Du 6 au 8 novembre, Montréal accueille le 11e congrès de la série «Gender Summit», le premier événement du genre organisé au Canada.

Plus de 600 chercheurs sont attendus à l'hôtel Sheraton pour trois jours de conférences et de débats sur divers enjeux entourant l'égalité des sexes dans le domaine des sciences.

Pour la toute première fois, le congrès abordera aussi la discrimination sur l'orientation sexuelle dans la recherche scientifique.

Depuis 2011, ces conférences internationales rassemblent des centaines de chercheurs qui tentent de faire progresser l'égalité des genres dans la recherche et l'innovation.

Le thème de l'événement montréalais est «Adopter le pluralisme et prospérer grâce à la diversité: façonner les sciences et l'innovation». L'événement est organisé par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et le Fonds de recherche du Québec.

Maryse Lassonde, directrice scientifique du Fonds de recherche du Québec et coorganisatrice du congrès, souhaite d'ailleurs que le Canada puisse adopter, cette semaine, la charte Athena Swan sur l'égalité des sexes dans les institutions universitaires.

Cette charte élaborée en Grande-Bretagne attribue des niveaux bronze, argent ou or aux institutions universitaires selon l'évaluation de leurs politiques d'inclusion.

«Les institutions peuvent même perdre leur financement si elles n'obtiennent pas au moins le niveau bronze», précise madame Lassonde.

Cette charte aurait déjà été adoptée en Australie et serait sur le point d'être appliquée aux États-Unis.

«On aimerait annoncer que le Canada va se joindre au programme à la fin de notre rencontre», a révélé la coorganisatrice.

L'autre coorganisateur du congrès et directeur de programmes au Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), Serge Villemure, prévient que la démarche se trouve encore à un stade préliminaire.

Il souhaite cependant que la version canadienne s'aligne sur les groupes visés par la loi en matière d'emploi, soit les femmes, les minorités visibles, les Autochtones et les gens avec des problèmes de mobilité.

Discrimination sexuelle

Maryse Lassonde et Serge Villemure ont participé à de nombreux événements «Gender Summit» à travers le monde et Mme Lassonde tenait absolument à ce que le congrès se déplace à Montréal dans le cadre du 150e anniversaire du Canada et du 375e anniversaire de Montréal.

«Cela m'a éveillée à toutes les injustices et les biais qui existent toujours concernant les femmes en sciences», confie-t-elle.

Au sein même du Fonds de recherche du Québec qu'elle dirige, elle a pu constater le déséquilibre évident entre les genres.

«Ce que je finance, ce sont des chercheuses et des chercheurs dans le domaine des STIM (sciences, technologies, ingénierie, mathématiques). Dans mon fonds, il n'y a que 20 % de femmes qui font des demandes», observe la directrice.

Selon elle, cette discrimination prend racine dans «les modèles masculins qui marquent l'inconscient collectif».

«L'image du scientifique dans les STIM, c'est un homme blanc ou asiatique et hétérosexuel», fait remarquer Mme Lassonde.

C'est pour cette raison que Montréal a choisi d'inclure l'orientation sexuelle dans les sujets de discussion de son congrès. «On veut étendre la thématique à des groupes beaucoup plus larges», note Serge Villemure.

«Beaucoup de gens ne veulent pas dévoiler leur orientation de peur d'être rejetés. Ils ont exactement le même problème que celui des femmes dans un milieu très homogène. On veut promouvoir la diversité pour qu'il n'y ait plus ce modèle dominant», dénonce Maryse Lassonde.

Dès la petite école

Si seulement neuf pour cent des postes de professeur titulaire dans les universités canadiennes sont occupés par des femmes, c'est d'abord parce que la discrimination commence à la petite école, croit Maryse Lassonde.

«Au primaire, les garçons et les filles aiment autant les mathématiques, mais au secondaire, il y a une démarcation qui commence à se faire. Les filles délaissent les sciences parce qu'elles se sentent mises de côté ou stéréotypées», estime-t-elle.

L'absence de modèles féminins serait l'un des facteurs et il s'expliquerait... par une discrimination à l'embauche. «Une forme de préjugé inconscient à l'embauche des professeurs» qui favorise les hommes.

Bien qu'il observe des progrès sur le terrain, Serge Villemure s'attend à ce que le changement de culture prenne du temps.

«Il faut aller à l'encontre de ce qui nous a été véhiculé tout au long de notre développement depuis qu'on est jeune», affirme M. Villemure.