions affectent la substance blanche du cerveau qui, grâce à son système de fibres nerveuses (axones), permet aux cellules du cerveau de communiquer entre elles. Même une pression artérielle légèrement élevée peut provoquer des dégâts dans les petits vaisseaux sanguins qui alimentent cette substance, interrompant les signaux.

«C'est une maladie silencieuse du cerveau», explique le Dr. Lewis Kuller de l'université de Pittsburgh. «Ca évolue avec le temps et a de très graves conséquences», ajoute-t-il. Ces lésions peuvent en effet apparaître à l'âge adulte, des dizaines d'années avant que n'apparaissent les premiers troubles de la mémoire.

Si l'âge demeure le premier facteur de risque dans la maladie d'Alzheimer et les autres formes de démences affectant environ une personne sur huit de plus de 65 ans aux États-Unis, d'autres facteurs interviennent.

Les scientifiques ont depuis longtemps noté que les facteurs déclencheurs des maladies du coeur -hypertension artérielle, obésité, diabète- semblent également augmenter les risques de démence. Et des facteurs tels que l'hypertension, affaiblissant les artères, pourraient également jouer dans l'évolution de la maladie d'Alzheimer.

«Parmi les choses que nous pouvons prévenir et qui amènent à une dégénérescence cognitive chez les personnes âgées, l'hypertension est en tête de liste», a déclaré à l'Associated Press le Dr. Walter Koroshetz, directeur adjoint de l'Institut national des désordres neurologiques et attaques cérébrales au NIH (Instituts nationaux de la santé).

Parmi les études les plus probantes figure celle de l'Initiative pour la Santé des femmes publiée le mois dernier par le Journal of Clinical Hypertension. Des examens IRM, pratiqués sur 1403 femmes de 65 ans et plus atteintes d'hypertension pendant huit ans, ont révélé que ces femmes présentaient d'autant plus de lésions cérébrales que leur pression artérielle était forte.

Des résultats similaires ont été constatés dans une étude réalisée sur 983 personnes pendant 15 ans par l'université Johns Hopkins et publiée récemment dans le magazine Stroke.

Ces recherches ont amené le NIH à entamer, dans les prochains mois, une étude sur 7500 patients âgés de 55 ans et plus souffrant d'hypertension. L'étude vise à établir si un traitement consistant à abaisser la tension au-dessous de 12 peut se révéler bénéfique sans provoquer des effets secondaires comme des chutes ou vertiges.

L'hypertension à elle seule ne condamne pas ceux qui en souffrent -près d'un adulte sur trois aux États-Unis à la démence. Par contre, elle demeure la cause principale des attaques cardiaques, des congestions cérébrales et des insuffisances rénales.

Et quand les deux sont liés, le traitement contre l'hypertension offre quelques espoirs, bien que ses effets n'aient pas été avérés dans l'ensemble des études scientifiques.

Alors que les cas de démence se multiplient au rythme du vieillissement de la population, le moindre effet positif généré par un meilleur contrôle de la pression artérielle pourrait avoir un large impact sur la santé publique, commente le Dr. William Thies de l'Association Alzheimer.

D'autres tentatives pour prévenir la démence, tels que la suppression des plaques d'amyloïdes dans le cerveau des patients atteints d'Alzheimer, ont pour le moment échoué alors que le contrôle de l'hypertension a peu d'effets secondaires, remarque le Dr. Kuller de l'université de Pittsburgh.

«En attendant le jour où je pourrais vous dire comment vous débarrasser de vos plaques d'amyloïdes dans le cerveau, faites attention à votre pression artérielle», conseille-t-il.