Un petit groupe de chercheurs ontariens croit qu'il a peut-être élucidé le mystère de la vie.

Les résultats proviennent des premières expériences réalisées dans un simulateur de planète du nouveau laboratoire « Origins of Life » de l'Université McMaster, qui a commencé à fonctionner cet été.

Le simulateur - la pièce maîtresse de l'installation - teste une théorie selon laquelle la vie sur Terre est apparue dans de petits étangs chauds éclaboussés par des météorites il y a environ quatre milliards d'années. La machine recrée ces conditions pour voir si la vie cellulaire peut être créée, puis évoluer.

« C'est un très grand moment, a déclaré Maikel Rheinstadter, un professeur de biophysique et le chercheur principal du nouveau laboratoire. Il n'y a rien de comparable à cette machine dans le monde. »

La théorie des petits étangs chauds a été présentée pour la première fois par Charles Darwin, puis développée par Carl Sagan dans les années 1990, et développée encore davantage par David Deamer, un professeur de bio-ingénierie à l'Université de Californie à Santa Cruz.

Les preuves au cours des dernières années vont à l'encontre d'une autre théorie qui suggère que les éléments constitutifs de la vie ont été créés grâce aux évents de la croûte terrestre au fond de l'océan.

M. Rheinstadter et deux de ses collègues - l'astrophysicien théorique Ralph Pudritz et le biochimiste Yingfu Li - mettent actuellement cette théorie à l'épreuve.

« Nous sommes très intéressés de comprendre comment la première cellule très basique s'est formée sur la Terre primitive il y a quatre milliards d'années, a expliqué M. Rheinstadter. Personne ne le sait, mais je pense que c'est ce que nous avons : une proposition très solide disant que c'est potentiellement le mécanisme. »

Les travaux du laboratoire n'en sont qu'à leurs débuts et les résultats récents du simulateur de planète doivent être répliqués, a prévenu M. Rheinstadter, mais ce que les chercheurs ont vu jusqu'à présent est prometteur.

Le nouveau simulateur de planète au coeur de leurs efforts a à peu près la taille d'un micro-ondes et peut contrôler la température, l'humidité, la pression, l'atmosphère et les niveaux de rayonnement pour reproduire les conditions de la Terre à n'importe quel moment de son histoire. L'appareil peut aussi reproduire les conditions de n'importe quelle autre planète.

Il a fallu des années pour construire la machine - la plupart des entreprises ont simplement déclaré ne pas pouvoir le faire - mais une entreprise de Kitchener, en Ontario, a été en mesure de prendre en charge le projet, a dit M. Rheinstadter.

Lorsque la machine était opérationnelle, les chercheurs l'utilisaient pour imiter une saison estivale au début de la Terre - un environnement volcanique très chaud le jour et frais la nuit, avec quelques jours de pluie et d'inondations périodiques.

Des éléments de la « soupe primordiale » qui existait à l'époque, comprenant des sels inorganiques, des argiles, des molécules lipidiques et des nucléotides à différentes concentrations, se trouvaient à l'intérieur de la chambre du simulateur, a expliqué M. Rheinstadter.

Les chercheurs ont soumis la machine à plusieurs semaines de cycles secs-humides, qui entraînent des réactions biochimiques, des saisons entières étant répliquées en quelques jours. Après un certain temps, ils ont commencé à voir des résultats.

« Les molécules ont commencé à former des structures ressemblant à des cellules et à incorporer du matériel génétique par elles-mêmes, a révélé M. Rheinstadter. C'est incroyable. »

Les chercheurs estiment avoir prouvé qu'ils pouvaient créer ce que l'on appelle des protocellules, qui ne sont pas considérées comme vivantes, car les scientifiques doivent encore démontrer que le matériel génétique des cellules peut se répliquer et créer des protéines. Mais les résultats sont quand même significatifs, ont-ils estimé.

Les développements dans le laboratoire surviennent après que M. Purditz et son étudiant Ben K. D. Pearce eurent calculé, l'an dernier, que des météorites avaient bombardé la Terre et fourni les éléments constitutifs de la vie qui se sont ensuite liés pour devenir de l'acide ribonucléique - la base du code génétique. C'est cette même recherche que l'équipe de McMaster est en train de tester.

« C'est une période très excitante », a avoué M. Pudritz.

Il a fallu des années pour que le laboratoire et son simulateur soient opérationnels.

En 2012, M. Rheinstadter ainsi que MM. Pudritz et Li ont demandé à la Fondation canadienne pour l'innovation, une association à but non lucratif indépendante, de financer leurs recherches.

La proposition de l'équipe de creuser les origines de la vie arriva au bon moment. Peu après, la NASA commença à signaler une multitude de découvertes d'exoplanètes sur lesquelles des conditions favorables à la vie pourraient exister. L'intérêt du public pour le sujet a augmenté et la demande de fonds de l'équipe pour construire le simulateur a été approuvée.

Le laboratoire d'un million de dollars a également reçu un financement du gouvernement provincial et de McMaster, a dit M. Rheinstadter.

« Nous sommes vraiment chanceux et nous avons maintenant environ cinq ans d'avance sur tous les autres acteurs du secteur », a-t-il déclaré.

D'autres leaders dans le domaine sont maintenant prêts à s'impliquer dans le laboratoire, notamment des sommités de l'Institut d'astronomie Max Planck en Allemagne, de l'Université Harvard et de l'Université de Californie à Santa Cruz, selon M. Rheinstadter.

Le laboratoire et son simulateur ont également été loués par le professeur californien Deamer, qui a travaillé sur la théorie des étangs chauds.

« C'est merveilleux, a dit M. Deamer. Ils seront capables de faire des expériences que personne d'autre ne peut faire. Ils ont juste besoin que les gouvernements ouvrent leurs coffres pour payer davantage de collaborations, car les laboratoires du monde entier veulent participer à ce projet. »

M. Deamer estime que le simulateur de planète « change la donne » et prévient que les cellules qu'il a créées jusqu'à présent sont importantes.

« Ces cellules ne sont pas vivantes, mais constituent des étapes évolutives vers un système vivant de molécules, a-t-il expliqué. Cela ouvre la porte à plusieurs activités expérimentales qui étaient littéralement impossibles auparavant. »