Des chercheurs américains ont créé en laboratoire le plus petit génome viable existant dans la nature, contenant le nombre minimum de gènes indispensables pour qu'un organisme fonctionne et s'autoreproduise, une nouvelle avancée dans la quête pour percer les mystères de la création de la vie.

Le génome synthétique de ce microbe baptisé Syn 3.0, ne compte que 473 gènes. Par comparaison un être humain en compte environ 20 000, et une fleur japonaise, appelée Paris japonica, qui a le plus grand génome connu, en a cinquante fois.

L'équipe qui a réussi cet exploit est dirigée par Craig Venter, le pionnier du séquençage de l'ADN qui a aussi créé le premier organisme contrôlé par un génome synthétique en 2010.

Les chercheurs qui sont parvenus à produire ce génome a minima n'ont pas encore pu déterminer les fonctions de 149 de ces 473 gènes, soit un tiers du total, expliquent-ils dans leurs travaux publiés jeudi dans la revue américaine Science.

La création de cette cellule dotée seulement des gènes indispensables pour que la vie existe dans sa forme la plus élémentaire pourrait aider à comprendre la fonction de chacun des gènes absolument essentiels pour le vivant, estiment ces biologistes.

«La meilleure façon de comprendre la vie c'est de créer le génome le plus simple», a expliqué Craig Venter lors d'une conférence de presse téléphonique. «Si on ne comprend pas comment vole un Boeing 777, on retire des pièces une à une jusqu'à ce que l'avion ne puisse plus voler».

C'est ce principe que le scientifique et son équipe, dont notamment Clyde Hutchison, ont utilisé avec le génome d'une bactérie mycoplasma connue pour posséder les plus petits génomes parmi toutes les cellules vivantes capables de s'autoreproduire.

Ils ont créé des génomes hypothétiques minimalistes dans huit différents segments pour tester et déterminer les gènes essentiels et ceux qui ne le sont pas.

Une étape importante

Au cours de ce processus, les chercheurs ont également cherché à identifier les gènes dits «quasi essentiels», nécessaires pour assurer une croissance robuste du micro-organisme, mais qui ne sont pas indispensables à la vie.

Pour tester ces différents gènes, les scientifiques ont inséré des séquences génétiques étrangères pour perturber leurs fonctions et déterminer ainsi lesquels étaient nécessaires pour la vie de la bactérie.

Ils ont répété cette expérience jusqu'à ce qu'ils obtiennent le plus petit génome capable de fonctionner.

Leurs travaux ont aussi révélé que certains gènes, initialement classés comme «non essentiels», effectuent certaines fonctions qui s'avèrent finalement indispensables et doivent être maintenus dans le génome pour la vie.

Ce génome réduit à sa plus simple expression ne compte aucun gène permettant de modifier et de restreindre l'ADN. La plupart des gènes nécessaires à la production des lipoprotéines sont également absents.

Mais quasiment tous les gènes nécessaires à la lecture et à l'expression des informations génétiques du génome ainsi que ceux préservant ces informations et leur transmission entre générations, sont également retenus dans ce génome.

Un grand nombre de ces gènes ont été trouvés dans plusieurs autres organismes, ce qui laisse penser qu'ils pourraient coder des protéines universelles dont les fonctions restent à définir, relèvent ces chercheurs.

La création de ce génome artificiel a minima est vue comme une avancée significative par d'autres scientifiques.

«C'est une étape importante dans la création d'une cellule vivante dont le génome est entièrement défini», estime ainsi Chris Voigt, un biologiste du Massachusetts Institute of Technology (MIT) à Cambridge.

Mais, ajoute ce scientifique, il reste encore à définir le rôle de ces 149 gènes de Syn 3.0 qui demeurent inconnus et qui promettent d'apporter de nouvelles informations sur les fondements biologiques de la vie.

Craig Venter est le fondateur de l'Institut portant son nom (J. Craig Venter Institute) à Rockville, dans le Maryland, et de Synthetic Genomics, une firme de biotechnologie située à San Diego en Californie.