Des produits ignifuges qu'on trouve couramment dans une foule de produits, comme les matelas, les tissus et les appareils électroniques, augmentent la production de gaz mortel lorsqu'un incendie se déclare, selon une nouvelle recherche.

Ces produits, appelés polybromodiphényléthers ou PBDE, «sont efficaces pour réduire l'inflammabilité des matériaux», mais «ils ont l'effet indésirable d'augmenter la quantité de monoxyde de carbone et de cyanure d'hydrogène qui est relâchée pendant la combustion», affirme dans un communiqué la chimiste britannique Anne Stec.

Elle a présenté sa recherche la semaine dernière au congrès de la Société américaine de chimie.

La plupart des personnes qui périssent dans un incendie meurent par asphyxie, et non à cause de brûlures. Le monoxyde de carbone et le cyanure d'hydrogène sont deux gaz inodores. Les dangers du monoxyde de carbone sont bien connus et on peut installer des détecteurs pour s'en protéger.

Moins connu, le cyanure d'hydrogène est particulièrement mortel. Il est tristement célèbre pour avoir été utilisé dans les chambres à gaz nazies. Le cyanure se dégage quand des polymères comme le nylon, le polyuréthane ou l'acrylique brûlent.

Son rôle dans les incendies a été sous-estimé, selon une autre recherche publiée en février dernier. Des taux mortels ou dangereux de cyanure ont été observés dans le sang de 31% des victimes d'incendie en Suède entre 1992 et 2009.

Dans l'un des incendies les plus mortels des dernières années en Amérique du Nord, celui d'une salle de spectacle du Rhode Island en 2003, pendant un spectacle rock, la plupart des 100 morts ont été causées par l'asphyxie. Selon le magazine Scientific American, le taux combiné des gaz y était assez élevé pour tuer en 90 secondes.

Ces nouvelles données sont un argument de plus contre les PBDE, qui sont critiqués depuis des années parce qu'ils se répandent rapidement dans l'environnement et sont très persistants.

Lors de tests en laboratoire, des animaux exposés aux PBDE peuvent contracter «des troubles de comportement et des troubles hépatiques», selon Environnement Canada. «Ces substances peuvent également entraver la production normale de certaines hormones thyroïdiennes», ajoute-t-on.

On a constaté que le taux de PBDE était en hausse constante dans le corps humain au cours des dernières décennies.

C'est pourquoi les États-Unis ont décidé en 2004 d'abandonner progressivement la production d'ignifuges polybromés. Le Canada a adopté la même approche, mais Environnement Canada n'était pas capable hier d'indiquer où en était ce processus.

En dépit de ces décisions, de grandes quantités de PBDE sont présentes dans les maisons, les lieux de travail et les lieux publics.

Un produit qui sauve des vies?

Dans les années 70, la Californie a été la première à exiger que les matelas et les autres produits rembourrés résistent à la flamme pendant au moins 12 secondes, de façon à réduire les risques d'incendie. L'ajout d'ignifuges polybromés, ou PBDE, à la mousse de polyuréthane a permis de respecter cette norme, qui s'est étendue à toute l'industrie du meuble. La même approche a été adoptée pour une foule d'autres produits, des tapis aux tissus en passant par les plastiques utilisés pour fabriquer les appareils électroniques, et jusque dans les jouets.

L'industrie des produits chimiques affirme que ces produits sauvent des vies en augmentant considérablement le temps dont on dispose pour fuir un incendie. Mais d'autres substances pourraient être tout aussi efficaces sans avoir les mêmes désavantages, soulignent les chercheurs interrogés.