Depuis l'Europe jusqu'au pôle Sud, en passant par le Chili et Hawaï, huit télescopes ont pointé simultanément ces cinq dernières nuits le centre de notre galaxie pour tenter d'obtenir une image du trou noir géant qui s'y cache.

« Au lieu de construire un télescope gigantesque (qui risquerait de s'effondrer sous son propre poids), on combine plusieurs observatoires comme s'ils étaient des petits fragments d'un miroir géant », explique à l'AFP Michael Bremer, astronome et un des responsables du projet appelé Event Horizon Telescope (EHT).

« Ceci permet d'obtenir un télescope virtuel de la taille de la Terre, d'environ 10 000 km de diamètre », ajoute-t-il. Or, plus un télescope est grand, plus il permet de voir de détails.

L'objectif de cette alliance mondiale : observer le centre de notre voie lactée, Sagittarius A, et le trou noir qu'il abrite.

Obtenir une photo d'un trou noir constituerait une première dans l'histoire de l'astronomie.

Situé à environ 24 000 années-lumière de la Terre, l'objet mystérieux a une masse équivalente à 4 millions de fois celle du soleil (mais tassée dans un tout petit volume). Il est tellement massif que même la lumière ne peut s'en échapper et n'est donc pas observable directement.

Mais selon la théorie, quand la matière est absorbée par le trou noir, elle émet une lumière. Le projet EHT, capable d'observer dans les ondes millimétriques, peut capter ce rayonnement. Les astronomes espèrent ainsi pouvoir observer le pourtour du trou noir, appelé horizon.

« Pour la première fois de notre histoire, nous avons les bases technologiques pour observer des trous noirs en détail », explique Michael Bremer, de l'Institut de radioastronomie millimétrique (IRAM). L'Event Horizon Telescope poussé à sa limite de performance permet de distinguer un objet lumineux de la taille d'une balle de golf sur la Lune.

Le télescope de 30 mètres de l'IRAM (financé en partie par le CNRS, l'institut de recherche français, et situé dans la Sierra Nevada espagnole) est la seule station d'observation en Europe à avoir participé aux cinq nuits d'observation. Le projet implique également le puissant radiotélescope ALMA situé sur le très haut plateau aride de l'Atacama au Chili et des structures aux États-Unis, au Mexique, en Antarctique.

Toutes les données enregistrées (environ 500 téraoctets par station) vont désormais être traitées par un centre de supercalcul à Haystack aux États-Unis.

« En combinant les données, les images vont se former », explique Michael Bremer. Mais « les résultats vont se faire attendre pendant plusieurs mois ».