Une nouvelle espèce du genre humain pouvant avoir existé il y a un à deux millions d'années a été mise au jour dans une grotte appelée Rising Star, en Afrique du Sud, où des fouilles ont permis d'exhumer le plus important «échantillon» d'ossements humains fossilisés trouvés à ce jour sur le continent africain.

La découverte, dont les détails sont publiés dans le journal scientifique en libre accès eLife, a été faite par une équipe de chercheurs que dirigeait le professeur Lee Berger, de l'Université du Witwatersrand de Johannesburg, et dont faisait partie Michelle Drapeau, professeure au département d'anthropologie de l'Université de Montréal.

Au cours de deux expéditions de fouilles qui ont eu lieu en novembre 2013 et en mars 2014, les chercheurs ont déterré plus de 1550 ossements fossilisés partiels ou complets, appartenant à au moins 15 individus adultes ou juvéniles qui ont tous une «morphologie remarquablement homogène». L'âge des fossiles demeure inconnu pour le moment.

Homo naledi- «étoile» en sesotho, une langue locale sud-africaine - est d'une taille comparable à celle d'un être humain actuel de petite taille. Le cerveau d'Homo naledi est aussi très petit par rapport à sa masse corporelle.

Homo naledi avait des dents relativement petites, semblables à celles des autres espèces anciennes d'Homo. Son alimentation devait nécessiter moins de temps de mastication que celle des hominidés plus primitifs, ce qui laisse croire qu'il avait la capacité de transformer ses aliments, soit avec des outils ou avec le feu, ou encore qu'il était en mesure de trouver des aliments de meilleure qualité, a dit Mme Drapeau.

Par ailleurs, les mains et les pieds d'Homo naledi ressemblent à ceux de l'homme moderne. Ses mains sont robustes et comportent des caractéristiques liées à la manipulation et à la fabrication, tandis que ses pieds possèdent de gros orteils rigides, contrairement aux grands singes, dont le gros orteil est décalé pour leur permettre de mieux grimper aux arbres, ajoute la chercheuse.

Les prochaines étapes de cette recherche consisteront à tenter de déterminer l'âge des fossiles et à effectuer de nouvelles fouilles afin de découvrir d'autres spécimens de la même espèce.

Si la datation permet d'établir que les fossiles sont plus vieux que deux millions d'années, cela signifiera qu'Homo naledi est le plus lointain représentant de notre genre, à l'exception de quelques fragments isolés, concluent les auteurs de l'étude. Par contre, si son existence remonte à moins d'un million d'années, ce serait une preuve de plus qu'il y a eu une coexistence de plusieurs espèces du genre Homo sur le continent africain dans les périodes ultérieures de l'évolution humaine.

Rites funéraires

Les chercheurs, soucieux de comprendre les raisons pour lesquelles les ossements se trouvaient dans cette grotte quasi inaccessible, n'étaient cependant pas au bout de leur surprise.

Cette chambre isolée «n'a jamais été contact avec la surface», notent-ils. Le tunnel pour y accéder est extrêmement raide et tellement étroit que seuls des chercheurs à la morphologie menue ont réussi à se rendre sur les lieux de cette découverte majeure.

«Nous avons imaginé plusieurs scénarios, y compris la possibilité de l'attaque d'un super prédateur, une catastrophe, une mort accidentelle ou encore un traquenard», avant finalement d'éliminer toutes ses hypothèses, a raconté Lee Berger.

En fait, «nous avons découvert une nouvelle espèce du genre humain qui pratiquait des rites funéraires», a-t-il conclu. «Jusqu'à présent, nous pensions que le recours aux rites funéraires était unique à l'Homo sapiens. Nous nous considérions comme différents. Nous avons désormais découvert - en tout cas nous le croyons - une espèce qui avait cette même capacité, et cela est une découverte extraordinaire», a-t-il estimé dans une salle de presse bondée.

Les ossements exhumés en Afrique du Sud représentent un défi pour les chercheurs. Ils compliquent un peu plus le tableau des hominidés, car l'Homo naledi présente à la fois des caractéristiques propres aux hominidés modernes et anciens.

«Ses mains, ses poignets et ses pieds sont très proches de celles de l'homme moderne. Dans le même temps, son petit cerveau et la forme de la partie supérieure de son corps sont plus proches du groupe préhumain des australopithèques», explique le professeur Chris Stringer du Musée d'histoire naturelle de Londres.

Cette découverte pourrait donc permettre d'en apprendre davantage sur la transition, il y a environ 2 millions d'années, entre l'australopithèque primitif et le primate du genre homo, notre ancêtre direct.

Une importante quantité des fossiles exhumés seront exposés au public à partir de vendredi et pour un mois au «Berceau de l'humanité».

Depuis des années, ce site, truffé de grottes et de fossiles de pré-humains et véritable mine d'informations sur nos ancêtres, est un trésor pour les archéologues et paléontologues.

Et Lee Berger l'assure: «la chambre aux étoiles» où a été trouvé l'Homo naledi «n'a pas encore révélé tous ses secrets, car il pourrait y avoir encore des centaines, voire des milliers de fossiles d'Homo naledi».

-Avec AFP