Au sein du tout nouveau Centre japonais de recherches sur la vie spatiale, créé par la première femme astronaute du Japon, des scientifiques développent des technologies innovantes dans le but de réaliser l'une des plus grandes quêtes de l'humanité : faire vivre des hommes dans l'espace.

Dans les laboratoires dotés d'équipements ultra-pointus de l'Université des sciences de Tokyo, Chiaki Mukai dirige une équipe de trente chercheurs qui expérimentent des solutions nouvelles pour permettre aux Hommes de vivre dans de futures colonies sur Mars ou sur la Lune.

« C'est dans la nature humaine d'explorer. La Terre est trop petite pour nous, vous ne pensez pas ? », interroge cette énergique femme menue de 66 ans qui totalise plus de 500 heures passées dans l'espace au cours de deux missions distinctes dans les années 1990.

L'exploration de l'espace est entrée dans une nouvelle ère, selon elle, avec l'arrivée d'acteurs privés, comme la société américaine Space X fondée par Elon Musk, mais aussi avec la volonté affichée par le président américain Donald Trump d'envoyer des astronautes établir une base sur la Lune en préambule à une mission habitée vers Mars.

« C'est tout à fait réalisable d'établir une colonie sur la Lune d'ici 2030 », estime Mme Mukai, ajoutant qu'il faut faire mieux que la Station spatiale internationale, « un camping où il faut toujours tout emporter avec soi ».

Une des innovations développées par son équipe est un système unique de production de nourriture grâce à un plasma fabriqué en faisant passer un courant à haute-tension à travers une solution saline.

Il permet de réduire la formation d'algues indésirables dans l'eau utilisée pour faire pousser les cultures. Des tests réalisés en reproduisant les conditions dans l'espace ont montré que les pommes de terre poussent mieux et plus vite grâce à ce système.

Chasse aux débris spatiaux

Le centre de recherche a aussi mis au point une technique de production d'électricité grâce à de petits capteurs thermoélectriques attachés aux bâtiments de la base, qui pourrait ainsi bénéficier d'une température confortable, alors qu'à l'extérieur le thermomètre peut osciller entre 130 degrés Celsius le jour et -230 degrés la nuit.

Cette technologie utilise la différence de température entre l'intérieur et l'extérieur « pour alimenter en électricité la totalité d'une base dans l'espace », assure Tsutomu Lida, chargé du projet.

Une autre équipe travaille sur un moyen de détecter et de capturer les plus de 29 000 morceaux de débris spatiaux de plus de 10 centimètres présents en orbite autour de la Terre et qui pourraient représenter un danger pour les futurs résidents d'une base spatiale.

Selon Chiaki Mukai, qui a créé ce centre en début d'année, beaucoup des innovations qui y sont développées pourraient aussi trouver des applications sur Terre.

« Nous ne mettons pas seulement au point des technologies pour la Lune, mais, en les adaptant, nous pourrons également contribuer à résoudre de nombreux problèmes que nous connaissons également sur Terre », assure-t-elle.

Par exemple, les cultures hors-sol pourraient s'avérer très utiles dans les pays d'Afrique subsaharienne.

Chiaki Mukai se dit « sûre » de voir de son vivant une colonie s'établir sur la Lune, et elle ne peut s'empêcher de vouloir repartir dans l'espace, à l'image de son confrère John Glenn, premier Américain en orbite autour de la Terre en 1962 et qui était reparti dans l'espace en 1998, à 77 ans.

Pour cette ancienne chirurgienne du coeur, ses compétences médicales et spatiales pourraient être très utiles dans les futurs vols touristiques dans l'espace. « Je rêve de devenir agent de bord pour ces vols commerciaux, et ainsi de contribuer à envoyer les gens sur la Lune », imagine-t-elle en riant.